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même le remarque pour la Russie. Ulphidas inventa l'alphabet gothique, Cyrille et Methodius l'alphabet slavon. «Ils traduisirent dans cette langue, dit Édouard Ryan, la Bible et quelques auteurs grecs et latins, dans le dessein de répandre la lumière chez ces peuples ignorans, d'adoucir leur cœur et de leur inspirer des sentimens d'humanité (1). » Partout où les missionnaires ont pénétré, et quels lieux ne furent pas témoins de leur zèle infatigable? l'abolition des coutumes barbares, la correction des vices, un progrès marqué vers un état plus heureux, une police plus régulière, des habitudes d'ordre et de vertu, ont été le fruit de leurs travaux.

Lisez attentivement l'histoire des nations païennes, vous reconnoîtrez que chez elles l'activité sociale n'avoit d'autre objet que la domination, la gloire, les richesses, les plaisirs. Sous le christianisme, toutes les pensées, tous les désirs, tous les efforts furent dirigés vers la perfection et le bonheur de l'homme. C'est l'esprit général des institutions et des mœurs que la religion chrétienne a formées. Chacun dut se regarder comme consacré plus ou moins au service des autres; et les ordres religieux, si ridiculement attaqués par une philosophie qui a ramené parmi nous les mœurs, les institutions, l'esprit de la société païenne, n'étoient, dans le dévouement qu'ils exigeoient de leurs membres, que le modèle de la vraie société, et

(1) Bienfaits de la Relig, chrét., tom. 1, p. 95. Ibid., p. 365.

un principe de perfection toujours agissant, par l'exemple continuel du renoncement volontaire aux plaisirs même légitimes, aux richesses (1), à la gloire et à la domination.

On n'admirera jamais assez le prodige de l'obéissance, et les miracles de la charité chez les chrétiens. Cette victoire remportée, sur l'orgueil et l'amour de soi est évidemment au-dessus de la nature; et ce n'est pas en lui-même que l'homme trouve la force d'accomplir ce sacrifice de toute la vie et de toutes les heures, sans dédommagement ici-bas. Celui qui est venu, non pour être servi, mais pour servir, a pu seul lui en inspirer la volonté et lui en donner le courage. Qu'on eût proposé aux femmes de la Grèce, ou aux matrones de Rome, de quitter leurs maisons, leurs familles, pour soigner sans relâche de pauvres malades, des esclaves infirmes, pour s'enfermer avec des pestiférés, qu'auroient-elles dit! C'est pourtant ce qui se voit tous les jours dans le christianisme. Il n'est pas jusqu'à Voltaire qui n'ait été frappé de cette merveille. «< Peut-être, dit-il, n'est-il rien de plus grand sur la terre que le sacrifice que fait un sexe délicat de la beauté et de la jeunesse, souvent de la haute naissance, pour soulager dans les hôpitaux ce ramas de toutes les misères humaines, dont la vue est si humiliante pour l'orgueil humain, et si révoltante pour

(1) L'individu étoit toujours pauvre, même dans les ordres riches, et c'est même à cause de cela que quelques ordres étoient devenus riches avec le temps.

notre délicatesse. Les peuples séparés de la communion romaine n'ont imité qu'imparfaitement une charité si généreuse (1). »

Les asiles ouverts à l'indigence, à la vieillesse, au malheur, au repentir, le soin des prisonniers, le ra, chat des captifs, et tant d'autres œuvres de miséricorde dont l'énumération seroit infinie, attestent encore la sainteté de la religion à qui on les doit (2).

Mais, en considérant d'une manière générale les effets du christianisme, on reconnoît premièrement qu'il a épuré et développé l'intelligence humaine, en dissipant les ténèbres de la superstition, en détruisant les erreurs aussi nombreuses que funestes de la philosophie, et en manifestant des vérités nouvelles. Depuis Jésus-Christ, Dieu et l'homme ont été mieux connus: or c'est là toute l'intelligence; comme leš rapports entre Dieu et l'homme, d'où dérivent les rapports des hommes entre eux, sont tout l'ordre. Les peuples chrétiens ne vantent-ils pas avec un juste motif leur supériorité intellectuelle sur les autres peuples? cette supériorité n'est-elle pas un fait constant? D'où vient-elle ? quelle en est la cause? Voyez en

(1) Essai sur l'histoire et sur les mœurs et l'esprit des nations, ch. CXVII, tom. III, p. 169. Ed. de 1756.

(2) L'esprit de charité est tellement propre au christianisme, que les païens en furent frappés dès l'origine; et c'est par ce caractère, que Mahomet, dans le septième siècle, désignoit encore les chrétiens. Il fait ainsi parler Dieu dans le Koran : « Nous avons mis dans » le cœur des disciples de Jésus la compassion et la miséricorde.»> The Koran translated, etc., by George Sate, ch. LVII, vol. II, p. 421.

Afrique, en Asie, les peuples qui ont cessé d'obéir à l'Évangile ; ils sont retombés dans la barbarie. Il y a donc dans le christianisme quelque chose qui élève et soutient la raison de l'homme à une hauteur qu'elle ne peut atteindre sans lui. Mais par cela même il est manifeste que le christianisme est divin car si l'homme pouvoit, je ne dis pas cultiver sa raison, l'exercer dans les limites qui lui ont été fixées, mais se donner un degré de raison supérieur à celui qu'il recut primitivement, et qu'il n'a point dépassé pendant quarante siècles'; quel que fût l'état des sciences, des lettres et des arts, il auroit le pouvoir de créer, de changer sa nature et les lois établies de Dieu.

Le christianisme, en second lieu, a perfectionné l'ordre social (1), et autant par ses dogmes que par ses préceptes. En révélant la vraie notion de la souveraineté, il a tout ensemble adouci le pouvoir et anobli l'obéissance. Le peuple autrefois étoit conti

(1) & Tout gouvernement étoit vicieux, avant que la suite des siè» cles, et en particulier le christianisme, eussent adouci et persée»tionné l'esprit humain. On ne peut lire sans frémir les cruautés » que les villes grecques exerçoient les unes à l'égard des autres » dans les guerres perpétuelles qu'elles avoient ensemble: l'esclavage » où celles qui étoient victorieuses réduisoient les citoyens de celles » qu'elles avoient prises de force; le ravage qu'elles faisoient dans » leurs campagnes, toutes voisines les unes des autres ; les cruautés » de leurs séditions intestines, les disputes perpétuelles et san» glantes pour ou contre un tyran passager, ou au sujet de l'oligar» chie, et même de la pure démocratie: tout ceci est un tableau » pour ceux qui ont ces histoires présentes à l'esprit... Aujourd'hui » nous avons des rois plus ou moins absolus, des républiques de toute » forme entend-on parler de rien de semblable ? » Terrasson; La philosophie applicable, etc., Ire part., ch. II, sect. I, p. 59.

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nuellement placé entre la révolte et l'oppression; la même doctrine qui l'a soumis, l'a protégé : elle a imposé un frein à l'inquiétude des sujets, et une règle aux volontés du prince. On a vu naître la liberté, et le trône s'affermir, parce que le règne de Dieu a succédé à la domination de l'homme.

Rousseau, Montesquieu, tous les écrivains qui traitent du droit public, ont remarqué ce grand changement.

<< Nos gouvernemens modernes doivent incontestablement au christianisme leur plus solide autorité, et leurs révolutions moins fréquentes; il les a rendus eux-mêmes moins sanguinaires : cela se prouve par le fait, en les comparant aux gouvernemens anciens (1). »

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« Nous devons au christianisme, et dans le gouvernement un certain droit politique, et dans la guerre un certain droit des gens, que la nature humaine ne sauroit assez reconnoître (2). »

Nous lui devons encore, de l'aveu universel, des moeurs plus pures et plus douces (3), et des vertus auxquelles l'antiquité n'offre rien à comparer. Qu'on se représente l'Évangile en action dans la société, tous ses divins préceptes regardés généralement comme la règle des devoirs, et sans cesse rappelés au

(1) Émile, liv. IV, tom. III, pag. 57, not.

(2) Esprit des Lois, liv. XXIV, chap. III.

(3) La religion... a donné plus de douceur aux mœurs chrétiennes. Rousseau, ubi suprà.

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