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perdre de vue le terme de l'événement, qui est son objet. Un personnage ne dira donc que ce qu'il faut : un autre personnage ne lui répondra que quand il devra le faire; et le spectateur sentira toujours la raison pourquoi la parole passe d'une bouche à un autre.

Il est sur-tout essentiel qu'un interlocuteur réponde précisément à ce qu'a dit un autre interlocuteur, et qu'on voie dans le dialogue cette liaison d'idées, cette suite de raisonnmens, cette logique secrète, qui doit être l'ame de tous les entretiens. Cependant il est des circonstances où cette règle ne doit pas être observée; c'est dans une grande passion, dans l'excès d'un grand malheur. L'ame n'est alors remplie que de ce qui l'occupe, et non de ce qu'on lui dit. Le personnage plein de son objet, ou ne répond point, ou ne répond qu'à son idée. C'est alors, comme le dit Voltaire, qu'il est beau de ne pas bien répondre. Mais remarquons, que quoique ce personnage agité d'une grande passion, ne réponde pas directement à ce qu'on lui dit, néanmoins tout ce qui sort de sa bouche, se rapporte à l'action. Ainsi dans ces circonstances mêmes le dialogue tend à son but.

Pour bien connoître l'art du dialogue, qui est une des parties les plus essentielles d'une pièce de théâtre, il faut joindre à

ces règles générales, la lecture des bonnes pièces de Corneille, celles de Racine et de Molière. On y verra par-tout que ces auteurs dramatiques ne s'attachant qu'à la vérité, font toujours répondre leurs personnages avec justesse, et jamais hors de propos. J'en indiquerai quelques exemples dans les articles sui

vans.

Un acteur parle seul dans un monologue: mais ce n'est point pour raconter un événement, ou pour dire ce qui arrivera. Les Grecs et les Latins ont suivi cet usage, que nous avons banni de notre théâtre, parce qu'il n'est pas dans la nature. Le monologue doit être un combat du cœur; et le personnage doit y paroître irrésolu, délibérant, pour ainsi dire, avec lui-même sur ce qu'il doit faire. Il faut qu'il soit court si l'on peut lui donner une certaine étendue, ce n'est que quand l'acteur est accablé sous le poids de son malheur, ou qu'il est dans une agitation violente.

ARTICLE III.

Du Poème Comique.

Le poème comique est en général celui où l'on introduit sur la scène des personnages qui font une action amusante et risible, mais commune, c'est-à-dire

Définition

relative au caractère, aux mœurs, à la manière de vivre des hommes dans la société ordinaire. Pour faire connoître tous les divers ouvrages que renferme ce genre, je parlerai dans cet article, 1o. de la comédie; 2°. des pièces de théâtre qui y ont rapport; 3° de l'opéra comique.

I.

De la Comédie.

Le but de la comédie est de corriger les mœurs en riant : ce n'est pas moins pour nous instruire que pour nous divertir, qu'elle a été inventée. Elle parvient à ces deux fins, en représentant une action prise dans la vie commune, digne de risée, et de laquelle nous pouvons retirer quelque avantage pour les

mœurs.

La comédie est donc un poème qui! de la co- imite par l'action, le ridicule, à dessein du ridícu- de le corriger. Ce ridicule, suivant le le. sens de la définition qu'en a donnée Aris

médie, et

tote, est un défaut, un vice même, qui, sans occasionner la destruction du vicieux, lui cause de la honte, en même temps qu'il fait rire le spectateur. Ce sera un magistrat qui, oubliant la décence et la gravité de son état, ne s'occupera que de puérilités ; un bourgeois

de la campagne, qui voudra prendre le ton, les manières d'un courtisan; un homme, en un mot, qui choquera les bienséances, les usages reçus, ou même ce qu'on appelle la morale du monde. poli.

Les vices appartiennent à la comédie; mais ce n'est qu'autant qu'ils sont ridicules. Il faut que le poète jette le voile sur tout ce qu'ils peuvent avoir de bas, de méprisable et de révoltant. Nous ne devons jamais voir le vicieux dans une situation qui puisse faire naître en nous, ou la compassion, ou la haine, ou l'effroi. Il doit toujours nous égayer à ses dépens; et plus il nous amusera et nous divertira, plus nous sentirons, si nous faisons un secret retour sur nous-mêmes, qu'il nous avertit de nous tenir sur nos gardes, pour ne pas tomber dans ce même ridicule, qui le rend à nos yeux un objet de risée. L'hypocrisie est un vice bien détestable. D'où vient cependant que nous rions à la vue de Tartuffe ? C'est parce que nous le voyons mal caché sous son masque; c'est parce que Molière a su présenter ce faux dévot par le côté ridicule. Il est vrai qu'il l'a rendu odieux dans le cinquième acte; mais c'étoit, comme le remarque J. B. Rousseau, par la nécessité de donner le dernier coup de pinceau à son personnage. Il y a plusieurs moyens de bien pein

dre les ridicules et les vices. Le premier, c'est d'opposer un ridicule à un autre ridicule, un vice à un autre vice; de représenter à côté d'une femme altière et absolue, un mari pusillanime et soumis; à côté d'un père avare, un fils prodigue. Le second, c'est d'opposer le ridicule ou le vice à l'honnête et au décent; de représenter à côté d'un misanthrope, un homme doux et poli; à côté d'un flatteur, un homme sincère et vrai. Le troisième moyen, c'est d'outrer un peu la peinture. Les objets ne sont vus au théâtre, que dans le lointain. Il faut les peindre à grands traits, pour qu'ils fassent une impression forte et durable.

Comédies Il y a des comédies d'intrigue et des d'intri- comédies de caractère. Les comédies gue: Comédies de d'intrigue, dit un auteur comique (1), caractère. consistent dans un enchaînement d'aven

tures qui tiennent le spectateur en ha leine, et forment un embarras qui croît toujours jusqu'au dénouement. Comme il ne s'agit dans ces sortes de pièces, que de les charger d'incidens, ils en font ordinairement tout le mérite, les mœurs et les caractères n'y étant touchés que superficiellement. Če genre de comédie, qui demande beaucoup d'imagination, égaie l'esprit, mais sans l'instruire : il amuse et ne va pas jusqu'au cœur.

(1) Destouches. Comédie de l'Envieux.

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