Oldalképek
PDF
ePub

promets de garder et faire garder l'équité et miséricorde en tous jugements, afin que Dieu, clément et miséricordieux, répande sur moi et sur vous sa miséricorde.

«

<< Si quelqu'un, Sire (nous le pouvons penser), s'opposait à cette miséricorde, à cette équité royale, nous ne souhaitons pas même qu'il soit traité sans miséricorde et sans équité. Mais pour nous, qui l'implorons pour M. Fouquet, qui ne l'implore pas seulement, mais qui y espère, mais, qui s'y fonde, quel malheur en détournerait les effets? Quelle autre puissance si grande et si redoutable dans les états de votre Majesté l'empêcherait de suivré et ce serment solennel, et sa gloire, et ses inclinations toutes grandes, toutes royales, puisque, sans leur faire violence et sans faire tort à ses sujets, elle peut exercer toutes les vertus ensemble? L'avenir, Sire, peut être prévu, réglé par de bonnes lois. Qui oserait encore manquer à son devoir quand le prince fait si dignement le sien? Que personne ne soit plus excusé personne n'ignore maintenant qu'il est éclairé des propres yeux de son maître. C'est là que votre Majesté fera voir avec raison jusqu'à sa sévérité même, si ce n'est pas assez de sa justice. Mais pour le passé, Sire, il est passé, il ne revient plus, il ne se corrige plus. Votre Majesté nous avait confiés à d'autres mains que les siennes : persuadés qu'elle pensait moins à nous, nous pensions bien moins à elle; nous ignorions pres

que nos propres offenses, dont elle ne semblait pas s'offenser. C'est là, Sire, le digne sujet, la propre et véritable matière, le beau champ de sa clémence et de sa bonté. »

Que l'on songe à ce qu'étaient Louis XIV, Fouquet et Pélisson; et si l'on veut se faire une idée de la différence des temps, et de ce que peut devenir une nation d'un siècle à l'autre, que l'on considère que, s'il s'était agi, de nos jours, de défendre, non pas un Fouquet, réellement coupable de malversation, et même de crime d'état, puisqu'il avait projeté de se fortifier contre son roi dans Belle-Isle, mais quelqu'un de ces innocents proscrits, sans aucune espèce de jugement quelconque, par des décrets conventionnels, il ne se serait trouvé personne qui eût osé adresser à la tyrannie, qu'on appelait gouvernement, une apologie publique en faveur de celui-là mème dont la cause eût été la plus favorable, et que, s'il se fût élevé un défenseur de ces infortunés, la seule réponse à ses écrits eût été le même arrêt de proscription. Aussi, dans ces malheureux jours, l'infamie du silence a été égale à celle des paroles; et cette nation, si fière auparavant et si généreuse, semble avoir mérité ses maux inouïs par un avilissement sans exemple (1).

(1) Prononcé en 1794.

SECTION II.

Du genre démonstratif, ou des panégyriques, discours d'apparat, etc. Du genre délibératif et des assemblées nationales.

Quant au genre démonstratif, qui comprend les panégyriques de toute espèce, les harangues de félicitation, de remercîment, d'inauguration, Patru cite sa harangue à la reine Christine, prononcée à la tête de l'Académie, et qui est, dit-il, un panégyrique mélé d'actions de graces, comme le discours de Cicéron pour Marcellus. Ce n'est pourtant, comme toutes les pièces semblables du même temps, qu'une amplification de rhétorique. On n'y aperçoit autre chose que le soin laborieux de construire et de cadencer des périodes et d'entasser des hyperboles. On s'extasiait alors sur la noblesse des expressions et le nombre de la phrase, sans s'occuper assez du fond des idées, parce que la formation du langage était encore une affaire capitale. Les compliments de réception à l'Académie, contenant l'éloge de ses membres, n'étaient pas non plus examinés sous un autre point de vue, et la plupart de ceux du dernier siècle sont dans le même goût. Les meilleurs, ceux qui sont au moins purgés de toute déclamation, n'offrent rien de plus que de l'esprit et de l'élégance, si l'on excepte celui de Racine à la réception de Thomas Corneille. Les

discours sur des points de morale, d'après un texte choisi dans l'Écriture, proposés pour sujet de prix, étaient de froids traités ou de mauvais sermons; et ce qu'il y avait de plus passable, comme par exemple un discours de Fontenelle sur la Patience, qui fut couronné, n'était pas au-dessus du médiocre pour le style, et ne ressemblait en rien à l'éloquence. Les panégyriques des Saints, ceux même dont les auteurs ont mérité d'ailleurs le plus de réputation; ceux qui nous restent de Bourdaloue, de Bossuet, de Fléchier, sont au nombre de leurs plus faibles compositions. Les mieux faits sont encore ceux de Fléchier, le premier des rhéteurs de son siècle. Mais quand même ils seraient aussi bons qu'ils peuvent l'être, Patru aurait encore de la peine à nous persuader que ces sortes de sujets pussent avoir autant d'effet sur l'imagination que Pline parlant à la tête du sénat de Rome, et remerciant le maître du monde d'en être le bienfaiteur, ou Cicéron félicitant César d'avoir rendu Marcellus au sénat, ou faisant devant le peuple romain l'éloge de Pompée, vainqueur des nations.

Patru n'a pas assez senti que la différence des lieux, des choses et des hommes, est de quelque poids dans l'éloquence. Comme il avait été chargé plus d'une fois de faire la harangue de présentation, lorsqu'un avocat-général était reçu au parlement, il compte aussi ces sortes de discours parmi les sujets d'éloquence moderne. Mais dans

le fait, comme ces discours ne sont et ne peuvent guère être autre chose que des politesses et des exagérations convenues, et que le récipiendaire doit toujours être, en vertu de son office et de la cérémonie, le modèle de tous ceux de sa profession, ces compliments ne sont jamais sortis de l'enceinte où ils ont été débités.

Il convient du moins que le troisième genre, le délibératif, est plus en usage dans les républiques que dans les monarchies. Cependant il revendique, pour les modernes, les discours que l'on peut faire dans les délibérations des corps de magistrature. Ce genre, dit-il, pouvait étre de saison dans le temps de la Fronde; ce qui veut dire qu'il ne pouvait plus avoir lieu sous Louis XIV, qui ne permettait pas que les parlements délibérassent sur les matières de gouvernement. Mais ce qui nous reste de ces discussions parlementaires dans les Mémoires du temps, et particulièrement dans ceux du cardinal de Retz, qui en rapporte de longs morceaux, est lourd, diffus, de mauvais gout et ennuyeux. Patru ne parle pas des assemblées nationales : c'est pourtant là qu'il aurait trouvé plus aisément quelque chose de ce qu'il cherchait; et un discours du chancelier de l'Hôpital, à l'ouverture des états-généraux, est sans comparaison ce qui nous reste de plus solide, de plus sain, de plus noble, de mieux pensé et de mieux senti dans tous nos monuments du seizième siècle.

« ElőzőTovább »