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parmi vous, que des réflexions sur l'abus des prétentions et des espérances ? Vous—même, qui m'écoutez, quelle est là-dessus votre situation? Et cependant on sacrifie l'éternité à des chimères; on se flatte toujours qu'on sera du nombre des heureux; et on ne s'aperçoit pas que la providence ne semble laisser au hasard et au caprice des hommes le partage des postes et des emplois que pour nous faire regarder avec des yeux chrétiens les titres et les honneurs, et nous faire rapporter au roi du ciel, aux yeux de qui rien n'échappe et qui nous tiendra compte de nos plus petits soins, des services que nous rendons aux rois de la terre, qui souvent ou ne peuvent les voir ou ne sauroient les récompenser.

Mais quand même votre bonheur répondroit à vos espérances; quand même les douces erreurs et les songes sur lesquels votre esprit s'endort deviendroient un jour des réalités ; quand même, par un de ces coups du hasard qui entre toujours pour beaucoup dans la fortune des armes, vous vous verriez élevé à des postes auxquels vous n'oseriez même aspirer, et que vous n'auriez plus rien à souhaiter du côté des prétentions humaines : que sont les félicités d'ici-bas, et quelle est leur fragilité et leur rapide durée? Que nous reste-t-il de ces grands noms qui ont autrefois joué un rôle si brillant dans l'univers? ils ont paru un seul instant, et disparu pour toujours aux yeux des hommes. On sait ce qu'ils ont été pendant ce petit intervalle qu'a duré leur éclat; mais qui

sait ce qu'ils sont dans la région éternelle des morts? les chimères de la gloire et de l'immortalité ne sont là d'aucun secours : le Dieu vengeur, qui, du haut de son tribunal pèse leurs actions et discerne leur mérite, n'en juge pas sur ce que nous disons et sur ce que nous pensons d'eux ici-bas; et tous ces grands traits, qui font tant d'honneur à leur mémoire, et qui enrichissent nos annales, sont peut-être les principaux chefs de leur condamnation, et les traits les plus honteux de leur ame aux yeux de Dieu.

BÉNÉD. DES DRAP. DU RÉG. DE CATINAT.

LES

GOUT POUR LA GUERRE.

Es grands talens qui distinguent les hommes dans leur état se manifestent d'abord par le goût qui les y porte. David encore enfant cherchcit parmi les lions et les ours une matière à sa valeur, et se déroboit volontiers au repos de la vie champêtre, pour aller s'instruire auprès de ses frères, au milieu des armées d'Israël.

Le goût du prince de Conti pour la guerre fut le premier penchant que la nature montra en lui; et ce n'étoit pas ce goût qui, dans les autres est d'ordinaire une ardeur de l'âge, plus qu'une preuve du talent.

Guidé par la force de son génie, il se fit d'abord de l'art militaire une étude, et non pas un amusement: il comprit tout ce qu'il falloit d'é

tendue, d'élévation, de sang-froid, de vivacité, de profondeur, de ressources, de connoissances. pour y exceller; et crut qu'un prince ne devoit compter pour rien de combattre, s'il ne se rendoit digne de commander.

A la lecture des anciens, et surtout des Commentaires de César, dont il traduisit les plus beaux endroits, il ajouta la recherche et la conversation des hommes les plus consommés dans la science de la guerre. Il les écoute, il les étudie; il en fait ses amis, pour être plus à portée d'en faire ses maîtres il se rend propres les talens différens qui les distinguent entre eux; persuadé que si la naissance peut donner les grandes dispositions, c'est l'application toute seule qui fait les grands hommes.

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ORAISON FUN. DU PRINCE DE CONTI.

EXPLOITS MILITAIRES.

La même grandeur d'ame l'accompagnoit dans les périls. Et ici, Messieurs, que pourrois-je dire, qui ne soit au-dessous de ce que vous avez vu la plupart? S'est-il trouvé dans une seule action où il ne se soit attiré les yeux de toute l'armée; et où, sans avoir eu l'honneur du commandement, il n'ait eu presque lui seul l'honneur de la vic

toire ?

Rappelez ses premières campagnes: on croyoit revoir le grand Condé dans sa vive et vaillante jeunesse.

A Courtray, où, pour la première fois, il montra un nouveau héros aux ennnemis et à nos troupes.

A Luxembourg, où, à la tête des grenadiers, il monte à l'assaut d'un bastion, l'épée à la main et où blessé d'un éclat de grenade, et échappé à mille autres coups, il fait craindre que la victoire ne nous coûte une vie si chère.

A Novigrade, où une escarmouche engagée trop témérairement avec les Turcs, change de face à l'arrivée du prince qui y vole; et plusieurs officiers d'un grand nom doivent à sa valeur et aux périls qu'il court en cette occasion, la vie et la liberté, qu'une audace indiscrète leur avoit fait mériter de perdre.

eux,

A Neuhausel, où, après avoir repoussé les infidèles jusque sur le bord du fossé, revenu tout couvert de poussière et de gloire, il court encore avec l'électeur de Bavière, rétablir un ouvrage où les assiégés avoient mis le feu; et par l'amitié que l'âge et les grandes qualités forment entre il fait naître dès-lors dans le cœur de ce prince ces premières dispositions d'attachement pour la France, qui ont depuis paru; et où, si cet allié généreux et fidèle n'a pas eu pour lui les succès, il a eu du moins l'honneur de la constance, de la bonne foi, l'estime de la nation l'amour des troupes, et l'affection du roi, qui toute seule vaut des succès, ou qui rassure du moins contre les pertes.

Enfin à Gran, où, à la tête du premier régi

Tome XII. MORCEAUX CHOISIS.

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ment de l'empire, il arrête la première fureur du Turc, le pousse, le renverse, lui arrache la victoire, qu'il croyoit déjà tenir; affronte mille fois la mort qui paroît le respecter plus qu'il ne paroît la craindre; porte partout la terreur du sang de France toujours fatal aux infidèles; fait déjà redouter aux Allemands, dans le bras qui les défend, celui qui va bientôt les vaincre; et montre de loin aux voeux des Polonois, témoins et admirateurs de ses actions, le héros digne d'être un jour placé sur leur trône.

A ces traits, le reconnoissez-vous, Messieurs? ce ne sont pourtant encore que les premiers essais de son courage. Ce nouveau David croissant; va paroître de jour en jour au-dessus de sa valeur même.

Vous ne l'avez pas oublié, Messieurs, et le souvenir de ces deux mémorables journées où le prince de Conti parut si grand, est encore trop récent, et trop glorieux à la France, à la mémoire du maréchal de Luxembourg, à l'histoire de ce règue; trop honorable surtout au vaillant prince qui nous honore ici de sa présence, et qui en a partagé avec tant de distinction la gloire et les dangers; trop rapproché même tous les jours, par la différence des événemens, pour être effacé de votre esprit, puisqu'il ne le sera jamais de nos annales.

Que n'ai-je plus d'usage dans l'art de décrire des victoires et des batailles! ou plutôt, pourquoi ce temple et ces autels m'avertissent-ils que mon

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