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» flatté ; si je ne saute pas, je suis battu : sautons >> donc. Certainement on ne trouvera pas une plus » grande force de raisonnement dans l'homme. >>

Cela est clair, s'écrièrent plusieurs philosophes; il ne manque à ce chien que la parole, pour marcher notre égal.

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Vous croyez que c'est beaucoup, reprit vivement La Métrie, qui triomphoit sur cette matière erreur grossière, «un rien empêche les animaux >> de parler; mais ce foible obstacle sera peut-être » un jour levé. Les hommes qui parlent doivent » songer qu'ils n'ont pas toujours parlé.» (Les Anim. plus que mach.)

Tirons la conséquence, ajouta Diderot; » il » est démontré, qu'entre moi et mon chien, il » n'y a de différence que l'habit. » (Vie de Sen. 377.)

Et de moi à un chou, quelle est la différence ? demanda un philosophe, mais d'un ton à faire sentir, qu'il étoit en état de répondre lui-même à ⚫cette sublime question, et qu'il n'interrogeoit que pour donner lieu aux assistants de développer de plus en plus leurs facultés.

Il n'y en a point d'autre, lui répondit-on, que la conformation et un peu plus d'ame en vous que dans le chou; c'est une conséquence évidente de ce grand principe : « l'homme est celui de tous les >> êtres connus qui a le plus d'ame, comme la plante >> est celui qui en a le moins. » (L'homm.pl.)

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Le philosophe qui avoit interrogé, fit un signe de tête accompagné d'un sourire qui annonçoit sa satisfaction d'avoir été deviné. L'identité de nature dans l'homme, dans l'animal et dans la plante, dit-il en analysant les raisonnemens de ses confrères , peut être démontrée géométriquement. Sous les auspices de Condillac, nous avons appelé comme d'abus, de la vieille opinion, qui jusqu'au dix-huitième siècle a fait de l'homme un être pensant; nous ne voyons en lui que des sensations: c'est un être sensitif et rien de plus. Mais les animaux sentent, l'homme est donc dans la classe des animaux mais les plantes sentent, l'homme est donc dans la classe des plantes. Seulement il est au premier rang; ce qui doit suffire à son orgueil.

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Plusieurs de nos philosophes se regardèrent en se félicitant de la main et des yeux : un seul d'entre eux avoit exprimé ce raisonnement, mais tous avoient le sentiment intime qu'ils étoient capables de le faire. Voyez, disoient-ils, avec quelle rapidité les idées se suivent dans notre système c'est comme une boule placée sur un plan incliné, et que rien ne retient; il faut qu'elle roule,

Par Belzébut, dit le grand homme, j'aime cette manière de matérialiser nos ames : elle est extrêmement adroite; il faut que j'en fasse usage dans mes mélanges. Là, on verra une douzaine de bons philosophes, qui, par des inductions sem

blables à celles que nous venons d'entendre, s'élèvent de la contemplation des animaux et des plantes, à cette grande vérité que la matière peut devenir un être pensant. « Un homme violent et >> mauvais raisonneur entend leurs discours et >> leur dit, vous êtes des scélérats dont il faudroit > brûler les corps pour le bien de vos ames. Nos >> philosophes se regardent tout étonnés ; l'un » d'eux lui répond avec douceur, pourquoi nous >> brûler si vite ? » Ensuite, il lui fait observer que si c'est une certaine portion de matière et non un esprit qui pense en nous, c'est un nouveau sujet d'adorer Dieu. « Le brutal, n'ayant rien de >> bon à répliquer, parle beaucoup et se fâche >> long-temps. » Mais enfin, on lui impose silence en lui disant : « pensez et laissez penser >> votre frère; ne le mettez pas en quartier, parce » qu'il croit que Dieu pourroit donner l'intelli >> gence à toute créature. » (Mél., c. 20 et 21.)

Nos sages ne pouvoient assez admirer l'art profond avec lequel le grand homme déguisoit, changeoit, égayoit cette grande question de la spi ritualité de l'ame, et de bon mot en bon mot, arrivoit enfin, on ne sait comment, à cette conclusion désirée, que nous ne sommes que matière. Ce petit conte est très-plaisant, dirent-ils, il rendra sensible aux moins intelligents la sottise de nos adversaires, et par contre-coup la bonté de notre cause; ils se fâchent, et ils veulent nous brûler,

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parce que nous croyons que la matière peut penser: donc ils ont tort.

Il est temps, poursuivit le grand homme enchanté de cette découverte, de dire enfin leur fait à «nos Seigneurs les théologiens, gens qui voient >> si clairement la spiritualité de l'ame qu'ils fe» roient brûler, s'ils pouvoient, le corps de ceux >> qui en doutent.» (Lett à Form., 15 déc. 1732.)

Encore? Oh! pour le coup, nous avons cause gagnée; quel homme raisonnable voudroit penser comme ces barbares ?

« Ils sont indignes, reprit Voltaire, d'avoir une >> ame immortelle; » mais achevons de les écraser par l'autorité. «Il est certain, leur dirai-je, que » plusieurs Pères de l'Église, dans les premiers » siècles, ont cru l'ame humaine, les anges et » Dieu corporels. » (Mél. c. 19 et 21.) Tirezvous de là, si vous pouvez.

Ils ne le pourront pas, dirent plusieurs de nos sages, on ne dispute jamais sur un fait. Ensuite, ils remercièrent le grand homme de la force inattendue qu'il venoit de donner au langage philosophique, en y introduisant ces expressions heureuses; il est certain, il est incontestable, il est hors de doute, etc.: ce sont, disoient-ils, des tours ingénieux auxquels le commun des lecteurs ne résiste pas.

Cependant Rousseau lançoit sur tous ces discoureurs des regards furieux; il brûloit comme

eux du désir de détruire les anciennes idées religieuses; mais il y avoit un point où il vouloit s'arrêter. Il ignoroit que dans ce genre de révolutions, il faut, si on veut demeurer le maître, porter tout à l'excès, ou se résoudre à ne travailler que pour faire triompher à la fin, ceux qui déploient plus de hardiesse. Il avoit amassé des argumens de la plus grande force, contre les systèmes extravagants et pernicieux de ses confrères : (Prof. de foi.) mais ceux-ci, ne lui permirent pas de les exposer; ils étoient trop satisfaits des lumières qu'ils avoient acquises. Voilà, crièrent - ils, le système de l'homme simplifié, éclairci, et dégagé d'un grand nombre d'idées fausses. (Pap. dù phý. et du mor. dans l'homm., t. 2, p. 8o.) Voilà, que nous pouvons enfin être perfectionnés comme les chevaux qu'on élève dans les haras. (Ibid., t. 1, p. 481.) Ils trouvèrent même des moyens de faire à volonté des enfans d'esprit, ce qui devenoit désormais la chose du monde la plus facile.

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