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Vous violez la conscience même, en forçant des hommes à révéler contre eux un secret dont ils ne doivent compte qu'à Dieu seul, ou à mentir pour échapper à votre oppression.

Vous établissez une inquisition dont Henri VIII, dans ses plus grands excès, n'a pas fourni d'exemple: car il n'obligeait pas les catholiques d'ètre euxmêmes leurs délateurs.

Vous violez les droits de l'Église, et vous l'insultez, en excluant de l'enseignement ceux à qui elle donne mission particulière d'enseigner, ceux qui font une profession plus étroite de la perfection qu'elle recommande aux chrétiens.

Vous violez plus directement encore ses droits divins, en étendant à ses propres écoles cette exclusion monstrueuse.

Voilà les libertés dont la France vous rend gråces: elle en avait déjà connu de semblables, de plus étendues même, sous l'empire et auparavant; mais elle peut désormais espérer de tout recouvrer. Misérables aveugles, dignes d'une immense compassion, l'avenir vous apprendra, ce que vous ne savez pas encore, combien petite est la distance qui sépare l'homme de peur de l'homme de crime. La révolution vous applaudit : je le crois, certes; que faitesvous qu'obéir à ses injonctions? Opprimez, persécutez, tyrannisez à son profit, sa reconnaissance nous vengera.

Vous parlez comme elle de l'ordre légal : et que veut dire ce mot? Il y a eu, je pense, plus d'un ordre légal de 1795 à 1828. Tout cela, était-ce l'ordre véritable, la justice, la liberté? Suffit-il que la force commande pour qu'il y ait ordre, pour qu'il y ait loi? Répondez, ceci est grave. Quand la loi conduisait sur la place Louis XV celui qu'en ce moment je n'ose nommer, qu'était-ce à vos yeux que cette loi? lui devait-on respect, soumission? J'attends ce que vous direz. Mais vous ne direz pas que le régicide, les proscriptions, les spoliations, et tant d'autres forfaits, fussent ce que vous appelez l'ordre légal. Il existait alors aussi, cependant, une

engagements des anciennes communautés religieuses, aucun des droits que notre vieux régime leur conférait, ce mot seul de congrégation couvre un crime, emporte une incapacité civile !... En vérité, nous n'y concevons rien: c'est faire de l'absurde pour le scul plaisir d'en faire, c'est créer un antécédent déplorable, c'est renouveler les billets de confession, les déclarations de civisme; c'est commander l'hypocrisie, le mensonge, et le commander sans nécessité. » Le Globe.

(1) Ce qui a donné naissance à la théorie moderne de l'ordre légal, c'est premièrement le besoin d'un prétexte pour opprimer avec une apparence quelconque de droit, secondement la nécessité où se trouve le libéralisme dogmatique, après avoir rejeté toute règle de justice immuable et divine, et par conséquent détruit la notion du devoir, de soutenir ou qu'on n'est jamais, et en aucun cas, tenu d'obéir à ce que le pouvoir commande, maxime qui renverse immédiatement la société; ou qu'on doit toujours obéir à la loi quelle qu'elle soit, c'est-à-dire aux prescriptions arbitraires de la force actuellement prédominante. Au contraire, le

force, un pouvoir public. Il y a donc un ordre contre lequel la force, le pouvoir ne peut rien ; une loi qui juge les lois mêmes. Qu'est-ce que cette loi? la connaissez-vous? et, dans le conflit entre elle et les volontés arbitraires, oppressives, de la puissance humaine, qu'y a-t-il à faire (1)? Imprudents! quel vertige vous étourdit; et comment ne tremblezvous pas de contraindre la France à poser ces questions terribles, et à les résoudre peut-être?

Il nous reste à parler d'une troisième ordonnance qui complète le système de persécution suivi par le ministère, sous la direction du libéralisme. A raison du caractère de l'homme qui l'a provoquée, celle-ci est en quelque sorte empreinte d'un sceau particulier, et comme de je ne sais quel signe semblable à celui que Dieu imprima sur le front de l'auteur du premier meurtre. La Providence a permis qu'un évêque se rencontrât, qui, possédant tout ce qu'il fallait pour préparer un schisme, et sentant au fond de lui-même le triste courage d'ètre dans l'Église ce qu'était, selon les doctrines de l'antique Orient, Ahriman dans l'univers, n'a point été effrayé de se rendre comme lui le chef de ceux qui n'ont point de chef. Il a dit au roi : « Il s'écoulera bien des années avant que le personnel du clergé soit en propor«tion avec les besoins de la France, et que les évè«ques puissent répondre aux instantes prières de « toutes les populations qui demandent des pas«teurs (2); » en conséquence, je propose à votre majesté de réduire de moitié le nombre des élèves qui annoncent l'intention de se consacrer au saint ministère.

Il a dit aux familles : Vous avez une répugnance naturelle (5) à permettre que vos enfants embrassent une carrière semée de tant de dégoûts et que chaque jour on rend plus pénible; eh bien! sachez désormais à quoi vous les exposez, en souffrant qu'ils éprouvent leur vocation dans une école ecclésiastique : s'il leur arrive plus tard de reconnaitre qu'ils n'étaient pas réellement appelés, ils perdront tout le fruit de leurs études; l'accès de toute autre

christianisme, ne séparant jamais ces deux choses également saintes, également indispensables, l'ordre et la liberté, ordonne d'être soumis à la puissance, c'est-à-dire, à l'autorité et à la raison; et, fixant aussitôt, pour prévenir la tyrannie, la règle et les limites de cette soumission, il déclare qu'elle n'est due qu'aux commandements justes et raisonnables, selon Dieu, l'autorité ecclésiastique, et le droit civil. Il nous semble pourtant qu'il y a quelque dignité dans cette doctrine, et qu'à tout prendre cela n'est pas trop mal pour le neuvième siècle.« Si quis potestati regiæ, « quæ non est, juxta apostolum, nisi à Deo, contumaci ac inflato << spiritu contra auctoritatem et rationem, pertinaciter contra<< dicere præsumpserit, et ejus justis ac rationabilibus imperiis « secundum Deum et auctoritatem ecclesiasticam ac jus civile « obtemperare irrefragabiliter noluerit, anathematizetur. » Concil. Parisiens.; aliàs Meldens. 846, c. XV.

(2) Rapport au roi, par M. Feutrier, évêque de Beauvais. Messager du 18 juin 1828. (3) Ibid.

profession leur sera fermé ; le grade de bachelier és lettres, exigé pour être admis dans les écoles de droit, de médecine, etc., leur sera complétement inutile (1).

l'homme moral et intellectuel, il trouvera bon que le gouvernement se l'arroge, il le pressera mème d'établir une servitude au-dessous de laquelle on ne peut rien concevoir; et, si les prètres élèvent la voix pour réclamer en faveur du droit paternel et de la liberté de conscience, il taxera de rébellion cette résistance à l'esclavage, et provoquera contre eux les violences du pouvoir qu'il domine, et qu'il pousse impérieusement à la tyrannie.

Il a dit aux évêques : Vous avez entendu de la bouche de Jésus-Christ cette parole: Allez et enseignez; et moi je vous dis: Vous n'enseignerez pas sans l'autorisation royale; vous n'aurez d'écoles qu'autant qu'il plaira au pouvoir civil, et, pour rendre plus efficace sa surveillance sur votre enseignement, il est enjoint aux supérieurs et direc-ple, il veut qu'on la répande jusque dans les der

teurs nommés par vous de ne commencer leurs fonctions qu'après avoir obtenu son agrément (2). Il a dit à Dieu : Ton sanctuaire est désert, tes autels sont abandonnés; les petits enfants demandent du pain, et il n'y a personne pour le leur rompre (3) leurs cris m'importunent; je te permets donc de te choisir vingt mille prètres parmi les Français mais pas un de plus, entends-le bien!

On sent qu'il n'est pas question de discuter des droits, lorsqu'ils sont tous si clairement violés, et avec tant d'audace. Mais, comme il fallait au moins un prétexte, quel qu'il fût, on a parlé des intérêts de l'université; et, pour venger le monopole, et propager le bienfait d'une éducation généralement accusée d'ètre antichrétienne, un évêque a frappé le sacerdoce dans sa racine. Et, si on lui demande raison, au nom de Jésus-Christ, de cet énorme attentat contre sa doctrine, ses lois, et, puisqu'il faut le dire, contre sa rédemption même, dont il ose ravir le fruit aux populations qui, dans leur délaissement, sollicitent des pasteurs avec d'instantes prières (4), que répond-il? « Je pense, avec un orateur << entendu avec faveur sur ce sujet, que les discus«sions catholiques et religieuses sont déplacées à «cette tribune. Le clergé ne doit être ni attaqué « avec amertume, ni défendu avec chaleur et en«thousiasme (3). » Il s'est mis, certes, fort à l'abri de ce dernier inconvénient.

Mais remarquons ici les inconséquences des partis, et combien, souvent, il y a loin de leurs principes à leurs œuvres. Le libéralisme proclame avec faste la liberté, il abonde en protestations de son amour pour elle; et, quand on attaque, dans un sens opposé au catholicisme, toutes les libertés religieuses ensemble, et jusqu'aux libertés naturelles de la famille, il applaudit et tressaille de joie.

A l'entendre, quoi de plus odieux que le monopole et le privilége? Il ne combat, si l'on veut l'en croire, que pour en affranchir le monde. A merveille mais s'agit-il du privilége de l'éducation, du monopole des doctrines et de tout ce qui forme

:

(1) Rapport au roi, par M. l'évêque de Beauvais.

(2) Ibid.

(3) Jerem., Thren, IV, 4.

Il affecte un grand zèle pour l'instruction du peu

nières classes de la société ; et, reprochant à l'Église d'étouffer les lumières, il l'accuse de tenir les hommes dans une ignorance profonde, afin de régner sur eux plus aisément, après les avoir abrutis. Si je comprends bien ces accusations, il faudrait que l'Église, pour répondre aux besoins du siècle. et aux désirs du libéralisme, s'occupât d'instruire la population ignorante: je ne saurais y trouver un autre sens. Qu'arrive-t-il néanmoins? On dit au clergé : Vous multipliez vos écoles au delà de << toute mesure; vingt-cinq mille enfants qui ne se destinent point à l'état ecclésiastique, y sont in«struits par vous, la plupart gratuitement. » Aussitôt le libéralisme, enflammé de colère, demande qu'on supprime au plus vite ces écoles illégales, et qu'on ne tolère que celles de l'université, qui n'ouvre ses portes qu'aux enfants des riches. Est-ce assez de passion et assez de misère ?

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Lorsque les ordonnances que nous venons d'examiner rapidement parurent, tous les catholiques se sentirent blessés dans leur foi, dans leur conscience, dans leur liberté; et l'opposition qu'elles éprouvèrent révéla aux ministres ce qu'ils ignoraient, la puissance de l'esprit religieux en France, puissance que l'on connaîtra bien mieux encore plus tard. Les évèques, donnant l'exemple qu'on attendait d'eux, se refusèrent à l'exécution de ces mesures tyranniques et antichrétiennes. Alors le ministère, pressé entre l'épiscopat et la révolution, négocia, usa de ruse il promit à l'une des violences, et à l'autre des ménagements, sans satisfaire personne. Un agent qu'il avait, dans son embarras, expédié en toute hâte à Rome, en rapporta une lettre mystérieuse dans laquelle, dit-on, le secrétaire d'État, de nulle autorité d'ailleurs dans l'Église, engageait les évêques à s'en rapporter à la piété du roi; comme si le roi était maître en cela de suivre les pieuses inspirations de son cœur, comme si sa piété personnelle changeait la nature des choses, et rendait moins désastreuses des dispositions où tout le monde voyait la violation des devoirs les plus sacrés, la ruine du

(4) Rapport au roi, par M. l'évêque de Beauvais,

(5) Discours de M. Feutrier dans la séance du 7 juillet. Messager des Chambres du 8 juillet 1828.

sanctuaire, et le commencement d'une vaste persécution. La révolution, irritée de cette intervention étrangère, éclata en murmures et en menaces; et le ministère, après s'ètre de son mieux excusé près d'elle, ne songea plus qu'à tirer parti ou plutôt à abuser de la lettre obtenue, pour opérer, au moins, une division parmi les évêques. Il y a toujours des hommes qui tremblent de résister, et à qui le devoir pèse. Leur peur attentive cherche de tous côtés et leur conscience saisit avidement un prétexte, quel qu'il soit, de se soulager de ce poids incommode. Sous ce point de vue, le ministère ne calculait pas tout à fait mal peut-être.

Au moment où nous écrivons ceci, on ne sait pas encore quel sera le résultat final de ses efforts. Si des exemples déplorables ont été donnés, d'autres, et plus nombreux, ont aussi consolé la foi. La faiblesse est de l'homme, et ne saurait étonner; mais la force, qui vient de Dieu seul, remplit l'âme d'une joie d'autant plus grande, qu'elle le montre comme présent dans son Église, pour l'assister selon ses promesses. Sous sa puissante main, qui ne serait en paix? Au reste, les choses ne peuvent demeurer au point où les ont amenées la haine révolutionnaire et la lâcheté de l'administration. Nous essaierons bientôt d'indiquer l'avenir qui se prépare; mais auparavant il est nécessaire de discuter certaines maximes par lesquelles le ministère a voulu justifier ses actes, et que le libéralisme a adoptées avec empressement.

CHAPITRE VII.

Maximes officielles établies à l'occasion des ordonnances Portalis et Feutrier.

Rien de plus important pour l'Église que de bien connaitre les doctrines des souverainetés temporelles avec lesquelles elle est en rapport; car ces doctrines, étant constamment la règle de l'administration, et formant l'esprit qui l'anime, donnent à l'ensemble de ses actes une tendance invariable, et déterminent la nature des relations qui subsistent entre la religion et l'État. Quand ces doctrines sont pures, il y a, entre l'un et l'autre, harmonie parfaite. Dans le cas contraire, une lutte s'établit, et cette lutte toujours plus vive ne peut finir que de deux manières, ou par le retour de la souveraineté aux vraies doctrines qui ne changent point, ou par une séparation ouverte et complète de l'État et de la religion. L'erreur des gouvernements est de s'imaginer que, par adresse et par violence, ils par

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viendront à forcer l'Église de se modifier sur leur système propre, et qu'ils atteindront ainsi, sans révolution ni secousse, le but qu'ils se proposent. Mais ils s'abusent étrangement en cela. L'Église, qui ne rompt jamais qu'à la dernière extrémité, et lorsqu'elle arrive aux limites, posées par Dieu même, de la condescendance permise, se prète d'abord à tout ce qui est absolument possible, use de ménagements, évite les chocs directs, élude les questions d'où naîtrait une guerre décisive et une scission déclarée, dissimule les torts que la passion aggraverait, si elle en exigeait la réparation; prolonge, attend, exhorte, imite enfin, dans sa conduite, celui qui est patient, parce qu'il est éternel. Ainsi vont les choses pendant quelque temps. Mais, comme rien ne s'arrête dans le monde, que tout y est progressif, il vient un moment où le pouvoir, d'usurpation en usurpation, exige ce que l'Église ne peut accorder. Il veut réaliser sa doctrine tout entière, et pour cela il est contraint d'attaquer, non plus seulement des droits partiels, mais l'existence même de l'Église. Alors, au lieu de la subjuguer, comme il l'espérait, il perd ce qu'il avait d'influence sur elle et par elle. Une fraction du clergé se livre ou se vend, et devient, sous les fers dont on la charge et l'opprobre qui s'attache à son apostasie, une église nationale, c'est-à-dire, une église nulle; tandis que la vraie Église, plus libre et dès-lors plus forte, rentre, par le schisme même, dans la pleine indépendance qui lui appartient. Elle ressaisit, d'une main ferme et sûre, les rènes de son empire immortel; et, du sein de la persécution soulevée contre elle, gouvernant avec plus d'autorité que jamais les intelligences, qui ne vivent que de la vérité dont ses enseignements sont la source, elle prépare au monde de nouveaux destins.

Nous avons précédemment essayé de faire voir qu'en même temps que le libéralisme tend, par ses erreurs, à détruire le christianisme et toute société spirituelle, les maximes du gouvernement, empruntées à la monarchie despotique de Louis XIV, constituent, dans leur application, un système d'envahissement progressif dont le dernier résultat serait l'asservissement total de l'Église, et par conséquent le schisme, car l'Église ne peut ni périr, ni subsister asservie. Et, comme on pourrait penser qu'en tirant, avec une rigueur logique, les conséquences des principes qui règlent l'action du pouvoir civil, nous avons été au delà de ses doctrines avouées et pratiques, nous voulons montrer ces mêmes conséquences reconnues nettement, et dogmatiquement exposées, par l'administration, sans qu'elle ait pu s'en défendre, lorsqu'elle a voulu justifier les ordonnances illégales et tyranniques

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du 21 avril et du 16 juin. Pour légitimer ses violences, il lui fallait nécessairement une théorie de l'oppression; et cette théorie fournit tout ensemble un sûr moyen d'apprécier ses actes, en révélant l'esprit qui les a dictés, et un grave sujet de méditation sur les nouvelles épreuves que le catholicisme doit subir dans un avenir prochain.

Et d'abord on avoue que l'Église, originairement séparée de l'État, sous les empereurs païens, jouissait alors d'une complète indépendance. «< Tant «que Constantin n'a pas posé la croix sur son «< diadème, l'Église eut une constitution indépen<< dante des lois politiques : cela devait être, elle « était en dehors de la société; elle se gouvernait « par ses pontifes, ces pontifes n'avaient de compte « à rendre à personne : » et pourquoi? << parce « qu'au lieu de protection, les rescrits les livraient « aux licteurs (1). »

Aujourd'hui qu'on les livre eux et leurs écoles aux gendarmes, aux recteurs d'académie, et aux procureurs du roi, on pourrait trouver peut-être assez de ressemblance entre leur position et celle où, selon le raisonneur officiel, ils n'avaient de compte à rendre à personne.

Mais nous lui demanderons comment l'Église, qui avait primitivement une constitution indépendante des lois politiques, a pu perdre cette constitution, et devenir ensuite dépendante des lois politiques. Cette constitution primordiale, de qui la tenait-elle, si ce n'est de son chef, de Jésus-Christ? Il faudra donc dire que les hommes ont le droit de renverser ce que Jésus-Christ a établi, et qu'en fondant une société immuable, éternelle, il l'a livrée au hasard des temps, aux caprices de César et de ses ministres? Si c'est là ce que vous soutenez, vous n'êtes pas catholique, vous n'êtes pas chrétien; si, effrayé de cette conséquence, vous reconnaissez que la constitution de l'Église est invariable, vous renversez la base de votre théorie, et vous vous condamnez vous-même sans retour.

continssent rien d'opposé aux lois divines et ecclésiastiques, sa règle première et inviolable: et voilà pourquoi le législateur a constamment pris soin, même en Orient, malgré le despotisme impérial, de mettre en harmonie les unes et les autres. Voilà ce qu'on voit, et rien de plus, dans les codes Théodosien et Justinien: et, quand les empereurs ont rompu cette harmonie nécessaire, l'Église, loin de reconnaître l'empire de leurs lois antichrétiennes, a maintenu contre elles inflexiblement la souveraine autorité de sa propre législation.

Enfin, selon la doctrine ministérielle, lorsque l'État est devenu chrétien, le christianisme a changé, par cela même, de nature; il a perdu le caractère d'immutabilité, sans lequel il est impossible de le concevoir comme divin; l'institution de Jésus-Christ, soumise aux caprices des princes, qui ne règnent que par Jésus-Christ, a dù prendre une nouvelle forme, et l'Église passer sous la dépendance du pouvoir politique et de ses lois. En effet, dit l'écri-, vain chargé d'exprimer les pensées et de défendre les actes de l'administration, « que les lois puissent « se mèler du régime extérieur de l'Église, et dans << tout ce qui se produit sous des formes terrestres, « c'est une maxime qu'on ne peut désavouer. » Nous verrons tout à l'heure ; écoutons ce qui suit : «Avant nos troubles politiques comme après, «les édits des rois ont réglé les vœux monastiques, « les établissements de mainmorte, les donations <«< ecclésiastiques, l'enseignement des écoles. La << souveraineté, dont on reconnaissait alors la puis«sance, ne la reconnaît-on plus aujourd'hui (5)? » En ce qui tient aux vœux monastiques, l'État en réglait les effets civils, et il avait ce droit. Les établissements de mainmorte, les donations ecclésiastiques, ressortissaient aussi, à plusieurs égards, de son autorité : nulle contestation sur ce point; et la souveraineté, dont on reconnaissait alors la puissance, on la reconnaît également aujourd'hui. Il est vrai que les magistrats, en cela comme en tout le reste, outre-passèrent souvent, et de beaucoup, les véritables droits de la souveraineté; et alors le clergé opposa constamment ses réclamations aux envahissements de la puissance civile, devenus intolérables surtout dans les derniers temps de l'ancienne monarchie. Quiconque ne sait pas cela devrait commencer, avant de parler de ces matières, par lire au moins l'histoire du dix-huitième siècle, toute remplie des luttes continuelles des évêques et des parlements.

« Dès que le prince, ajoutez-vous, est devenu «< chrétien, et qu'il y a eu communauté entre la «cité et le sanctuaire, les lois ont protégé le clergé; «mais, à son tour, le clergé a reconnu l'empire des «lois. Les codes Théodosien et Justinien le consta<< tent (2). » Lorsque la religion chrétienne, adoptée par le prince, est devenue le fondement de l'État, ou, pour parler votre langage, lorsqu'il y a eu communauté entre la cité et le sanctuaire, la force publique a sans doute protégé l'ordre spirituel, c'est-à-dire, protégé la société même. Alors, comme toujours, le clergé a reconnu l'empireseignement des écoles: avec la meilleure volonté des lois politiques et civiles, pourvu qu'elles ne du monde de complaire aux ministres, on est forcé

(1) Messager des Chambres du 2 juillet 1828.- (2) Ibid.

Quant aux édits des rois qui ont réglé l'en

(3) Messager des Chambres du 2 juillet 1828.

de leur dire que cette assertion a quelque chose de hasardé; et qu'avant d'affirmer si positivement, il est fâcheux qu'ils n'aient pas pris la peine d'ouvrir, je ne dirai pas les procès-verbaux des assemblées du clergé de France, mais les registres du conseil d'État. Ils y auraient lu, à la date du 23 janvier 1680, la déclaration suivante, qui ne prouve pas précisément ce que leur apologiste veut prouver : « Il est <manifeste qu'il n'appartient qu'à l'Église de pren«dre connaissance du fait des écoles. Cet usage at

toujours été suivi en France ;... aussi les juris« consultes disent que le soin des écoles est soumis aux ecclésiastiques. » Que M. Feutrier ait ignoré cela, on s'en étonne peu; il n'est, après tout, qu'évêque mais M. Portalis devait le savoir.

Ce que personne, jusqu'à présent, n'avait encore su, c'est la maxime, qu'on ne peut désavouer, que les lois peuvent se mêler du régime extérieur de l'Église, et dans tout ce qui se produit sous une forme terrestre. Je voudrais bien que l'on m'apprit ce qui, dans la religion, ne se produit pas nécessairement sous une forme terrestre. Connaît-on un moyen d'enseigner autrement qu'à l'aide de la parole, et la parole qu'est-ce autre chose qu'une forme terrestre de la pensée ? Les décisions dogmatiques des pontifes et des conciles, la hiérarchie, les sacrements, le culte tout entier, et, puisqu'on nous oblige de le dire, Dieu lui-même, invisible et présent sur l'autel où s'accomplit le sacrifice chrétien, ne se produit-il pas sous une forme terrestre? Et les lois, nous dit-on froidement, pourront se méler dans tout cela; le prince, parce qu'il a daigné participer à la rédemption du Christ, aura pouvoir sur sa doctrine, sur son Église, sur luimême, sur Dieu! Ce que l'on éprouve n'a d'autre expression que le silence.

Considérez cependant tout ce qu'embrassent les prétentions avouées du pouvoir civil: le régime extérieur de l'Église, c'est-à-dire, sa constitution, ses lois, sa discipline, son culte, les vœux monastiques, les ordres religieux, dont il jugera la doctrine et la morale (1); l'enseignement des écoles, l'enseignement mème de la religion, conçu sous sa notion exclusive et propre et cela toujours parce que la religion doit être nécessairement dépendante de l'État, dès que l'État veut bien reconnaitre une reli gion.

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« Qu'est-ce que la religion de l'État? C'est le ca<<tholicisme sans doute; mais ce sont aussi les règles qui, de temps immémorial, ont fait loi en France: « c'est la religion de Rome, on n'en peut disconve

(1) Une corporation n'est-elle en rapport qu'avec Dieu ? N'at-elle pas aussi des relations sociales? Et ces relations sociales, Etat n'a-t-il pas le droit d'y intervenir pour voir si l'association est légale, si ses doctrines sont en rapport avec les principes du

<<nir; mais avec les influences et les surveillances « que le pouvoir s'est toujours réservées : c'est la « religion de Louis XIV et de Bossuet.

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<«<Dira-t-on qu'il y a de la tyrannie, du sacrilége << dans ce système d'influences et de surveillances; « que l'État doit rester indifférent à l'exercice de la religion de l'État? On n'oserait. Reconnaître que l'État a droit de se choisir sa religion, et c'est le << reconnaître en effet, que de s'appuyer sur la dis« position politique qui déclare religion de l'État «tel culte, plutôt que tel autre ; n'est-ce pas accor «der à l'État le pouvoir d'arracher l'enseignement << de cette religion aux mains qui pourraient la dé<< naturer ou la corrompre? Le contraire serait un << véritable vasselage. L'État se mettant tout entier « dans l'Église, au lieu d'appeler l'Église à lui, per«<drait, par ce seul fait, sa constitution primitive, «et, de monarchique qu'il était, se transformerait «en théocratie (2). »

Nous ne connaissons point la religion de Louis XIV et de Bossuet; nous ne connaissons que la religion de Jésus-Christ,invariable par son essence, et qu'il n'appartient à nul homme, quelle que soit sa puissance et son génie, de changer ni de modifier. Cette religion est celle de Rome, on n'en peut disconvenir: donc, ou vous l'accepterez telle que Rome la professe et l'enseigne, ou ce ne sera plus la religion de Jésus-Christ. Si c'est là ce que vous appelez la religion de Louis XIV et de Bossuet, leurs noms sont au moins inutiles ici : celui de catholique, consacré par le langage de tous les temps et de toutes les nations, suffit ; et aucun autre ne peut lui ètre substitué, sans une impiété scandaleuse. Tout ce qui marque une difference, quelque chose de divers et de local, altère sa vraie notion. Qu'importe à la religion, qu'importe à l'Église ce qu'a fait ou pensé un despote du dix-septième siècle? Ces influences et ces surveillances, tous ces mots ambigus dans lesquels on s'enveloppe, que signifient-ils ? L'État, sous le rapport religieux, est ou supérieur à l'Église, ou indépendant de l'Église, ou soumis à l'Église." Dans le premier cas, il opprime et persécute; dans le second, il est étranger au christianisme et à ses lois; dans le troisième seul, il est catholique ; et il a le droit de choisir entre ces trois positions, comme chaque homme a le droit de choisir entre la foi et l'athéisme, entre l'ordre et le désordre, entre la vertu et le crime; et, comme le choix de l'homme ne lui crée aucun pouvoir sur l'objet de sa foi et la règle de ses actions, le choix de l'État ne lui crée aucun pouvoir sur la vérité, sur Dieu. Obéir libre

gouvernement, si elle ne blesse en rien la morale; si, par quelque côté que ce soit, elle est ou peut devenir un danger public? » Messager des Chambres du 21 juin 1828.

(2) Messager des Chambres du 5 juillet 1828.

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