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De la

Déjà la vieillesse s'avance;
Et je verrai dans peu la mort
Exécuter l'arrêt du sort
Qui m'y livre sans espérance.

Fontenai, lieu délicieux,
Où je vis d'abord la lumière,
Bientôt au bout de ma carrière,
Chez toi je joindrai mes aïeux.

Muses, qui dans ce lieu champêtre
Avec soin me fites nourrir;

Beaux arbres, qui m'avez vu naître,
Bientôt vous me verrez mourir, etc.

Quand l'ode dans le genre gracieux ne chante que Bacchus ou l'Amour, on l'appelle proprement anacréontique, du nom d'Anacréon, qui en fut l'inventeur. Elle ne diffère alors en rien de la chanson bachique et érotique; et les règles de ces deux genres de poésie sont les

mêmes.

Nous avons une espèce d'ode faite pour Cantate. être mise en musique; c'est la cantate. On y distingue deux parties; les récits, qui ordinairement n'excèdent pas le nombre de trois, et les airs dont chacun de ces récits est suivi. Dans le récit, le poète présente l'objet : dans l'air, il exprime le sentiment ou la réflexion qu'a dû faire naître la vue de cet objet. Les vers des récits peuvent être de huit, de dix, de douze syllabes, mais jamais au-dessous de huit. On peut employer dans les airs des vers de toute mesure, à l'exception de ceux de douze pieds: la majesté du

vers alexandrin ne fourniroit point assez aux chutes et à la vivacité d'un air de mouvement.

Il faut choisir pour sujet d'une cantate quelque trait historique ou fabuleux, d'où l'on puisse tirer des réflexions morales. Ce poème doit être, suivant J. B. Rousseau (1), qui en a été parmi nous l'inventeur, une allégorie exacte, dont les récits soient le corps, et les airs l'ame et l'application. Il admet la même noblesse d'idées, la même pompe d'expres sions que l'ode; mais il en rejette les écarts et le désordre: ils seroient incompatibles avec l'art et la sagesse qu'il faut pour soutenir une allégorie. Le style du récit doit avoir plus d'énergie et d'éléva tion que celui de l'air, qui doit être plus vif et plus animé.

Il y a des cantates dans le genre noble, et dans le genre gracieux. J. B. Rousseau nous en offre de parfaits modèles des deux espèces. Dans le premier genre, celle de Circé est un chef-d'oeuvre. Peut-on rien ajouter à la beauté de ce tableau, où il représente cette magicienne ayant recours aux secrets de son art pour rappeler Ulysse?

Sur un autel sanglant l'affreux bûcher s'allume:
La foudre dévorante aussitôt le consume.

Mille aoires vapeurs obscurcissent le jour.

(1) Préf. de ses Œuvres.

Les astres de la nuit interrompent leur course.
Les fleuves étonnés remontent vers leur source;
Et Pluton même tremble en son obscur séjour.

Sa voix redoutable
Trouble les enfers.
Un bruit formidable
Gronde dans les airs.
Un voile effroyable
Couvre l'univers.
La terre tremblante
Frémit de terreur.
L'onde turbulente
Mugit de fureur.
La lune sanglante
Recule d'horreur:

Dans le sein de la mort ses noirs enchantemens
Vont troubler le repos des ombres.

Les månes effrayés quittent leurs monumens:
L'air retentit au loin de leurs longs hurlemens ;
Et les vents échappés de leurs cavernes sombres,
Mèlent à leurs clameurs d'horribles sifflemens.

Dans le genre gracieux, la cantate de Céphale offre les images les plus douces et les plus riantes. Telles sont celles-ci :

La nuit d'un voile obscur convroit encor les airs,
Et la senle Diane éclairoit l'univers;

Quand de la rive orientale,

L'Aurore, dont l'amour avance le réveil,
Vint trouver le jeune Céphale,
Qui reposoit encor dans le sein du sommeil.
Elle approche, elle hésite, elle craint, elle admire :
La surprise enchaine ses sens;

Et l'amour du héros pour qui son cœur soupire,
A sa timide voix arrache ces accens:

Vous qui parcourez cette plaine,
Ruisseaux, coulez plus lentement:
Oiseaux, chantez plus doucement;
Zéphyrs, retenez votre haleine.

Respectez un jeune chasseur,
Las d'une course violente,

Et du doux repos qui l'enchante,
Laissez-lui goûter la douceur.

La Grèce a été féconde en poètes ly- Poètes lyriques. Mais les ouvrages du plus grand riques. nombre ont été perdus. Nous ne connoissons Simonide, Stesichore, Alcée et Tyrthée, que par les grands éloges qu'en fait Horace. Car les fragmens de leurs poésies qui nous sont parvenus, se réduisent à très-peu de chose. Il ne nous reste des odes de la tendre Sapho, née à Mytilène, dans l'île de Lesbos, un peu plus de six cents ans avant J. C. que deux morceaux, où éclatent tout le feu et toute la vivacité du sentiment. Elle mérita qu'on lui donnât le nom de dixième Muse.

Anacréon, né à Téos, en Ionie, vers l'an 532 avant J. C., et, comme je l'ai déjà dit, inventeur de l'Ode qui porte son nom, ne chanta que l'amour et les plaisirs de la table. Ses odes, où règne une aimable négligence, sont toutes courtes: elles n'expriment souvent qu'un sentiment de l'ame, un tableau gracieux. La délicatesse et la naïveté en font le caractère. Madame Dacier les a fort bien traduites, ainsi que les deux morceaux de Sapho. Poinsinet de Sivry en a donné une imitation en vers. Nous en avons encore une bonne traduction

en prose par Joutonnet de Claifons, qui l'a réunie dans un même volume, avec celle de Moschus et de Bion, dont j'ai parlé ailleurs.

Pindare, né à Thèbes, en Béotie, vers l'an 500 avant J. C., fut le plus célèbre des lyriques grecs par la grandeur des idées, la beauté des images, les écarts et les transports fougueux de l'enthousiasme. Horace, qui en avoit fait une étude particulière, le regarde comme inimitable. Il le compare pour la plénitude, l'abondance et l'impétuosité, à un fleuve qui, grossi par les eaux du ciel, se précipite en bouillonnant du haut des montagnes. Les odes qu'il fit à la gloire des vainqueurs dans les jeux olympiques, sont les seules qui nous soient parvenues, et sont très-difficiles à entendre. Nous n'en avons point de traduction complète. L'abbé Massieu et l'abbé Sallier, en ont mis en français quelques unes, qu'on trouvera dans les Mémoires de l'Académie des Belles-Lettres. Alexandre s'étant emparé de la ville de Thèbes, épargna la maison qu'avoit occupée Pindare, et sauva du carnage tous ceux qui restoient de sa famille.

Horace, le seul lyrique latin, n'a pas toute la hardiesse et toute la fougue de Pindare, toute la douceur d'Anacréon, toute la vivacité de Sapho. Mais il réunit toutes ces qualités au degré qu'il faut pour

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