Et des glaives croisés le fréquent cliquetis, Et dans la ville en feu la cloche monotone, Je vois là beaucoup d'hémistiches ronflans, d'expressions bruyantes et pompeuses, et « fort peu d'harmonie. Je ne sens point le «< mérite de cette consonnance meurtris et «< cris, qui dans le même vers me paraît un « défaut plutôt qu'une beauté. J'en dis autant « de timbre et d'argentin. Il me semble aussi « que ces tin tin sont une affectation puérile << pour peindre un objet aussi terrible, et « que tintant est là un terme faible et même << trivial. >> L'AUTEUR. Je vous sais mauvais gré de n'avoir point cité les vers où je dis du poëte: J'espère atteindre Pope au haut de la montagne; Là les vers sont plus purs et plus audacieux, Et, debout sur le globe, on les déclame aux dieux. Je vous demanderai maintenant si, quand il s'agit de peindre le bruit de la l'harguerre, monie musicale et l'harmonie poétique ne sont pas le résultat des sons bruyans et pompeux. Vous dites que vous voyez dans tout cela fort peu d'harmonie; qu'importe, pourvu que les autres puissent en entendre. Vous ne sentez point le mérite de cette consonnance, meurtris et cris dans le même vers; je ne vous citerai point ce vers de Térence : Todet me harum formarum... quotidianarum. où les arum expriment la tristesse. Je vous citerai toujours Boileau, dont vous n'approuverez probablement pas davantage ce vers fait à dessein: Lamentant tristement une chanson bachique. Quant au tin tin, je vous renvoie à la fin de mon poëme. Le Journal de Paris trouve comme vous cette affectation ridicule; mais il ne trouve pas comme vous à redire dans tous les vers qui précèdent : au reste, je conviendrai avec lui et avec vous que cette multiplicité de consonnances pareilles est un défaut dans mes deux vers, quand vous m'aurez prouvé que la multiplicité des consonnes pareilles n'est pas un défaut dans cent vers de Virgile et d'Homère. Boileau n'a pas oublié les rimes tines en parlant de cloches. Tinter est selon vous une expression triviale; si elle est triviale, je l'ai anoblie du droit dont Racine a anobli le mot de pavé: Baiser avec respect le pavé de tes temples. Je l'ai anoblie du droit dont Montaigne a dit que la peur nous donnait tantôt des ailes, et tantôt nous clouait les pieds. L'ENVOYÉ. « Je ne veux point aller avec vous au milieu <«< des tombeaux pour y entendre le squelette «< d'un riche précédemment rongé par l'or ་་ gueil, et actuellement par les vers, vous «demander une larme, et pour vous voir «< environné de ces cadavres hideux qui vous penser à eux; l'horreur de ce spectacle n'est adoucie par aucun vers har<< monieux et pittoresque. >> L'AUTEUR. Etes-vous donc bien persuadé qu'on vous en croira sur votre parole? Je demanderai à tout le monde s'il n'y a point d'harmonie dans ces vers: Où la lune, au travers des rougeâtres vitraux, Je demanderai s'il n'y a rien de pittoresque dans ces deux vers: Tant mon cœur oppressé souffre de voir souffrir Ces spectres affamés d'un peu de souvenir! Je demanderai s'il n'y a point de sentiment dans ces deux vers: Arrête, me dit-il, étranger magnanime; Un instant, s'il se peut, songe à moi par pitié; Tel est cependant le ton qui règne dans le morceau que vous renoncez à parcourir. Vous ne parlerez pas non plus de ma tirade sur les sépultures de campagne. AIR: Faut attendre avec palience. Plus peur des vivans que des morts. Ils disaient avec Boileau je crains peu 'les braves du Parnasse; mais Saint-Foix leur ferma la bouche plus d'une fois, car SaintFoix n'aimait pas les personnalités. DIALOGUE SUR LE TROISIÈME CHANT DE L'HARMONIE IMITATIVE. VOTRE L'ENVOYÉ. OTRE troisième chant est un badinage où je ne trouve ni sel ni enjouement. On a « vu quelquefois des bouffons pour amuser le peuple contrefaire les cris de divers ani «maux. >> L'AUTEUR. AIR: Chansons, chansons. Vous avez tant de sel attique, Mais franchement De mon ignorance j'enrage; Qu'est-ce que c'est qu'un badinage Sans enjoûment? |