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je ne sois tenté de croire que la Nature a révélé son aventure au sublime La Fontaine, en même temps qu'elle lui inspiroit ces vers. Si ces fables n'étoient pas l'histoire des hommes, elles seroient encore pour moi un supplément à celle des animaux». (Etudes de la Nature, L. 1. vers le milieu.)

(3) Venez faire aux cités éclater leurs merveilles. Aux cités se rapportant a venez, n'est pas exact. On dit : aller à la ville, venir dans les villes; le lieu est fixe: aller aux champs, parce que l'espace n'est pas déterminé. On lira avec le plus touchant intérêt dans J. B. Rousseau (L. 1. ép. 6.), une fable de Philomèle, dont le sujet s'éloigne de celui-ci, mais dont les accessoires, les pensées et la morale se rapprochent de notre apologue.

Un autre poète, M. Lebrun, a imité ainsi la fable de La Fontaine :

Sous des berceaux couverts de verdure et de fleurs,

Philomèle aux regrets toujours abandonnée,

Chante, gémit, verse des pleurs.

Progné, sa sœur infortunée,

A ses accens plaintifs vient joindre ses douleurs.

De tous leurs entretiens, Echo, témoin fidelle,
En les répétant se rappelle

Le triste souvenir de ses propres malheurs.

FABLE XVI.

La Femme noyée.

(Avant et depuis La Fontaine). FABLIAUX ET CONTES. Du Vilain et de sa Femme, dans un Mémoire du Comte de Caylus, T. XX des Mém. de l'Académ. des Belles-Lettres ; et Recueil des Fabliaux par Legrand, T. III, pag. 197. Contes et Facéties du Pogge, pag. 54. Facetiæ Frischlini, pag. 270. Facetie burle da Lod. Domenichi, pag. 64. Facet. etc. de Christ. Zabata, p. 8r. Convivales sermones, T. I. pag. 309. Nuge venales, pag. 74. Passa tempo de Curiosi, pag. 76. Arcadia di Brenta, pag. 211. Divertiss. curieux de ce temps, p. 19. Facét. et mots subtils, p. 186. Chasse-ennui, p. 318.

JE ne suis pas de ceux qui disent: Ce n'est rien,

C'est une femme qui se noie (1).

Je dis que c'est beaucoup; et ce sexe vaut bien (2) Que nous le regrettions, puisqu'il fait notre joie. Ce que j'avance ici n'est point hors de propos, Puisqu'il s'agit en cette fable

D'une femme qui dans les flots

Avoit fini ses jours par un sort déplorable.
Son époux en cherchoit le corps,

Pour lui rendre, en cette aventure,
Les honneurs de la sépulture.

Il arriva que sur les bords

Du fleuve, auteur de sa disgrace,

Des gens se promenoient ignorant l'accident.

Ce mari donc leur demandant

S'ils n'avoient de sa femme apperçu nulle trace:

Nulle, reprit l'un d'eux; mais cherchez-la plus bas,

Suivez le fil de la rivière.

Un autre répartit : Non, ne le suivez pas,
Rebroussez plutôt en arrière (3):

Quelle que soit la pente et l'inclination
Dont l'eau par sa course l'emporte
L'esprit de contradiction

L'aura fait flotter d'autre sorte.
Cet homme se railloit assez hors de saison.
Quant à l'humeur contredisante,

Je ne sais s'il avoit raison;

Mais

que cette humeur soit, ou non
Le défaut du sexe et sa pente,
Quiconque avec elle naîtra,
Sans faute avec elle mourra

Et jusqu'au bout contredira,

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Et, s'il peut, encor par de-là (4).

OBSERVATIONS DIVERSES.

•Cette jolie pièce de vers est moins un apologue qu'un conte ou fabliau. On en a mêlé quelques-uns parmi les fables; mais ces apologues de contrebande n'ont rien ici dont la morale et la religion puissent s'offenser. Avec l'innocence de l'apologue, ils en ont aussi la grace. Conteur ou fabuliste, La Fontaine est toujours l'écrivain sans rivaux et sans successeurs.

(1) Je ne suis pas de ceux qui disent, etc. Existe-t-il quelque part exorde où une plus fine plaisanterie soit déguisée sous un air de bonne-foi plus ingénue? La naïveté du poète est telle, qu'elle se communique à son lecteur, et laisse son opinion indécise sur le jugement à porter d'un sexe dont on dit et tant de bien et tant de mal.

(2) Et ce sexe vaut bien, etc. Avoit-il sous les yeux ce vieux fabliau de Constant Duhamel, où on lit: «Je dis que les dames

sont l'ouvrage du créateur, le plus agréable comme le plus utile, et je soutiens en conséquence qu'on ne sauroit assez les honorer ». (Fabliaux de Legrand, T. IV. p. 237.)

(3) Rebroussez plutôt en arrière. On dit rebrousser chemin, et retourner en arrière,

(4) Et jusqu'au bout contredira,

Et S'il se peut encor par-delà. C'est le mot de Faerne:

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Morosa et discors vel mortua litigat uxor.

Mais quand on est au bout, le moyen d'aller plus loin? C'est précisément l'exagération qui fait le sel de l'épigramme. Si l'on disoit les femmes parlent jusqu'à la mort, il n'y auroit à cela rien de malin. Dites qu'elles parlent vingt-quatre heures après la mort, et ce proverbe devient un trait de satyre raisonnable.

FABLE XVII.

La Belette entrée dans un grenier.

(Avant La Fontaine). ORIENTAUX. Mola Dschamijus (le Loup et le Renard) dans l'Anthologie persienne, publiée par les soins de l'impératrice Marie-Thérèse. — GRECS. Esope, fab. 161 (le Renard à jeun). Gabrias, fab. 47 et Supplém. fab. 4 (sous le même titre). — LATINS. Horace, L. I. ep. 7, v.29.

DAMOISELLE Belette, au corps long et fluet (1),

Entra dans un grenier par un trou fort étroit:
Elle sortoit de maladie (2).

Là, vivant à discrétion,

La galante fit chère lie (3),

Mangea, rongea : Dieu sait la vie,

Et le lard qui périt en cette occasion!
La voilà, pour conclusion,

Grasse, maflue (4), et rebondie.

Au bout de la semaine, ayant dîné son sou,
Elle entend quelque bruit, veut sortir par le trou,
Ne peut plus repasser, et croit s'être méprise.
Après avoir fait quelques tours,

C'est, dit-elle, l'endroit (5); me voilà bien surprise :
J'ai passé par ici depuis cinq ou six jours.

Un Rat qui la voyoit en peine,

Luidit: Vous aviez lors la panse un peu moins pleine.
Vous êtes maigre entrée, il faut maigre sortir :
Ce que je vous dis-là, l'on le dit à bien d'autres (6).
Mais ne confondons point, par trop approfondir (7),
Leurs affaires avec les vôtres.

(Depuis La Fontaine), FRANÇ. Benserade, fab. 47. Lenoble; fab. 146 et 180. Boursault, comédie des fables d'Esope, act. I. sc. 2. Lamothe, L. II. fab. III. Fables en chansons, L. III. f. 2.-LATINS. Desbillons, Lib. VI. fab. 9.

NOTE D'HISTOIRE NATURELLE.

LA BELETTE, petit animal hardi et cruel; il y en a de deux sortes: l'une sauvage qui vit à la campagne, ennemie des Pigeons et des Lapins; l'autre domestique, qui se cache dans les greniers, et que l'on confond avec la Fouine. Elle a le gosier blanc, le dos rouge, le museau étroit, le corps alongé et fluet.

OBSERVATIONS DIVERSES.

(1) Damoiselle Belette, au corps long et fluet. Outre le charme de cette description, on en remarquera l'à-propos. Comment avec un autre corps auroit-elle pu se glisser dans ce trou?

(2) Elle sortoit de maladie. L'œil du poète est semblable à la muse d'Homère, qui a tout vu; elle connoît non seulement les événemens, mais jusqu'à leurs causes les plus éloignées. L'appétit d'un convalescent se conçoit par le jeûne qui a précédé.

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