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AU MÊME.

Exhortation au recueillement : réprimer l'activité naturelle, et la curiosité de l'esprit.

CE que je souhaite le plus pour vous, est le recueillement et la cessation un peu fréquente de tout ce qui dissipe. L'action de l'esprit, quand elle est continuelle et sans ordre absolu de Dieu, dessèche et épuise l'intérieur. Vous savez que Jésus-Christ écartoit ses disciples de la foule des peuples, et qu'il suspendoit les fonctions les plus pressées. Il laissoit même alors languir la multitude qui venoit de loin et qui attendoit son secours : quoiqu'il en eût pitié, il se déroboit à elle, et disoit à ses apôtres : Requiescite pusillum (a). Trouvez bon que je vous en dise autant de sa part. Il ne suffit pas d'agir et de donil faut recevoir, se nourrir, et se prêter en paix à toute l'impression divine. Vous êtes trop accoutumé à laisser votre esprit s'appliquer. Il vous reste même une habitude de curiosité insensible. C'est un approfondissement, un arrangement, une suite d'opérations, soit pour remonter aux principes, soit pour tirer les conséquences.

ner,

J'aimerois mieux vous voir amuser à quelque bagatelle qui occuperoit superficiellement l'imagina

(a) Marc. vi. 31.

tion et les sens, et qui laisseroit votre fond vide pour y entretenir une secrète présence de Dieu. Un simple amusement ne tient point de place dans le fond; mais le travail sérieux, quoiqu'il paroisse plus solide, est plus vain et plus dangereux quand il revient trop souvent, parce qu'il nourrit la sagesse humaine, dissipe le fond, et accoutume une ame à ne pouvoir être en paix. Il lui faut toujours des ébranlemens et de l'occupation par rapport à ellemême. Les esprits appliqués auroient autant de peine à se passer d'application, que les gens inappliqués auroient de peine à mener une vie appliquée.

Faites donc jeûner votre esprit avide; faites-le taire; ramenez-le au repos. Requiescite pusillum. Les affaires n'en iront que mieux; vous y prendrez moins de peine, et Dieu y travaillera davantage. Si vous voulez toujours tout faire, vous ne lui laisserez la liberté de rien faire à sa mode. O qu'il est dangereux d'être un ardélion de la vie intérieure! Au nom de Dieu, vacate, et videte quoniam ego sum Deus : c'est là le vrai sabbat du Seigneur. Cette (u) cessation de l'ame est un grand sacrifice.

(a) Ps. XLV. II.

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Sur une opinion attribuée à Bossuet touchant la grâce efficace, et sur la générosité apparente de l'archevêque de Paris envers Fénelon.

(Fin de 1699 ou commencement de 1700.)

Il y a dans les imprimés que les Jansénistes répandent, beaucoup d'endroits importans à faire remarquer. Je suppose qu'il y a à Paris des gens zélés et instruits qui les lisent et qui les examinent de près. Il me seroit facile de les envoyer tous; mais il est aussi facile de les avoir à Paris par d'autres voies que par la mienne; et je crois qu'il vaut mieux que je ne me mêle de rien. Mais il est capital qu'on lise avec grande attention tous ces écrits. En voici un exemple. Il y a dans la grande Histoire de auxiliis (2) un titre en ces termes : Laudatur Melden

(1) Ce fragment ne porte aucune date; mais il est de l'époque que nous lui assignons; car il y est parlé de Télémaque comme d'un ouvrage récent, et d'une prochaine assemblée du clergé, qui ne peut être que celle de 1700.

(2) Fénelon parle ici de l'ouvrage intitulé: Historia Congregationum de auxiliis divinæ gratiæ, auctore Augustino Leblanc Lovanii, 1700: in-fol. Le P. Serry, Dominicain, véritable auteur de cet ouvrage, y soutient, sur les matières de la grâce, bien des opinions qui ont été fort du goût des novateurs. Le passage cité par Fénelon se trouve dans le livre 111, chap. XLVI, pag. 576. Nous n'avons pas besoin de remarquer que l'archevêque de Cambrai se contente ici de rapporter l'imputation calomnieuse du P. Serry contre Bossuet, sans y souscrire en aucune

manière.

sis, etc. (3). Il loue M. de Meaux d'avoir dit que la grâce, par sa nature, porte nécessairement son effet; que c'est celle des Protestans, et qu'ils n'ont eu de tort qu'en soutenant qu'elle ôtoit la liberté. On trouvera sans cesse, dans ces écrits, des choses qui marquent une cabale qui conspire à établir la même doctrine. On peut encore voir que le défenseur des Bénédictins, qui parle au nom de l'ordre (4) , suppose qu'un homme de sa congrégation a fait l'Apologie des Provinciales, et a foudroyé les Jésuites, sans qu'ils puissent s'en relever.

Cependant on sait que les premières Lettres Provinciales soutiennent le jansénisme le plus dangereux. Ces bons pères, qui se déclarent défenseurs d'un livre si mauvais, et si rigoureusement condamné à Rome, sont les bons amis de M. de Meaux. On peut voir, par les triomphes de ces écrivains, qu'ils profitent du silence qu'on impose à leurs parties, pour se vanter qu'ils les écrasent, et que les autres n'osent leur répondre.

On doit aussi remarquer dans un ouvrage en deux volumes in-12, sous le titre de Recueil, etc., que les cardinaux Casanata, d'Aguirre, Noris, etc., n'ont guère pris sérieusement une censure du saint Siège, puisqu'ils ont loué hautement la doctrine des livres

(3) Voyez la table de l'ouvrage cité, pag. 501.

(4) Fénelon fait sans doute ici allusion à quelqu'un des nombreux factums qui parurent à cette époque sur l'édition de saint Augustin donnée par les Bénédictins. Nous avons donné quelques détails sur cette affaire dans l'avertissement du tome x, 2e partie, n. 16, pag. lxxxiij. L'Apologie des Provinciales est de Matthieu Petitdidier, Bénédictin de Saint-Vannes, abbé de Senon, et ensuite évêque in partibus, mort en 1728. Il désavoua cet ouvrage.

du

du père Alexandre, depuis leur condamnation à Rome.

Je sais que M. de Paris (5) a dit au curé de Versailles (6), qu'il faisoit ses efforts pour me faire rappeler à la cour, et qu'il y auroit réussi sans Télémaque qui a irrité madame de M. (Maintenon), et qui l'a obligée à rendre le Roi ferme pour la négative. Vous voyez que ce discours, qui vient de vanterie sur sa générosité pour moi, n'a aucun rapport avec les interrogations qu'il fait faire à M. Quinot sur le jansénisme. Il ne peut que me craindre, et vouloir me tenir éloigné, pendant qu'il croit que je vous anime contre M. Boileau. Mais il voudroit rassembler les deux avantages: l'un, de faire l'homme généreux pour se justifier vers le public sur mon affaire, et me rendre odieux en se justifiant; l'autre, d'être généreux à bon marché, et de ne rien oublier pour me tenir en disgrâce.

Pour toutes les choses contenues dans cette grande lettre, vous n'avez point, mon bon duc, d'autre usage à en faire que de la montrer à M. Tronson, et au P. de Valois, afin qu'ils en puissent dire à M. de Chartres ce qu'ils croient utile. Ce qui est certain, c'est que M. de Chartres est un vrai homme à se laisser amuser par le parti, jusqu'à ce qu'ils l'auront mis hors de portée de leur résister. Ils le tiennent par madame de M. qui ne veut pas, pour son honneur, que le triumvirat (7) qu'elle a protégé

(5) Le cardinal de Noailles, archevêque de cette ville.

(6) M. Hébert, qui devint en 1703 évêque d'Agen.

(7) C'est-à-dire le cardinal de Noailles, et les évêques de Meaux et CORRESP. I.

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