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même lieu n'ont rien de régulier. Si à certaines époques ils marchent avec lenteur, il en est d'autres où l'intelligence humaine parcourt avec une incroyable rapidité la plus longue carrière. Faudra-t-il conclure du temps qu'elle aura mis dans le premier cas, le laps de temps écoulé pour le second? Non, sans doute ne voit-on pas l'enfant qui bégaye à peine quelques mots acquérir en peu de jours un accroissement de connaissances dont aucune autre période de la vie n'offre l'exemple?

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Ce que je dis s'applique au grand âge qu'on s'est plu à donner à la race humaine. Qu'une nombreuse série de siècles soit passée depuis que la terre a été lancée dans l'immensité jusqu'au moment où l'homme a paru à sa surface, cela est indubitable : mais que l'espèce actuelle remonte à des temps disproportionnés à ceux de la tradition mosaïque *, à trente mille ans et au-delà, comme on l'a prétendu, je ne le pense point. Tous les faits et tous les raisonnemens auxquels on a eu recours sont loin de fournir une preuve décisive; et en supposant que les monumens historiques et physiques éta

* On pense bien que quelques mille ans de plus ou de moins scraient ici sans importance. De même découvrirait-on des peuples anciens dont l'existence eût été cachée jusqu'à nos jours, cela ne changerait rien à l'état de la question.

blissent une balance égale entre les deux opinions, elle pencherait encore pour la dernière, au moyen des deux inductions suivantes : la majeure partie du globe est dépeuplée, et il y a peu de siècles que ce défaut de population était bien autrement considérable. La raison générale de l'espèce ne brille que faiblement, même sur les points où elle a le plus avancé ; et il y a peu de siècles qu'on ne la comptait pour rien. Non, la race humaine n'est pas si vieille sur la terre; il faut le reconnaître pour n'en pas désespérer.

Le sol et le ciel que rencontrèrent les populations dispersées en Asie et en Afrique, eurent la plus grande influence sur le développement de leurs facultés. L'homme est partout et en tout temps le même : ses besoins fondamentaux ne changent point. Comme partie du règne animal, son existence se réduit à ces choses : se mouvoir, s'alimenter et se reproduire : comme être spécial, distinct de tous les autres, sa destination essentielle est d'aimer et de penser. Mais pour que ces facultés arrivassent au plus haut degré d'extension et au meilleur équilibre, il fallait des impressions diverses, dont les unes seraient provoquées par les agens extérieurs, les autres par ses propres forces intérieures. Il devait s'exercer sur tous les

objets à portée de son bras; subir l'épreuve de tous les sentimens possibles; se mettre par la pensée en rapport avec tout ce qui existe. De là les chocs qu'il a soufferts, les illusions, les déceptions, les erreurs qui ne lui ont pas été épargnées. «< Soumets la terre, lui avait dit l'Eternel, et domine sur elle, mais à la sueur de ton front. »

Bien plus, une véritable solidarité lie toute l'espèce. Un homme, une famille, un peuple ne peuvent être long-temps heureux, au milieu des pénibles agitations des autres : c'est pourquoi les plus grands efforts de civilisation sur un point donné ont toujours rencontré des obstacles invincibles; c'est pourquoi l'on a dit que les États parvenus à une certaine hauteur, passaient nécessairement à la décadence. Mais cette décadence partielle n'a jamais été un mal. Les fragmens d'une grandeur brisée sont devenus autant de germes qui, en se répandant au loin, ont produit des grandeurs nouvelles : et l'aspect des ruines, loin d'affliger profondément le cœur, doit au contraire inspirer cette pensée consolante, que l'homme, quand il a renversé ses propres œuvres, était comme poussé par le secret instinct qu'il avait de mieux faire.

L'état des peuples chasseurs les disposa bientôt à la guerre aussi regardons-nous comme

une sage idée, celle qui nous a présenté dans les premiers conquérans de l'Assyrie, de puissans chasseurs sur la terre. Les loisirs des pasteurs dirigèrent leurs âmes vers l'observation de la nature et la contemplation. C'est dans certains coins de l'Arabie, dans la Chaldée et dans l'Ethiopie, dont le rôle paraît avoir été des plus importans, que cette impulsion fut donnée aux facultés humaines. Elle s'était déjà manifestée sur les rives du Gange, avec les modifications produites par un climat plus relâchant et plus voluptueux; avec toutes les différences qui existent entre la vivacité de l'Arabe et la mollesse de l'Indien. Enfin, dans les pays agricoles, l'intelligence humaine se tourna principalement vers les choses utiles. La prévoyance des saisons, les travaux réclamés par le sol, la nécessité de s'opposer aux ravages des eaux et de porter chez les uns le superflu des denrées des autres, conduisirent, dans l'Égypte et à la Chine, aux mêmes résultats. La carrière fut ouverte à l'industrie, aux arts et au commerce. Les Phéniciens franchirent les mers; l'Afrique, l'Europe furent visitées; le golfe Persique, la mer des Indes établirent des relations entre tous les peuples de l'Orient; et bientôt les sages de Memphis connurent nonseulement la richesse des produits de l'Asie

méridionale, mais la philosophie de ces gymnosophites* indiens, dont ils honorèrent de tout temps le savoir et l'antiquité.

Malgré ce mélange des doctrines, les divers peuples ne cessèrent de recevoir de leur état. physique et de leur première impulsion, une empreinte particulière qu'il me suffit d'indiquer, attendu que les faits desquels je dois tirer des conséquences en sont indépendans. Les sages qui s'adonnaient surtout aux spéculations, s'efforcèrent de soumettre la pratique de la vie aux idées avec lesquelles ils croyaient expliquer l'harmonie du Monde, et ils dirigèrent dans cet esprit les institutions sociales: toute leur politique découla de leur théologie. Ceux au contraire chez qui les soins relatifs aux choses d'utilité physique avaient prévalu, accommodèrent plus directement les croyances, les institutions à ces besoins mêmes, et transformèrent en théologie une partie de leur politique. De là, deux religions principales, ou plutôt deux nuances de religion auxquelles se ralliaient toutes les autres la religion contemplative de l'Inde et même de l'Ethiopie qui créa des pouvoirs sociaux correspondant aux pouvoirs occultes de

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* Le mot gymnosophites signifie sages nus. On a dit que ce nom leur avait été donné parce qu'ils allaient nus dans les bois : croyons. plutôt que ce fut parce qu'ils aspiraient à voir la vérité toute nue..

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