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Dans l'autre genre de comédie, on présente un caractère dominant, qui fait proprement le sujet de la pièce. Telles sont les comédies de l'Avare, du Glorieux, du Menteur, etc. Le poète peut associer à ce caractère principal d'autres caractères, pour ainsi dire, subalternes, sans que l'action en devienne plus chargée et plus intriguée. C'est ce qu'a fait Molière dans le Misanthrope, où il a présenté les caractères de la coquette, de la médisante et des petitsmaîtres.

Nous avons beaucoup de comédies de caractère mixte, c'est-à-dire, formées de plusieurs caractères opposés entr'eux, mais qui sont tous de la même force; de manière qu'il n'y en a aucun qui brille assez pour être distingué des autres, et pour être regardé comme le caractère principal. Tels sont dans l' Ecole des Maris de Molière, les caractères d'Isabelle, de Sganarelle, d'Ariste et de Léonor; dans l'Ecole des Femmes, ceux d'Agnès et d'Arnolphe. Aucun de ces caractères ne domine sur les autres : aucun de ces caractères n'est subalterne ou accessoire.

caractères dans la

La comédie étant faite pour peindre Action et il faut que les hommes, il faut l'action Ꭹ soit subordonnée aux caractères. Le princi- Comedie. pal doit seul servir à l'intrigue : c'est de cette source qu'elle doit partir. Le poète

a dû d'abord choisir ce caractère, ensuite imaginer, arranger, distribuer une action propre à le faire connoître et à le développer. Il faut donc que toutes les parties de cette action se rapportent à lui; que tous les incidens, tous les coups de théâtre qui arrivent, même quand il a disparu des yeux du spectateur, ne viennent que de lui, ne tendent qu'à lui, et qu'il soit la cause immédiate de toutes les scènes, de tous les traits qui font rire. C'est ce qu'on voit dans les pièces de Molière et de nos bons comiques. Tout s'y rapporte au principal personnage.

Pour bien traiter ce caractère, qui seul est le principe de l'action, il est bon d'en imaginer et d'en présenter un autre qui lui serve de contraste, et qui le fasse ressortir davantage. C'est un des moyens, comme je l'ai dit plus haut, de bien peindre un vice ou un ridicule. Mais il faut que ce caractère opposé au principal, ne soit ni assez fort ni assez brillant pour partager l'attention et l'intérêt du spectateur. C'est un défaut qu'on a remarqué dans la belle comédie du Glorieux. Le caractère de Lisimon, riche bourgeois ennobli, personnage brusque et familier, est presque aussi saillant que celui du comte de Tuffières, ce personnage si vain, si fier de ses aïeux et de sa noblesse. Aussi les plai

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santeries grossières du financier font presque disparoître les traits fins et délicats du Glorieux. Il est donc essentiel que le caractère principal soit le seul caractère dominant; qu'il l'emporte sur tous les autres, et qu'il soit peint de plus fortes couleurs que le caractère même avec lequel on le fait contraster.

Dans les comédies formées de plusieurs caractères qui brillent à-peu-près également, un ou deux de ces caractères sont le principe de l'action. Le poète les a choisis à cette fin, et leur en a opposé d'autres d'une force à-peu-près égale. Dans l'Ecole des Maris, les caractères d'Isabelle et de Sganarelle sont le fondement de l'intrigue; dans l'Ecole des Femmes, ce sont les caractères d'Agnès et d'Arnolphe. C'est à eux que se rapporte tout ce qui arrive dans le cours de l'action; et c'est par-là même qu'ils sont plus en jeu que tous les autres personnages, auxquels ils donnent le mouvement. Mais aucun de ces caractères ne pouvoit servir de caractère principal, parce qu'aucun d'eux n'a ni assez de force ni assez d'éclat pour dominer sur les autres, et les éclipser entièrement.

Les caractères dans la comédie doivent être toujours présentés dans toute leur intégrité. Je veux dire que le poète ne doit omettre aucun trait qui puisse caractériser parfaitement ses person

nages,sur-tout le principal.Qu'on se rappelle ici en quoi consiste la belle nature: c'est dans la perfection des objets que présente le poète, de quelque espèce, de quelque genre qu'ils soient. Il faut l'imiter par-tout, cette belle nature, et principalement dans la comédie. C'est là qu'on doit peindre les caractères, non tels qu'ils sont réellement, mais tels qu'ils peuvent être vraisemblablement, et, pour cela, réunir en un seul tous les traits d'un caractère, distribués entre plusieurs membres de la société civile. Les caractères du Misanthrope, du Tartuffe, de l'Avare, de Molière, sont composés de ceux de plusieurs misanthropes, de plusieurs hypocrites, de plusieurs avares. Aussi ce sont des tableaux achevés qui nous plaisent, qui nous frappent, qui nous instruisent bien mieux que ne le feroient des personnages parfaitement ressemblans à quelques-uns des misanthropes, des hypocrites, des avares que nous voyons dans la société. Si Molière avoit omis un seul trait vraiment caractéristique, le personnage étoit manqué; le tableau n'étoit pas fini.

Le poète doit avoir soin d'observer des gradations dans le développement du caractère du principal personnage. Si celui-ci ne paroît point dans l'exposition du sujet, les personnages qui la font (il est assez indifférent que ce soient

des soubrettes, des valets, ou d'autres acteurs) le feront connoître par leurs discours ou par des récits dont il soit l'objet. Mais quand le noeud est commencé, quand l'intrigue est formée, il doit être peint par des actions. Un trait frappant l'offre d'abord aux yeux du spectateur: un trait plus frappant encore vient tout-à-coup le développer; et l'on en voit une suite de plus forts encore jusqu'au dénouement, où le dernier coup de pinceau montre le caractère dans tout son jour et sous toutes ses faces c'est le dernier trait ajouté au ridicule. Nos bons comiques n'ont jamais manqué à cette règle: ils l'ont même bien souvent observée, après que le dénouement venoit de se faire. Le Misanthrope de Molière termine la pièce par ces vers:

Trahi de toutes parts, accablé d'injustices,

Je vais sortir d'un gouffre où triomphent les vices,
Et chercher sur la terre un endroit écarté,

Où d'étre homme d'honneur on ait la liberté.

Le Distrait de Regnard dit à son valet, au moment où son mariage qui fait le dénouement de la comédie, vient d'être arrêté,

Toi, Carlin, à l'instant prépare ce qu'il faut,
Pour aller voir mon oncle et partir au plutôt,

Carlin lui répond:

Laissez votre oncle en paix. Quel diantre de langage !....... Yous n'y songez donc plus? Vous êtes marié,

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