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courtes, simples et fréquentes élévations de cœur à Dieu sur quelque passage touchant, vous feront plus de bien que les applications suivies à un sujet particulier. Vous pouvez laisser parler votre famille et vos amis, et vous contenter d'écouter. Pendant qu'on écoute la conversation, le cœur ne laisse pas de se recueillir souvent sur les choses intérieures, et il se nourrit de Dieu en secret. Le silence est très-nécessaire et à votre corps et à votre ame. C'est dans le silence et dans l'espérance, comme dit l'Écriture «, que sera votre force.

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L'HISTOIRE de Charlemagne a ses beautés et ses défauts. Ses beautés, comme vous savez, monsieur, consistent dans la grandeur des évènemens, et dans le merveilleux caractère du prince. On n'en sauroit trouver un, ni plus aimable, ni plus propre à servir de modèle dans tous les siècles. On prend même plaisir à voir quelques imperfections mêlées parmi tant de vertus et de talens. On connoit bien par là,

(a) Isai. xxx. 15.

(1) Nous ignorons la date de cette lettre: mais la signature montre qu'elle est antérieure à l'épiscopat de Fénelon, c'est-à-dire, au mois de février 1695.

(2) Cette Histoire, que Fénelon avoit composée, ne s'est pas trouvée daus ses manuscrits ; et ce qu'il en dit ici la fait regretter. Voyez l'Histoire de Fenelon, liv. 1, n. 40, vers la fin.

que ce n'est point un héros peint à plaisir, comme les héros de roman, qui, à force d'être parfaits, deviennent chimériques. Peut-être trouvera-t-on dans Charlemagne plusieurs choses qui ne plairont pas : mais peut-être que ce ne sera pas sa faute, et que ce dégoût viendra de l'extrême différence des mœurs de son temps et du nôtre. L'avantage qu'il a eu d'être chrétien le met au-dessus de tous les héros du paganisme, et celui d'avoir toujours été heureux dans ses entreprises le rend un modèle bien plus agréable que saint Louis. Je ne crois pas même qu'on puisse trouver un roi plus digne d'être étudié en tout, ni d'une autorité plus grande pour donner des leçons à ceux qui doivent régner. Aussi suis-je trèspersuadé que sa vie pourra beaucoup nous servir pour donner à Mer le Duc de Bourgogne les sentimens et les maximes qu'il doit avoir. Vous savez, monsieur, que je ne songeois pas néanmoins à me mêler de son instruction quand je fis cet abrégé de la vie de Charlemagne, et personne ne peut mieux dire que vous comment j'ai été engagé à l'écrire. Mes vues ont été simples et droites. On ne sauroit me lire sans voir que je vais droit, et peut-être trop.

Pour les défauts de cette histoire, ils sont grands, sans parler de ceux que j'y ai mis. Les historiens originaux de cette vie ne savent ni raconter, ni choisir les faits, ni les lier ensemble, ni montrer l'enchaînement des affaires; de façon qu'ils ne nous ont laissé que des faits vagues, dépouillés de toutes les circonstances qui peuvent frapper et intéresser le lecteur, enfin entrecoupés, et pleins d'une ennuyeuse uniformité. C'est toujours la même chose, toujours

une campagne contre les Saxons, qui sont vaincus comme ils l'avoient été les autres années; puis des fêtes solennisées, avec un parlement tenu. Ce qu'on seroit le plus curieux de savoir, est ce que les historiens ne manquent jamais de taire. Point de fil d'histoire; presque jamais d'affaires qui s'engagent les unes dans les autres, et qui se fassent lire par l'envie de voir le dénouement. A cela quel remède? On ne peut point suppléer ce qui manque, et il vaut mieux laisser une histoire dans toute sa sécheresse, que l'égayer aux dépens de la vérité. Mais voilà une lettre qui ressemble à une préface, et j'aperçois que je prends le vrai ton d'auteur. Je suis toujours, monsieur, avec un respect sincère, votre, etc.

l'abbé DE FÉNELON.

13.

DU DUC DE BOURGOGNE A FÉNELON.

Il lui donne des nouvelles de sa santé et de ses études (1).

(Fontainebleau ) 23 octobre 1696.

MON rhume va beaucoup mieux, ou plutôt est fini. J'ai commencé à sortir depuis deux jours. Nous avons eu jusque-là vilain temps, avec une pluie presque continuelle. Nous retournerons à Versailles après demain, où je reprendrai mon train ordinaire,

(1) On trouvera, parmi les Lettres diverses, le plan des études du Duc de Bourgogne, tracé par Fénelon pour les années 1695 et 1696.

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car cette maladie m'avoit un peu dérangé. Quand je suis parti de Versailles, le serin sortoit de mue et recommençoit à chanter. J'ai achevé l'histoire de François Ier, et je suis au milieu du quatrième livre de Tacite. J'espère qu'il sera achevé dans trois semaines. Je souhaite de vous revoir bientôt en bonne santé. En attendant, soyez bien persuadé, je vous prie, de l'amitié que j'ai pour vous. N'oubliez pas de temps en temps de m'écrire vos lettres me font toujours plaisir.

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14.

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AU DUC DE BEAUVILLIERS.

Il lui rend compte des vœux qu'il a formés pour le Roi le jour de saint Louis, et lui expose ses sentimens relativement aux éclats occasionnés par le livre des Maximes des Saints.

A Cambrai, 26 août (1697.)

Je ne puis m'empêcher de vous dire, mon bon duc, ce que j'ai sur le cœur. Je fus hier, fête de saint Louis, en dévotion de prier pour le Roi. Si mes prières étoient bonnes, il le ressentiroit; car je priai de bon cœur. Je ne demandai point pour lui des prospérités temporelles; car il en a assez. Je demandai seulement qu'il en fit un bon usage, et qu'il fût, parmi tant de succès, aussi humble que s'il avoit été profondément humilié. Je lui souhaitai d'être non-seulement le père de ses peuples, mais encore l'arbitre de ses voisins, le modérateur de l'Eu

rope entière, pour en assurer le repos, enfin le protecteur de l'Église. J'ai demandé non-seulement qu'il continuât à craindre Dieu, et à respecter la religion, mais encore qu'il aimât Dieu, et qu'il sentit combien son joug est doux et léger à ceux qui le portent moins par crainte que par amour. Jamais je ne me suis senti plus de zèle, ni, si je l'ose dire, de tendresse pour sa personne. Quoique je sois plein de reconnoissance, ce n'étoit pas le bien qu'il m'a fait dont j'étois alors touché. Loin de ressentir quelque peine de ma situation présente, je me serois offert avec joie à Dieu pour mériter la sanctification du Roi. Je regardois même son zèle contre mon livre comme un effet louable de sa religion, et de sa juste horreur pour tout ce qui lui paroît nouveauté. Je le regardois comme un objet digne des grâces de Dieu. Je me rappelois son éducation sans instruction solide, les flatteries qui l'ont obsédé, les pièges qu'on lui a tendus pour exciter dans sa jeunesse toutes ses passions, les conseils profanes qu'on lui a donnés, la défiance qu'on lui a inspirée contre les excès de certains dévots, et contre l'artifice des autres, enfin les périls de la grandeur, et de tant d'affaires délicates. J'avoue qu'à la vue de toutes ces choses, nonobstant le grand respect qui lui est dû, j'avois une forte compassion pour une ame si exposée. Je le trouvois à plaindre, et je lui souhaitois une plus abondante miséricorde pour le soutenir dans une si redoutable prospérité. Je priois de bon coeur saint Louis, afin qu'il obtînt pour son petit-fils la grâce d'imiter ses vertus. Je me représentois avec joie le Roi humble, recueilli, détaché de toutes choses, pénétré de l'a

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