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païenne, à l'esprit d'incrédulité et à toutes les erreurs introduites par une philosophie qui avoit érigé en système l'impiété, le doute, et le vice même, et qu'à ce désordre de l'intelligence, à cette profonde corruption du cœur, on voit succéder tout-à-coup une foi docile et simple, les mœurs les plus sévères, les plus pures vertus, on conçoit clairement que cette étonnante régénération de la nature humaine, n'a pu être l'ouvrage de l'homme, puisque tous les efforts de sa raison dans les siècles les plus éclairés, toute sa science, toutes ses découvertes, ses arts, ses institutions, ses lois, n'avoient servi qu'à le plonger dans uné dépravation sans exemple. Il a fallu qu'il fut tout ensemble instruit et aidé surnaturellement, pour sortir de cet abîme de dissolution et de misère. Et afin qu'il ne pût en aucun sens s'attribuer son propre salut, Dieu voulut que les instrumens de sa miséricorde dénués de tout ce qui contribue au succès des desseins de l'homme, fussent évidemment par cela même les ministres d'une puissance au-dessus de la sienne. « II a choisi ce qui étoit insensé selon le monde, pour confondre les sages, et ce qui étoit foible selon le monde, pour confondre les forts; ce qui étoit bas et méprisable selon le monde, et ce qui n'étoit point, pour détruire ce qui étoit, afin que nulle chair ne se glorifie en sa présence (1).

(1) Videte enim vocationem vestram quia non multi sapientes secundum carnem, non multi potentes, non multi nobiles: sed quæ stulta sunt mundi elegit Deus, ut confundat sapientes; et infirma

24.

Nous n'insisterons pas davantage sur l'établissement de la religion chrétienne. L'histoire de ces premiers temps, c'est Rousseau qui le dit, est un prodige continuel. Or un prodige continuel est-il dans l'ordre des événemens naturels? un prodige continuel est-il autre chose qu'une manifestation continuelle du pouvoir divin? Donc le christianisme a été divinement établi; donc sa divinité est aussi certaine que son existence.

Il est encore impossible de ne le pas reconnoître à ses effets pour l'œuvre de Dieu. Voyez ce qu'étoit l'homme sous le paganisme, et ce qu'il est devenu. A l'orgueil, à la haine, au mépris de l'humanité, à la licence la plus monstrueuse, succédèrent l'humilité, la charité, le respect et l'amour pour l'homme; l'esprit de dévouement, les prodiges de la pénitence et de la chasteté. Le dernier des chrétiens, fidèle aux devoirs que sa religion lui impose rigoureusement, surpasse de beaucoup en perfection tous les personnages dont la Grèce et Rome ont vanté les vertus. Une insupportable vanité étoit presque toujours la moindre de leurs foiblesses. Ils vouloient être loués, admirés. Montrez-nous parmi ces sages un homme doux et humble de cœur. On sait quelle étoit la continence d'Aristide et de Caton. Aucun vice n'étonnoit dans la corruption générale. Est-il un Romain qui se fit le plus

mundi elegit Deus, ut confundat fortia ; et ignobilia mundi, et contemptibilia elegit Deus, et ea quæ non sunt, ut ea quæ sunt destrueret: ut non glorietur omnis caro in conspectu ejus Ep. I ad Corinth., I, 26-29.

léger scrupule d'assister aux spectacles du cirque ? Trajan fit paroître à la fois dix mille gladiateurs dans l'arène (1) où Titus condamna les prisonniers juifs à s'entr'égorger.

On peut voir dans Tertullien (2), dans saint Cyprien (3), dans Lactance (4), l'horreur que ces meurtres abominables inspiroient aux premiers chrétiens. Les femmes mêmes et jusqu'aux Vestales s'amusoient du crime et de la mort. Un solitaire (5) vint de l'Orient à Rome pour essayer d'abolir ces jeux, car c'est ainsi qu'on les nommoit. Le peuple furieux le massacra. Constantin les défendit en montant sur le trône (6), et ils cessèrent entièrement sous le règne de Justin (7).

Les lois de la religion devenant peu à peu les lois de l'État, les mœurs se purifièrent: on eut une plus

(1) Dion. Cass., lib. LXVI, cap. LXVIII.

(2) Tertull., de Spectaculis.

(3) S. Cypr., Epist. ad Donatum.

(4) Instit. Divin., lib. VI, cap. X.

(5) Il se nommoit Télémaque.

(6) Cod. Theodos., lib. XV. tit. XII, p. 395. Edit. Gothofredi. (7) Baron. Annal. tom. VIII, pag. 12.-Cassiodor., lib. X, cap. II. -L'Église, guidée par le même esprit, défendit les tournois sous différentes peines. Concil. Remens. ann. 1157, ap. Marten., t. VII, pag. 76. Paris., 1733. - Concil. Lateran. ann. 1177, Canon. 30, Gu. INewbrig. tom. I, p. 259. — Ducange Glossar., voc. Jousta, Tornamenta, Hastiludium. Voyez dans le même auteur, et dans Spelman et Lindenbrog, les efforts des princes chrétiens et de l'autorité ecclésiastique pour abolir le duel, voc. Duellum, Monomachia, Campio, Pugna. Vid. et. Saxo grammat., lib. X. Ericus Upsaliensis, lib. I. Resenii Jus antiquum Danicum, p. 642 et 643. Baron. Annal. tom. XI,' p. 113 seqq. Concil. Trident. Sect. XXV, cap. XIX.

haute idée de la sainteté du mariage; lav de l'enfant (1) et son innocence furent protégées (2); l'esclavage, adouci d'abord (3), disparut enfin tout-àfait (4); un nouveau, droit de la guerre s'établit ; les gouvernemens s'affermirent (5); les princes purent laisser vivre leurs frères (6): ils ne craignirent plus les révolutions si fréquentes chez les anciens.

(1) Tacite regardoit comme extraordinaire que les Germains ne fissent périr aucun de leurs enfans. De morib. german., cap. XIX. →Dans l'ouvrage d'Apulée, qui vivoit sous les Antonins, ún homme partant pour un voyage, ordonne froidement à sa femme de tuer l'enfant dont elle est enceinte, si c'est une fille. Metamorph., lib. X, p. 227. Il y a un trait à peu près semblable dans Térence : « Un homme, quoique pauvre, dit Posidippe, ne veut pas exposer » son fils; mais à peine le riche même voudra-t-il conserver sa » fille.» Gnomic. Poet.-Vid. et. Philo Jud., De legib. spécialib., p. 794: Paris., 1640; Bynkershok, De jure occidendi et exponendi libères ap. veter. Roman.; et Noodt, De partûs expositione et nece apud veteres.

(2) Cod. Theodos., lib. X, tit. XXVII, p. 188. Edit. Gothofredi. -Lindenbrog., Lex Wisigoth., lib. VI, tit. 3.

(3) Lactant. Divin. Instit., lib. V, cap. V.-Lindenbrog., Lex Wisigoth., lib. IV, tit. 5; et lib. VÍ, cap. XIV. — Ina, qui régnoit dans le septième siècle en Angleterre, affranchit un esclave que son maitre avoit forcé de travailler le dimanche. Wilkins. Leges AngloSaxonicæ, p. 14.

(4) Thomassin, Discipline, etc., t. II, p. 222, 223 et 833. Wilkins, loc. cit., p. 120.-Eadmer Novorum, etc., lib. III, p. 64. Stiernhook de Jure Suenonum, p. 226. Enfin, en 1167, le pape Alexandre III déclare au nom d'un concile, que tous les chrétiens dévoient être exempts de la servitude. Cette loi seule, dit Voltaire, doit rendre sa mémoire chère à tous les peuples. Essai sur l'hist. génér., etc, chap. LXX, tom. II, p. 188. Édit de

1756.

(5) Voyez à ce sujet des rapprochemens curieux dans Bozius, de Signis Ecclesiæ, tom. II, p. 368 et suiv.

(6) Il n'y a, dit Plutarque, qu'un seul exemple de meurtre domestique parmi les descendans d'Antigone, savoir, celui de Philippe, qui tua son propre fils. Mais presque toutes les autres familles pré

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Le christianisme fit deux choses, il commanda aux peuples d'obéir, et il réprima l'abus de la puissance (1). On n'entend point sans le bénir les paroles qu'il adressoit aux rois dans leur sacre: «< Prenez cette baguette comme l'emblème de votre pouvoir sacré, afin que vous puissiez fortifier le foible, soutenir celui qui chancelle, corriger le vicieux et diriger le bon dans la voie du salut. Prenez le sceptre comme la règle de l'équité divine, qui gouverne le bon et punit le méchant; qu'il vous apprenne à ai mer la justice et à détester l'iniquité (2). »

Nous avons essayé de peindre ailleurs (3) l'influence de la religion chrétienne sur les gouvernemens, les lois, les mœurs des nations. Tout le nord de l'Europe lui dut, avec la vraie civilisation, la connoissance des lettres. En prêchant l'Évangile, les missionnaires fondoient des écoles, ainsi que Gibbon lui

sentent de nombreux exemples de meurtres d'enfans, de mères ainsi que de femmes ; et quant aux meurtres de frères, ils étoient commis sans aucun scrupule: car c'étoit une maxime de gouvernement regardée comme aussi certaine que les premiers principes de géométrie, qu'un roi, pour sa propre sûreté, ne pouvoit se dispenser de tuer son frère. In Demetr. fin. vers.

(1) Edouard Ryan, ministre protestant de Donoghmore, en a rassemblé de nombreux exemples dans son ouvrage intitulé : Bienfaits de la Relig. chrét.,tom I, p. 262 et suiv. de la traduction française.

(2) Ducange, voc. Baculus regius. Les rois de Suède étoient obligés de jurer qu'ils aimeroient Dieu et l'Église; qu'ils ne feroient tort à aucun individu, ni dans sa personne, ni dans sa propriété ; qu'ils seroient fidèles à la vérité et à la justice; qu'ils réprimeroient le mensonge ainsi que l'iniquité, et qu'ils s'opposeroient à la violation des lois. Leoccenii Leges, tit. I, cap. IV.

(3) Chapitre XI.

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