Oldalképek
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Après cette catastrophe, il dressa hors du camp un pavillon dont une nuée épaisse défendait l'entrée, et où il se retirait tantôt seul pour méditer, tantôt avec les anciens. Ensuite il s'établit sur le Sinaï pendant quarante jours, pour y graver de nouvelles Tables. A son retour, son visage resplendissait* : était-ce de l'espèce de flamme qui s'échappe des yeux de l'enthousiaste, ou d'une auréole lumineuse qu'il eut le talent de produire, et qui en imposa aux esprits?...

Mais l'état futur des tribus n'absorbait pas moins sa pensée que leur situation présente. Il en était souvent accablé, et il s'abandonnait à la douleur de s'être jeté dans une entreprise aussi difficile, jusqu'au moment où son âme, réagissant avec force, lui rendait tout son courage. Les Hébreux, incapables de franchir l'abîme qui existait entre leur ignorance et son génie, n'avaient nul égard à ses peines. «<Ah! quel pesant fardeau! s'écriait-il, je n'y puis suffire; grand Dieu! fais-moi mourir 4... »

* Or les enfans d'Israël s'aperçurent que la peau du visage de Moïse étoit resplendissante ; c'est pourquoi il se couvrit d'un voile (Exod. xxxiv, 30, 35). La Vulgate dit que des cornes lui étoient poussées pendant son séjour sur la montagne : Videntes autem Aaron et filii Israël cornutam Moysi faciem..... Mais qu’y a-t-il d'assez éblouissant dans un ornement de ce genre, pour exiger un voile? Les juifs qui ont adopté cette interprétation la prennent dans un sens figuré, attendu que ce mot emportait l'idée de la force.

Cependant, à travers tant d'obstacles et d'agitations, il ne cessait pas de marcher vers son but. Ses principes commençaient à germer dans les jeunes cœurs le nom de l'Éternel, du peuple, de la loi; l'horreur de l'esclavage, la substitution des choses positives et utiles, à des choses de néant, comme l'Écriture les appelle, luttaient déjà dans les têtes les plus dures contre les anciennes superstitions. Tous enfin se préparaient peu à peu à l'ordre qui serait établi dans la terre-promise.

C'est donc à cet ordre, considéré sous le rapport législatif, que je vais consacrer ce deuxième livre.

La loi ne peut s'expliquer ni agir seule. Elle réclame une disposition combinée d'un certain nombre de citoyens, qui soient appelés à veiller de diverses manières au développement et à l'exécution de ses volontés : c'est pourquoi je donne à ces charges le nom de fonctions en général, plutôt que de les appeler pouvoirs, attendu que, dans la doctrine que j'expose, le véritable pouvoir politique n'appartient qu'à la loi; attendu que les fonctions, quelles qu'elles soient, ne transferent sur l'homme qui en est revêtu qu'une qualité secondaire, attachée à la qualité parfaite de citoyen; que ce mot enfin, dérivant du verbe latin, fungi, fungor (s'ac

quitter), exprime très-bien que les fonctionnaires ne sont que les premiers serviteurs de la loi même.

La nature des fonctions publiques prescrites par Moïse, ou consignées dans le Pentateuque, semble découler de la nature des choses.

Le besoin de se conserver est le premier besoin d'une nation, comme de tout être animé; or il destine certains fonctionnaires non seulement à renforcer l'union des tribus, mais à conserver dans la pureté de la lettre et de l'esprit, le texte de la loi fondamentale, et à le faire entendre chaque jour aux citoyens. Tels sont les lévites et sacerdotes hébreux, qui diffèrent sur les points les plus importans, de tous les autres sacerdotes orientaux; et au sujet desquels on a commis une foule d'erreurs que j'espère bientôt détruire.

Il faut au corps politique un conseil suprême, qui étudie sans cesse ses besoins, qui dirige les déterminations publiques et proclame les développemens de la loi fondamentale exigés par ces besoins mêmes: c'est le grand-conseil des anciens du peuple ou sénat d'Israël, et les petits-conseils ou sénats secondaires des tribus et. des villes.

Les rapports civils doivent être maintenus. dans les règles tracées par la loi ; d'où les juges

et les hommes d'autorité, qui ont quelque ressemblance avec les constables d'Angleterre.

La force du peuple doit être dirigée contre tous ceux qui se déclarent ses ennemis; et ce soin est réservé aux chefs d'Israël, à la tête desquels sera le roi, lorsque, malgré Samuel et Dieu, la majorité des citoyens aura voulu confier cette charge à l'un de ses membres.

Enfin, dans les délibérations des fonctionnaires et des citoyens, il ne suffit pas toujours de l'amour du bien public, ni de cette habileté plus ou moins grande qui s'accommode aux circonstances présentes; il faut concevoir aussi ce qui convient dans l'intérêt à venir des principes et de la patrie, et reconnaître la liaison qui existe entre un mal actuel et des imprudences ou des injustices antérieures. L'homme doué de grandes vues politiques ou morales pourra donc hautement proclamer sa pensée; hautement et librement censurer et les magistrats et le peuple. Tel est l'esprit de l'institution hébraïque des orateurs - prophètes; institution admirable, que l'ignorance et le fanatisme défigurèrent, mais dont les siècles modernes, surtout, sauront apprécier la sagesse.

Voilà les diverses fonctions consacrées par la loi. Avant de les examiner en détail, parlons de leurs principes communs.

« Dans le gouvernement de Moïse, dit l'abbé Guénée, les titres de commandement et d'autorité n'étaient pas des titres d'exaction, ni des places de finances, tout s'y faisait gratuitement. Le législateur unit l'exemple au précepte. Réduit à s'écrier, comme on l'a déjà entendu : « Je suis accablé de trop de soins, j'y succombe; » il présenta ces fonctions, en général, comme de véritables fardeaux auxquels le devoir religieux, confondu avec l'esprit national, soumettait les citoyens. Aussi verrons-nous, dans une circonstance particulière, que la loi accorde pour faveur l'exemption pendant un certain temps de quelque charge que ce

soit.

Heureux le peuple pénétré de ces idées, chez qui du moins les avantages personnels que procurent les fonctions publiques offriraient un juste rapport avec le talent qu'elles exigent, la peine qu'elles donnent et le bien qu'elles font alors la science politique deviendrait plus facile, et les ressorts si nombreux du gouvernement seraient simplifiés. <«< Mais tout le monde aujourd'hui, disait Fleury sous le régime si vanté de Louis XIV, veut être personne publique, avoir des honneurs, des prérogatives et des priviléges et les charges ne sont considérées que comme des métiers qui

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