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confiance, ainsi que l'a fort bien montré M. A. Gazier dans la Revue politique et littéraire du 31 octobre 1874, et l'on ne peut s'en servir avec sécurité qu'après avoir corrigé son exemplaire sur le manuscrit original.

Enfin, la pièce qui est peut-être la plus importante de tout le manuscrit, a échappé à M. l'abbé Verlaque, ou ne lui a pas paru de nature à pouvoir être publiée. Il s'agit du mémoire, demandé par Seignelay le 15 juillet 1687, et rédigé peu après par Fénelon, sur les moyens propres à « maintenir les esprits des nouveaux convertis dans de bonnes dispositions à l'égard de la religion.» Heureusement, cette lacune a été signalée et comblée par M. Gazier; le numéro du 31 octobre 1874 de la Revue politique et littéraire est donc le complément indispensable des Lettres inédites. M. l'abbé Verlaque ayant imprimé la lettre qui précède ce mémoire et celle qui le suit, il est fort difficile d'admettre qu'il n'ait point vu, dans un recueil de 51 folios, une pièce qui va du folio 45 au folio 51; il ne peut se rabattre sur la question d'authenticité, puisque le mémoire, non signé, il est vrai, est tout entier de la main de Fénelon, et que son contenu est en parfait accord avec celui des lettres de la même date.

Notre première pensée, dès que nous eûmes connaissance des Lettres inédites, fut de les mettre aussitôt en œuvre dans une seconde édition, refondue et complétée, de L'Intolérance de Fénelon. I fallut y renoncer, au moins pour le présent; un obstacle matériel s'y opposait la première édition, pourquoi ne le dirionsnous pas? n'est point épuisée. Un obstacle d'un autre

ordre s'y opposait également: le respect que nous portons à la critique.

Si le fond du livre a été déclaré inattaquable par la presse libérale, il n'en est pas absolument de même de la forme. On a fait sur ce point des réserves; plu sieurs de nos amis (nous les en remercions sincèrement) ont mêlé quelques reproches à l'éloge. Ils nous accusent d'avoir été trop vif, même acerbe, d'avoir eu la main trop lourde (1), d'avoir écrit un plaidoyer, un réquisitoire (2), plutôt qu'une étude calme et philosophique, de nous être vengé sur Fénelon de la fausseté de la réputation qu'on lui a faite (3), de ne pas lui avoir accordé le bénéfice des circonstances atténuantes, d'a

(1) « On serait tenté de dire à l'auteur du Télémaque :

(2)

Je vous plains de tomber dans ces mains redoutables,

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(A. Coquerel fils, Renaissance du 9 novembre 1872.)

Elle est finie la légende de Fénelon! Le réquisitoire si vigoureux et si probant de M. Douen a désormais fait justice de la réputation de tolérance universelle, de mansuétude exquise, si gratuitement attribuée au persécuteur des jeunes protestantes, à l'évêque qui, sur le bord de la tombe avait osé conseiller de traiter les hérétiques comme « des loups. » Essayer de le justifier ou d'atténuer l'odieux de sa conduite, en alléguant qu'il a écrit des pages charmantes, pleines d'urbanité et de grâce, serait agir exactement comme celui qui prétendait que Néron n'était pas cruel, car il avait une jolie voix ; que Madame Lafarge était excusable, puisqu'elle empoisonnait son mari avec des gâteaux; que M. de Morny n'était pas méchant, puisqu'il a composé de joyeux vaudevilles.

Cela est ridicule, n'est-il pas vrai, et pourtant c'est ainsi que jugent la plupart des hommes, et c'est en vertu de ce procédé, qu'on a créé la légende de Fénelon. C'est à l'amour de la rhétorique que nous sommes redevables de ce nouveau saiut, etc. » (Fénelon et la princesse palatine, par A. Coquerel fils, Renaissance du 5 septembre 1874).

(3) Th. Bost, Disciple de Jésus-Christ du 10 novembre 1872.

« Ce n'est pas la faute de Fénelon, dit M. Bust, si on lui a attribué une tolérance qu'il n'eut jamais et que, par principe, il considère toujours

voir mis une sorte d'acharnement à lui arracher son auréole de mansuétude. Pour un peu, on nous eût comparé à ce huguenot iconoclaste, qui, en train de saccager une église, et menacé d'un coup d'arquebuse par le prince de Condé, lui répondit du haut de son échelle: « Monseigneur, laissez-moi seulement abattre encore cette idole, vous me tuerez ensuite si vous voulez. »

Il y a nécessairement quelque chose de fondé dans ces critiques, qui, venues de divers côtés à la fois, ne peuvent avoir pour unique cause le désagrément qu'on éprouve à voir tomber une illusion, et qu'une dame nous exprimait ainsi : « Vous m'avez gâté mon Fénelon. »

Maintenant que le procès ou la bataille est gagnée, je ne demande pas mieux que d'envisager le sujet sous un aspect moins militant, de laisser parler les faits et d'employer des couleurs moins vives; mais on ne change pas ainsi de point de vue du jour au lendemain. C'est un livre tout nouveau à faire; rien n'y sera changé, adouci, quant au fond, au contraire, puisque les Lettres inédites accentuent plus que les autres l'intolérance du missionnaire; mais la forme en devra être mitigée et moins énergique. Ce livre, je le ferai, si Dieu me prête vie; j'ai déjà recueilli dans ce but de nouveaux documents, dont un, qui ne manque pas de

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comme mauvaise. » Nous ne saurious être entièrement de cet avis. Sans doute, Fénelon qui fut ultramontain alors que Bossuet était gallican, eût repoussé, comme une injure, la qualification de prêtre tolérant, mais, et c'est là ce qui a aidé à tromper la postérité, il élève si fréquemment de telles prétentions à la douceur, qu'on est bien excusable d'y avoir cru et d'avoir confondu avec la tolérance, cette soi-disant douceur qui n'est qu'une apparence, ou, comme s'exprime Massillon, qu'une douceur empruntée, où la politesse et les manières ont plus de part que le sentiment. »

gravité, sur les dernières années de l'archevêque de Cambray. Mais un tel travail ne s'improvise pas, et j'avoue que je ne puis encore voir sans irritation ce mélange de ruse, de duplicité, d'ambition et surtout de prétention à la douceur et de persécution froide et raisonnée, qu'on retrouve à un si haut degré dans les Lettres inédites.

Une seconde édition n'étant pas possible en ce moment, l'auteur et l'éditeur de la première ont considéré comme un devoir de la compléter autant qu'on le pouvait sans la remanier de fond en comble. Ils y ont donc ajouté, outre ces lignes :

1o (Appendice VII) le sommaire inédit d'une lettre de Seignelay à Fénelon, relative aux accusations que les jésuites avaient fait parvenir au roi, contre le catholicisme édulcoré prêché par le missionnaire, à son arrivée en Saintonge;

2o (Appendice VIII) huit lettres extraites de la publication de M. l'abbé Verlaque (mais corrigées sur le ms. original), savoir cinq de Fénelon et trois de Seignelay;

3o (Appendice IX) le mémoire de Fénelon, dont nous avons parlé ci-dessus, avec son orthographe primitive;

4o (Appendice X) une lettre inédite de 1598, dans laquelle le père Aymar prie l'abbé de Cordemoy de faire expédier promptement un ordre général, qui oblige tous les protestants de Saintonge à faire profession du catholicisme.

C'est donc un portrait de Fénelon retouché par lui

même, que nous offrons ici au public. Et, afin de n'être pas accusé de passer sous silence ce que l'on a écrit de plus fort, de plus habile ou de plus vif, pour justifier sa réputation de douceur et de chrétienne mansuétude, nous terminerons cette préface par la reproduction intégrale de notre débat avec la Revue des questions historiques.

REVUE DES QUESTIONS HISTORIQUES

Du 1er avril 1874.

L'INTOLERANCE DE FENELON, études historiques d'après des documents pour la plupart inédits, par O. DOUEN. Paris, Sandoz et Fischbacher, 1872, in-12.

RÉPONSE AU LIVRE DE M. O. DOUEN SUR L'INTOLERANCE DE FENELON, par Albert DUJARIC, licencié en droit. Périgueux, imprimerie Dupont, 1873, in-8° de 15 p. (Extrait de l'Echo de la Dordogne, des 14-15 avril 1873.)

L'Intolérance de Fenelon! En choisissant un titre semblable, M. Douen a-t-il voulu spéculer sur cette espèce de curiosité malsaine qui recherche les paradoxes scandaleux? Son livre, ou plutôt son libelle, est-il, au contraire, inspiré par une de ces aveugles convictions qu'enfante parfois un misérable esprit de parti? Quoi qu'il en soit, L'Intolérance de Fénelon est un défi audacieusement jeté à l'opinion de tout le monde, à l'opinion de philosophes aussi peu suspects que Voltaire et

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