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nasse. Voltaire dit dans son Temple du Goût :

Là régnoit Dépréaux, leur maître en l'art d'écrire,
Lui qu'arma la raison des traits de la satyre;
Qui donnant le précepte et l'exemple à-la-fois,
Etablit d'Apollon les rigoureuses lois.

Le siècle de Boileau vit éclore parmi nous trois poèmes latins. Le premier sur la peinture est de Dufresnoy, qui étoit peintre lui-même. Ses préceptes sont sûrs et puisés dans le sein de la nature, mais en général exprimés trop séchement. De Piles le traduisit en françois, presque sous les yeux de l'auteur.

Le second est le poème des Jardins, par le P. Rapin, jésuite; ouvrage vraiment digne du siècle de Virgile, par l'économie du plan, l'élégance et les graces du style, le choix des ornemens, et la variété des descriptions. On en avoit donné, il y a quelque temps, une traduction, mais beaucoup trop libre, et infidèle. Celle qui a été publiée depuis peu, est exacte: il ne lui manque que d'être un peu plus soignée.

Le troisième est l'Antilucrèce, par le cardinal de Polignac. Le systême du partisan d'Epicure y est détruit par les raisonnemens les plus simples et les plus convaincans, embellis de tout le coloris et de tous les charmes de la poésie. Voici ce que Voltaire, dans son Temple du

Goût, fait dire à Lucrèce qui s'adresse au cardinal :

Aveugle que j'étois, je crus voir la nature.
Je marchai dans la nuit, conduit par Epicure.
J'adorai comme un dieu ce mortel orgueilleux,
Qui fit la guerre au ciel, et détrôna les dieux.
L'ame ne me parut qu'une foible étincelle,
Que l'instant du trépas dissipe dans les airs.
Tu m'as vaincu; je cède, et l'ame est immortelle
Aussi bien que ton nom, mes écrits et tes vers.

Il seroit bien difficile de donner de ce beau poème une traduction plus élégante et plus fidèle que celle qui en a été faite par Bougainville.

Le P.Sanlecque, contemporain de Boileau, nous a laissé un poème français sur le Geste. Il y a des maximes et des préceptes utiles aux orateurs: mais la poésie en est foible.

Notre siècle a été plus fécond encore en poètes didactiques, que celui de Louis le Grand. Un de ceux qui l'honorent le plus est le P. Vanière, jésuite, par son Prædium rusticum. Il y traite avec ordre, et dans le plus grand détail, de tout ce qui concerne l'agriculture. Sa poésie est moins vive et moins brillante que celle de Virgile mais elle est douce, harmonieuse et variée. Ses tableaux sont gracieux, ses descriptions charmantes; et les plus petits objets y sont toujours ennoblis par l'élégance et la beauté de la diction. Če poěme a été foiblement traduit par Berland d'Halouvry.

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Le P.Brumoi, jésuite, a fait deux poèmes latins; l'un sur les Passions, et Ï'autre sur l'Art de la Verrerie. On admire dans le premier la force des pensées, la richesse et l'éclat de l'imagination, et un grand nombre de peintures vraies du cœur humain ; dans le second, une élégante noblesse, et l'heureuse facilité avec laquelle sont décrits les différens ouvrages de verrerie. L'auteur lui-même les a traduits en français.

Nous sommes redevables aussi de deux fort beaux poèmes latins au père Doissin, jésuite, enlevé aux Muses dans le printemps de son âge; l'un sur la Sculpture, et l'autre sur la Gravure. Le premier sur-tout abonde en descriptions, où éclatent toute la force et toute la vivacité du coloris poétique. Je n'en connois point de traduction. Le poëme de la gravure a été fort bien traduit par le P. Avril, de la même compagnie.

Racine le fils a chanté la Religion. On a vu le plan de ce poème, non moins admirable par une suite de raisonnemens solides et lumineux, que par la magnificence et la sublimité des images, surtout dans les morceaux, où le poète rend les beautés des livres saints. Il a fait aussi un poème sur la grace, qui est bien inférieur au premier, quoiqu'on y reconnoisse en plusieurs endroits le pinceau du même poète.

Lorsque Racine mit au jour son premier poème, Pope, poète anglais, avoit donné son Essai sur l'homme, qui essuya d'abord quelques critiques touchant le fond des choses. Mais les plus zélés et les plus éclairés partisans de la religion même pesèrent mûrement ces critiques, et en reconnurent toute l'injustice et tout l'odieux. Il n'y a rien dans ce poème,dont la piété chrétienne puisse s'allarmer. Les principes généraux de la morale y sont établis d'une manière sage et vraie. Quant à la poésie, les Anglais le regardent comme un des plus beaux morceaux qu'ils aient en leur langue. Le même poète a fait un Essai sur la critique. L'ordre et la méthode y sont un peu négligés mais les préceptes qu'il contient, sont excellens. Silhouette a traduit en prose les deux poèmes ; et l'abbé du Resnel les a mis en beaux vers français.

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Les règles de la déclamation théâtrale ont été tracées par Dorat, dans un poème, où les beautés solides ne sont pas en petit nombre. Le style en est ahondant, fleuri, et ne manque jamais de chaleur.

Les Muses latines et les françaises se sont disputé de nos jours l'honneur de célébrer la peinture, et d'en crayonner les préceptes. L'abbé de Marsy a fait dignement parler les premières dans son charmant poème latin, qui a pour titre

l'Art de peindre. On ne peut pas y desirer plus de sagesse, plus de graces, el plus de coloris. Il a été fort bien traduit par Querlon.

L'Art de la Peinture, poème français, par Watelet, offre un heureux enchaînement dans toutes ses parties, et des descriptions de la plus grande beauté.

Il y a aussi de très-brillans morceaux dans un autre poème sur la peinture par Lemierre, L'ordre sur-tout s'y fait

remarquer.

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Le P. Boscovich, jésuite, a emprunté le langage des Muses latines, pour traiter une des matières les plus difficiles et les plus sublimes de la physique. Son poème des Eclipses est un vrai traité d'astronomie, où tous les objets présentés avec une régularité méthodique, sont embellis de tout ce que la poésie peut fournir, dans un pareil sujet, de plus riche, de plus agréable et de plus enchanteur. Nous en avons depuis quelques années une nouvelle édition, avec une fort belle traduction de l'abbé de Barruel.

L'Agriculture ou les Géorgiques françaises, par Rosset, est un poème qui honore la nation autant, qu'il peut être utile. Aucune partie de l'économie rurale n'y a été oubliée. La poésie en est toujours noble, brillante, vive et soutenue. On a pu en juger par les différens morceaux que j'en ai cités,

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