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199* A.

A LA MÊME.

Sur le même sujet.

A Cambrai, 28 décembre 1714.

JE vous supplie de me donner de vos nouvelles, madame, par N... que j'envoie chercher. Je suis en peine de votre santé : elle a été mise à de longues et rudes épreuves. D'ailleurs, quand le cœur est malade, tout le corps en souffre. Je crains pour vous les discussions d'affaires, et tous les objets qui réveillent votre douleur. Il faut entrer dans les desseins de Dieu, et s'aider soi-même pour se donner du soulagement. Nous retrouverons bientôt ce que nous n'avons point perdu. Nous nous en approchons tous les jours à grands pas. Encore un peu, et il n'y aura plus de quoi pleurer. C'est nous qui mourons : ce que nous aimons vit, et ne mourra plus. Voilà ce que nous croyons; mais nous le croyons mal. Si nous le croyions bien, nous serions pour les personnes les plus chères, comme Jésus-Christ vouloit que ses disciples fussent pour lui quand il montoit au ciel : Si vous m'aimiez, disoit-il (a), vous vous réjouiriez de ma gloire. Mais on se pleure en pleurant les personnes qu'on regrette. On peut être en peine pour les personnes qui ont mené une vie mondaine; mais pour

(1) Il semble que Fénelon, en écrivant ces paroles, ait été inspiré par un pressentiment surnaturel. Trois jours après la date de cette lettre, il fut attaqué de la maladie dont il mourut le 7 janvier 1715.

(a) Joan, xiv. 28.

un véritable ami de Dieu, qui a été fidèle et petit, on ne peut voir que son bonheur, et les grâces qu'il attire sur ce qui lui reste de cher ici-bas. Laissez donc apaiser votre douleur par la main de Dieu même qui vous a frappée. Je suis sûr que notre cher N... veut votre soulagement, qu'il le demande à Dieu, et que vous entrerez dans son esprit en modérant votre tristesse.

** 200 R.

AU DUC DE CHAULNES.

Il l'exhorte à être ferme dans ses résolutions.

A Cambrai, 28 décembre 1714.

Voici, mon bon duc, une occasion de vous donner de mes nouvelles et de vous demander des vôtres. On m'avoit alarmé sur le mal de madame la duchesse de Chevreuse; mais on m'a bien soulagé le cœur en m'assurant dans la suite que ce n'est rien. Et madame la duchesse de Chaulnes, comment se portet-elle? j'en suis en peine. Je ne le suis pas moins de vous. Ne vous fatiguez-vous plus sur vos paperasses? Faites-vous, pour l'emploi de votre temps, ce que vous savez bien que Dieu demande de vous, et que vous lui avez promis tant de fois? Ne seriezvous pas honteux, si vous aviez manqué aussi souvent de parole au dernier de tous les hommes, que vous en avez manqué à Dieu? Vous dites que vous l'aimez; est-ce ainsi qu'on aime ses amis, qui ne sont que de viles créatures? Voudriez-vous les jouer sans cesse

par des promesses sans aucun effet? Dieu demandet-il trop en demandant la bonne foi et l'exactitude à tenir parole, qu'un valet de charrue auroit raison de demander? Que ne préfère-t-on pas à Dieu! Un détail ennuyeux et plein d'épines, une occupation qui use à pure perte la santé, un emploi du temps dont on n'oseroit rendre compte, un je ne sais quoi qui rend la vie obscure et qui dégrade dans le monde, c'est ce qu'on préfère à Dieu. Quel affreux ensorcellement! Priez, humiliez-vous pour rompre le charme; demandez à Dieu qu'il vous dégage de vos liens de goût et d'habitude. Tournez-vous contre vous-même; faites des efforts constans et soutenus; défiez-vous de la trahison de votre naturel, de la tyrannie de la coutume, et des beaux prétextes par lesquels on est ingénieux à se tromper. N'écoutez rien; commencez une nouvelle vie : elle vous sera d'abord dure, mais Dieu vous y soutiendra, et vous en goûterez les fruits. Heureux l'homme qui se fie à Dieu, et non à soi! Que ne donnerois-je point pour vous voir un nouvel homme! Je le demande à Dieu en ce saint temps où il faut renaître avec Jésus-Christ. Vous le pouvez, vous le devez; vous en répondrez au maître. Accoutumez-vous, par le recueillement, à dépendre de son esprit. Avec quel zèle vous suis-je dévoué!

FIN DU TOME PREMIER.

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AVEC LE DUC DE BOURGOGNE, LES DUCS DE BEAUVILLIERS
ET DE CHEVREUSE, ET LEURS FAMILLES.

8. Au même. Il compatit à ses douleurs, et les lui fait regarder comme
un effet de la miséricorde de Dieu.

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