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plus que les pensées d'un esprit sans règle, et la loi que les passions du cœur. Enfin il arrive un moment

reau qu'après avoir fait de Babylone, c'est-à-dire de la monarchie, un objet de risée et d'exécration, non seulement en Angleterre, mais dans les pays étrangers (Echard's Hist. of Engl.). Le même fanatisme produisit les mêmes effets parmi les quakers. George Fox, leur fondateur, prétendit que le vrai culte est inspiré par un mouvement intérieur et immédiat qui vient de l'esprit de Dieu, et qui n'est limité à aucuns temps, à aucuns lieux, à aucunes personnes (Barclay Apolog., Propos. XI). C'est la règle de sentiment, dars sa plus grande généralité. Elle produisit bientôt toutes sortes d'extravagances et de crimes. Un quaker vint l'épée à la main à la porte du parlement et blessa plusieurs personnes, disant que le Saint-Expril lui avoit inspiré de tuer tous ceux qui siégeoient dans cette chambre (Maclaine's notes on Mosheim, vol. V, pag. 470). Nous ne parlerons point des Muggletoniens et des Labbadistes, qui, sous prétexte de suivre la lumière intérieure, s'abandonnoient aux désordres les plus honteux, et à des pratiques pleines d'impiété. On sait jusqu'où vont, en ce genre, certaines sectes de méthodistes, ou plutôt on ne le sait pas assez. Qu'on écoute l'antinomien Richard Hill: « L'adultère même et le meurtre ne nuisent point aux vrais >> enfans de Dieu, au contraire ils leur sont utiles (Fletchr's Works, » vol. III, pag. 50). Mes péchés peuvent déplaire à Dieu : ma » personne lui est toujours agréable. Quand je pécherois plus que » Manassés, je n'en serois pas moins un enfant chéri de Dieu, parce » qu'il me voit toujours dans le Christ. De là vient qu'au milieu des >> adultères, des meurtres et des incestes, il peut m'adresser ces pa» roles : « Tu es toute belle, ô mon amour, et il n'y a point de lache » en toi (ibid. vol. IV, pag. 97). —Quoique je blâme ceux qui » disent: Péchons, afin que la grâce abonde en nous; cependant, après tout, l'adultère, l'inceste et le meurtre me rendront plus » saint sur la terre et plus joyeux dans le ciel (Fletcher. — Dau» beny's Guide to the Church., pag. 82). » Salmon ministre à Coventry, enseignoit au peuple à jurer, à blasphémer, et à s'abandonner à tous les désordres de la chair. A Douvres, une femme coupa la tête à son enfant, sous prétexte d'un commandement particulier que Dieu lui avoit fait comme à Abraham. Une autre femme fut condamnée à York, en mars 1647, pour avoir crucifié sa mère, et sacrifié un veau et un coq (Milner's Lettera to a Prebendary). - Storck, disciple de Luther, et fondateur de la secte des Abėcėdaires, soutenoit que les fidèles, pour éviter les distractions qui em

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où la confusion est si grande, les contradictions si manifestes, qu'il faut bien renoncer à cette chimère du sentiment, et chercher une autre voie pour discerner la vraie religion. La raison se présente, on la prend pour guide; on s'imagine pouvoir, à son aide, s'assurer de la vérité, et cette dernière erreur est pire que la première car, impuissante à rien établir, la raison individuelle ébranle toutes les croyances, obscurcit toutes les notions, et toujours détruisant s'avance de ruine en ruine, jusqu'à ce qu'elle s'évanouisse dans un doute universel.

C'est pourtant à ce système d'examen et de discussion que s'arrêtent nécessairement les déistes et les sectaires. Le sentiment exclus comme règle de foi, il ne leur reste que le raisonnement; triste ressource dont nous allons démontrer l'insuffisance, en prouvant que la voie de raisonnement ou de discussion n'est pas le moyen général offert aux hommes pour discerner la vraie religion. Recueillons toutes nos forces pour attaquer l'orgueil dans son dernier retranchement.

pêchent d'être attentif à la voix de Dieu, devoient renoncer à l'étude, et ne pas même connoître les premières lettres de l'alphabet (Vid. Osiander, cent. XVI, lib. 2, Stokman Lexic. voce abecedarii.)—Quelque absurde que paroisse une pareille doctrine, en admettant le principe de l'inspiration particulière Storck étoit conséquent : et Jean-Jacques aussi est conséquent, lorsqu'après avoir dit, c'est le sentiment intérieur qui doit me conduire, il ajoute : « Puis» que plus les hommes savent, plus ils se trompent, le seul moyen » d'éviter l'erreur est l'ignorance. Ne jugez point, vous ne vous ab» userez jamais. C'est la leçon de la nature aussi bien que de la rai» son » ( Émile, tom. II, pag. 156. Édit. de La Haye). C'est grand' pitié que de n'écouter que soi, car on finit par s'imposer silence à soi-même ; et désespérant de la vérité et de la vie, on cherche le repos dans le néant.

CHAPITRE XIX.

Que la voie de raisonnement ou de discussion n'est pas le moyen général offert aux hommes pour discerner la vraie religion.

CE que nous avons de plus grand et tout ensemble de plus intime, c'est notre raison, notre entendement, cette sublime faculté de connoître qui nous rend sem blables à Dieu, puisque par elle nous devenons participans de son être ou de sa vérité. Élevés ainsi audessus de la création matérielle, au-dessus des mondes qui roulent dans l'espace, au-dessus de tous les êtres qui ont reçu la vie et n'ont pas reçu l'intelligence, nous ne saurions concevoir une trop haute idée de nous-mêmes. Par notre pensée, nous touchons de toutes parts à l'infini. Nul temps ne peut la borner, nulle étendue la circonscrire, et Dieu seul est assez vaste pour la contenir dans son immensité.

Ce n'est donc point parce qu'il se glorifie de sa raison que l'homme s'égare, mais parce qu'il se méprend sur sa nature, en s'attribuant ce qui n'est pas à lui. Dans son orgueil, il confond la capacité de connoître avec la puissance de produire; il oublie que nos intelligence, purement passive à l'origine, naît et se développe à l'aide des vérités qu'on lui donne, et qu'elle ne possède que ce qu'elle a reçu. Doué du

pouvoir de combiner ces vérités primitives et d'en tirer des conséquences, pouvoir borné comme toute action d'un être fini, il cherche en soi la certitude ou la dernière raison des choses; et ne l'y trouvant pas, il commence à douter. Les vérités se retirent, la nuit se fait; au milieu de cette nuit, il cesse de se reconnoître lui-même seul et fier de sa solitude, il essaie de créer; il remue d'obscurs souvenirs, et eroit peupler d'êtres réels son entendement désert, parce qu'il évoque des fantômes mais bientôt détrompé, las de ce vain labeur, il ferme les yeux et s'assoupit dans des ténèbres éternelles.

Hors de Dieu tout est contingent, hors de lui rien n'existe que par sa volonté; lui seul est nécessairement: lui seul donc possède en lui-même la certitude. Il est certain de son être, parce qu'il se connoît; il est certain de l'existence des autres êtres, parce qu'il connoît ses volontés, et toute la certitude que nous en pouvons avoir vient de lui, et repose sur son témoignage. C'est toujours là qu'il faut remonter, à un témoignage, à une autorité première, infaillible, sans quoi l'on ne peut pas même raisonner; car tout raisonnement présuppose quelque vérité antérieure, un principe d'où l'on part et qu'on ne prouve pas, et qui dès lors ne peut être certain qu'en supposant l'infaillibilité de la raison ou de l'autorité qui l'atteste. Il n'importe d'ailleurs que l'on comprenne clairement ce principe, cette vérité. Vouloir tout comprendre, c'est vouloir tout nier. Et, en effet, que comprenonsnous? Il n'y a pas une loi de la nature qui ne ren

ferme l'infini, par conséquent pas un phénomène que l'homme puisse pleinement expliquer et pleinement comprendre.

Comment donc parviendroit-il à découvrir avec certitude la vraie religion par le raisonnement? Connoître la religion, c'est connoître Dieu, c'est connoître l'homme, leur nature et les rapports qui en dérivent, ou les lois de l'intelligence : et l'on veut qu'il s'en aille à la recherche de ces lois dans les solitudes d'un esprit d'où l'on aura banni toute idée reçue de confiance sur le témoignage des autres hommes ou de la société. Est-ce ainsi que l'homme a vécu? Est-ce ainsi qu'il se conserve? A-t-il, avant de les admettre, discuté ses premières notions, qu'il ne pouvoit comparer à rien? Qu'on nous explique par quelle industrie il auroit suppléé à l'enseignement primitif, à la parole qui lui révéla sa propre existence, alors que sa pensée, sa volonté, tout dormoit en lui. Obligée d'agir avant d'être, ou de se créer elle-même, la raison, qui n'existe que par la vérité, puisqu'elle n'est que la vérité connue de nous, seroit demeurée éternellement inerte, éternellement ténébreuse; jamais la lumière ne se fût levée sur le monde intellectuel. Et quand les esprits, emportés par le désir de l'indépendance, veulent vivre dans cet état contre nature; quand ils refusent de croire et prétendent tout soumettre à l'examen particulier, cette brillante lumière peu à peu pâlit et s'éteint. Représentez-vous un homme à qui l'on vient dire « Oublie tout ce que >> tu as appris de tes semblables, oublie tout ce que

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