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poux qui les lui inspire, et leur expression même est de lui. Admirable condescendance de notre Dieu ! il nous a tout donné, tout, jusqu'aux prières mêmes que nous devons lui adresser. Il a daigné parler notre langage pour le rendre digne de lui; ou plutôt il a mis le sien à la portée de ses créatures, pour rétablir entre elles et lui, par cette parole divine, une éternelle société. Et nous, misérables mortels, nous dédaignerons cette parole puissante, cette parole féconde, cette parole qui crée les saints comme elle a créé l'univers; nous nous lasserons de parler à Dieu la langue de Dieu!

Chrétiens qui lisez ceci, nous attendons de vous de meilleures choses, et plus voisines du salut, encore que nous parlions ainsi (1). En vous offrant le livre qui contient cette parole divine, le livre de l'Église, le recueil précieux des prières qu'elle adresse pour vous au Seigneur, nous avons cette confiance en JésusChrist, que vous le recevrez avec respect, car ce n'est pas un don de l'homme; et le méditerez avec amour, car l'amour seul vous le rendra profitable. Prenez et goûtez combien le Seigneur est doux (2). Mangez, ô mes amis ! buvez, enivrez-vous, mes bien-aimés (3); enivrez-vous d'amour, de cet amour pur qui ravit le cœur du chrétien, et commence dès ici-bas son immortelle béatitude !

(1) Epist. ad Hebr., IV, 9. (2) Ps. XXXIII, 9.

(3) Cant., V, 1.

SUR

LES PÈRES DE L'ÉGLISE.

Il n'est personne qui n'ait entendu parler des Pères de l'Église la chaire retentit de leurs noms ; les chrétiens sont, dès l'enfance, habitués à les révérer. D'où vient donc qu'on les lit si peu? Est-ce qu'ils manquent des qualités qui rendent l'instruction tout ensemble et solide et attachante? Non; sous ces deux rapports, ils n'ont point été surpassés : mais la plupart de leurs ouvrages ou ne sont pas traduits, ou le sont mal; quelques uns traitent de questions importantes à l'époque où elles étoient agitées, mais aujourd'hui de très peu d'intérêt pour les simples fidèles, que rien n'oblige à faire une étude particulière de la théologie. D'ailleurs les grands écrivains religieux qui ont paru dans les derniers siècles, nourris de la lecture des Pères, ont reproduit sous de nouvelles formes les beautés de tout genre qu'on admire dans leurs écrits. On a dès-lors négligé de recourir à la source même, et c'est un malheur; car cette source, aussi pure que féconde, est loin d'être épuisée.

On a donc cru faire une chose utile en choisissant dans les Pères une suite de morceaux qui formassent comme un cours abrégé de doctrine et de morale chrétienne. Ces morceaux, traduits avec soin, don

neront une légère idée du mérite propre aux ouvra-
ges d'où ils sont tirés ; et peut-être qu'en les compa-
rant aux passages de Bossuet même et de Fénélon
qu'on y a joints, on reconnoîtra que non seulement
ils ne sont pas effacés par ce redoutable voisinage,
mais
que pour la justesse et la force du raisonne-
ment, l'élévation des pensées, la chaleur des mouve-
mens, l'heureuse abondance des images, les Pères
n'ont rien à envier à leurs successeurs, et qu'on
pourroit 'quelquefois en lisant ceux-ci regretter une
certaine simplicité mâle et naïve, une vigueur entraî-
nante, un naturel exquis, en un mot je ne sais quelle
fleur virginale de christianisme qui semble n'appar-
tenir qu'aux premiers siècles de la religion.

Les Pères vivoient à l'époque de la décadence des
lettres ; et cette décadence, qu'ils retardèrent seuls,
est à peine sensible dans les ouvrages de plusieurs
d'entre eux. Un goût délicat peut sans doute y dé-
couvrir quelques taches, ce qui n'empêche pas qu'ils
ne soutiennent avantageusement le parallèle avec
les chefs-d'œuvre de l'antiquité profane; et si l'on
veut juger de la puissance de la parole par ses ef-
fets, c'étoit certes une belle éloquence que
celle qui

a sauvé le monde.

:

Deux caractères surtout la distinguent une tendresse pénétrante qu'on a nommée onction, et une foi vive qui se communique, et triomphe de toutes les résistances de l'esprit. On est persuadé, entraîné par la conviction de l'écrivain et par le désir de convaincre que l'on sent dans tous ses discours. Ce n'est

pas un rhéteur qui disserte pour éblouir; c'est un ami qui vous entretient avec une émotion profonde de vos plus grands intérêts, et dont le bonheur seroit d'assurer le vôtre. Ce qu'il dit remue le cœur, parce qu'il part du cœur. Sa voix a des accens qui étonnent l'âme et qui la ravissent, une grâce attirante, une douceur dont le charme céleste peut à peine se comprendre, et ne sauroit être peint. Que voyez-vous presque toujours dans les orateurs que l'antiquité nous vante? l'orgueil s'efforçant de vaincre et de se soumettre les esprits. Ici c'est un homme qui s'abbaisse, qui s'humilie, qui prie, qui conjure; et pour qui ? pour ceux-mêmes à qui s'adressent ces pressantes supplications, content d'être oublié pourvu qu'il les sauve. On ne connoissoit avant le christianisme rien de semblable. Considérez ces sublimes docteurs d'une religion sublime: Dieu est le fond de toutes leurs pensées et de tous leurs sentimens. Plongés dans son immense lumière et dans son amour immense leur parole ardente, et néanmoins calme, éclaire à la fois et féconde comme celle du Créateur. Tous les secrets du temps et de l'éternité leur sont connus. Ils dévoilent l'homme à l'homme, en l'élevant jusque dans le sein de l'Être de qui émanent tous les êtres. Ils développent à ses yeux les lois de sa nature, ses devoirs, ses destinées; ils lui expliquent ce que jamais il ne comprendroit de lui-même, sa grandeur, sa bassesse, les contradictions mystérieuses de son esprit. et de son cœur, la cause de ses maux et leur remède. Que les philosophes, près d'eux, sont petits! que

leur sagesse est vaine ! Qu'il y a loin des disciples de Socrate et de Zénon aux disciples de Jésus-Christ! Les premiers, se séparant de la tradition générale, et s'appuyant sur leur raison seule, nièrent successivement toutes les vérités. Flollant à tout vent de doctrine, se combattant les uns les autres au milieu des ténèbres; toujours doutant, toujours détruisant ; après avoir ébranlé le monde moral par leurs désolantes opinions, ils en auroient consommé la ruine si Dieu lui-même n'étoit venu le replacer sur sa base.

Les seconds, au contraire, unis par la même foi, enseignent de siècle en siècle une doctrine immuable. Elle n'est point à eux, mais à tous les hommes; ils ne l'ont point inventée, ils l'ont reçue pour la transmettre fidèlement comme un dépôt sacré (1) : et traitant des plus hautes questions, de Dieu et de sa nature, de l'homme et de ses devoirs, des lois universelles, de l'ordre, du monde présent et du monde à venir, ils semblent n'avoir qu'une seule pensée, tant l'accord qui règne entre eux est parfait ! et c'est que tous étoient instruits par cet esprit un, cet esprit divin, qui devoit, aux momens fixés, remplir et renouveler la terre (2).

On sera, je crois, frappé de cette observation en lisant les morceaux qui composent ce recueil. Et qu'y a-t-il en effet de plus merveilleux que cette unité d'enseignement et de foi conservée, pendant

(1) Ep. I ad Timoth., VI, 20. (2) Sap., 1, 7; et Ps., CIII.

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