Oldalképek
PDF
ePub
[ocr errors]

les actes de l'autorité publique, les sénats secondaires dont je parlerai bientôt, enfin la nécessité de l'intervention des assemblées générales dans toutes les questions importantes, étaient les obstacles les plus positifs à ses envahissemens. Et remarquez qu'une foule de modifications pouvaient être proposées, sans porter la moindre atteinte à la loi fondamentale : Moïse avait chargé soixante-onze sénateurs de l'administration de six cent mille hommes au-dessus de vingt ans, ou d'une masse de deux millions et demi d'individus, à peu près; en conséquence, le nombre total des sénateurs aurait pu recevoir une augmentation proportionnée à l'accroissement du peuple: on aurait pu fixer pour chaque tribu le nombre qu'elle aurait à fournir, suivant sa population, et limiter selon les circonstances la durée de leurs fonctions. Enfin rien n'empêchait de discuter et d'adopter toutes les mesures propres à développer le seul principe irrévo

cable de la loi : l'institution d'un conseil véritablement national.

Une autre remarque, non moins importante, est celle-ci lorsque la nation en masse eut ratifié la loi et que les tribus furent établies dans les provinces, il leur devint trop difficile de s'arracher toutes ensemble à leurs travaux, si ce n'est dans des circonstances majeures; elles

envoyèrent donc leurs propres anciens, pour les représenter dans l'assemblée générale et sanctionner les décisions du grand - conseil. Mais le droit de tous n'en resta pas moins inaliénable; car on est forcé de reconnaître avec Jean-Jacques, que si les citoyens peuvent choisir d'autres citoyens pour s'occuper de la chose publique, le peuple, proprement dit, a cela de commun avec Dieu, qu'il ne peut être rigoureusement représenté que par lui-même ". « Les assemblées, sous Moïse, lorsque les Hébreux formaient un corps d'armée, dit Guénée, ressemblaient assez aux assemblées du peuple à Athènes, à Lacédémone, à Rome ;...... mais il paraît que dans la suite elles ne furent composées souvent que des députés ou représentans du peuple, à peu près comme les parlemens d'Angleterre, les états de Hollande ". »

Au lieu de conclure de l'admirable ouvrage de Tacite sur les mœurs des Germains, que les Anglais y ont puisé l'idée de leur gouvernement politique, et que ce beau système a été trouvé dans les bois 73, Montesquieu pouvait donc remonter plus haut et le faire reposer sur des bases autrement sacrées aux yeux des nations modernes. Que dit Tacite? « Les affaires ordinaires étaient traitées dans le conseil des chefs, et les grandes affaires se renvoyaient à l'assem

blée du peuple : mais celles-là même dont la décision appartenait au peuple, étaient débattues par les chefs 74. » Les Hébreux au contraire, outre les chefs militaires, avaient leurs sénateurs (zakénim), et ils admettaient, comme on l'a vu, trois couronnes ou pouvoirs particuliers: couronne sacerdotale ou conservatrice, couronne de la loi ou législative, couronne du roi ou exécutive. D'ailleurs la majorité des Anglais a-t-elle jamais lu Tacite? tandis que Bible a exercé sur eux la plus grande influence, a présidé à leur révolution et produit plus d'un point de contact entre l'antique peuple d'Israël et le premier peuple des temps modernes qui ait compris toute la puissance de la loi.

la

S'il eût déployé les talens et l'énergie nécessaires pour maintenir l'union des tribus et les faire agir en masse, le grand - conseil aurait assuré la stabilité de la république, autant que pouvaient le permettre les circonstances extérieures. Mais après la mort de Josué et de ses collègues, chaque tribu, entraînée par le besoin de se reposer de longues fatigues, dirigea ses forces contre les peuplades qu'il importait le plus à ses intérêts particuliers de vaincre, et perdit souvent de vue le conseil général.

Sous les rois, ce sénat éprouva des vicissitudes nombreuses; mais il ne cessa pas d'exis

ter. Les changemens apportés dans le gouvernement primitif par les concessions faites à la royauté le dénaturèrent au conseil intellectuel que Moïse avait eu le dessein de former, succéda un corps aristocratique qui blessa les lois nationales, et qui prêta les mains à des ordonnances d'iniquité, contre lesquelles on entendra bientôt les prophètes s'élever avec une ardeur sans exemple. Vraie ou fausse, les Hébreux donnent la liste continue des hommes qui le présidèrent; le juge Samuel qui créa et déposa Saül; le prophète Ahija qui, à son exemple, désigna, au nom de l'Eternel, Jéroboam pour être roi des dix tribus que Salomon offensait chaque jour par ses exactions, furent du nombre. Josaphat le remit en vigueur, mais en restreignant sa puissance, mais en le réduisant aux fonctions judiciaires. Dans une de ses visions, où il peint d'une manière figurée les fautes qui ont occasionné la captivité de Babylone, Ezéchicl aperçoit à travers la porte du temple, les soixante et onze anciens d'Israël qui osaient offrir leur encens à de viles idolés 75 ; enfin Jérémie, dans ses Lettres aux Juifs, ne manque pas de nommer les principaux dans l'ordre suivant : à ceux qui restent des anciens, des sacerdotes, des prophètes et de tout le peuple que Nabuchodonosor a transportés 76.

A Babylone même, les Juifs eurent un conseil dont les membres portaient le nom de chefs de la captivité. Au retour, le sénat se forma de nouveau et régla les entreprises dont la direction était confiée au prince : de l'avis des docteurs, il fut porté alors à cent vingt membres, quoique l'Etat ne comprît plus que les seules tribus de Juda et de Benjamin. Zorobabel, Esdras * et Néhémie furent du nombre de ceux qui les présidèrent.

Mais un siècle et demi environ avant la prise de Jérusalem par le roi de Babylone, vers l'an 718 avant notre ère, et au commencement du règne de Numa, Salmanazar roi d'Assyrie avait subjugué les dix tribus d'Israël, qui, à la mort de Salomon, s'étaient constituées en royaume particulier, les avait transportées dans la Perse et dans la Médie, et les avait remplacées par des colonies de ces contrées qui prirent le nom de Samaritains, du nom de Samarie, la capitale. Ces nouveaux habitans, et la manière dont ils furent imposés au pays, ne pouvaient qu'inspirer une inimitié profonde au peuple de Juda: mais par cela même qu'ils avaient adopté la loi de Moïse, qu'au grand

* C'est en concours avec eux qu'il recueillit, dit-on, les anciens livres et les chroniques éparses, qu'il les épura en partic, et les disposa selon les besoins et l'esprit du temps.

« ElőzőTovább »