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Si les plaisirs des sens saisissent mon amour, Ce qui peut les flatter m'occupe nuit et jour; Si j'aime de l'esprit la parfaite science, Je fais mon entretien de tout ce qui l'avance; Enfin tout ce que j'aime et tout ce qui me plaît Me tient comme enchaîné par un doux intérêt, J'en parle avec plaisir, avec plaisir j'écoute Tout ce qui peut m'instruire à marcher dans sa route, Et j'emporte chez moi l'image avec plaisir De tout ce qui chatouille et pique mon désir. Qu'heureux est donc, ô Dieu, celui dont l'âme pure Bannit, pour t'aimer seul, toute la créature, Qui se fait violence, et n'osant s'accorder Rien de ce que lui-même aime à se demander, De la chair et des sens tellement se défie, Qu'à force de ferveur l'esprit les crucifie! C'est ainsi qu'en son cœur rétablissant la paix, Sur le mépris du monde élevant ses souhaits, Il t'offre une oraison, il t'offre des louanges Dignes de se mêler à celles de tes Anges, Puisqu'en lui ton amour par ses divins transports Étouffe le terrestre et dedans et dehors.

de adversitatibus ejus tristor; si carnem diligo, quæ carnis sunt sæpe imaginor; si spiritum amo, de spiritualibus cogitare delector : quæcumque enim diligo, de his libenter loquor et audio, atque talium imagines mecum ad domum reporto. Sed beatus ille homo, qui propter te, Domine, omnibus creaturis licentiam abeundi tribuit, qui naturæ vim facit, et concupiscentias carnis fervore spiritus crucifigit; ut, serenata conscientia, puram tibi orationem offerat, dignusque sit angelicis interesse choris, omnibus terrenis foris et intus exclusis.

CHAPITRE XLIX.

DU DÉSIR DE LA VIE ÉTERNELLE, ET COMBIEN D'AVANTAGES SONT PROMIS A CEUX QUI COMBATTENT.

1. LORSQUE tu sens, mon fils, s'allumer dans ton cœur Un désir amoureux de la béatitude,

Qu'il soupire après moi d'une douce langueur
Pour me voir sans ombrage et sans vicissitude;
Quand tu le sens pousser d'impatients transports
Pour se voir affranchi de la prison du corps,
Et contempler de près mes clartés infinies;
Ouvre ton âme entière à cette ambition,
Et porte de ce cœur les forces réunies
A ce que veut de toi cette inspiration.

Surtout, quand tu reçois cet amoureux désir,
Souviens-toi de m'en rendre un million de grâces,
A moi dont la bonté daigne ainsi te choisir,
Te daigne ainsi tirer d'entre les âmes basses;
C'est moi dont la clémence abaisse ma grandeur
Jusqu'à te visiter, et faire cette ardeur

Qui jusque dans ton sein de là-haut s'est coulée ;
C'est moi qui jusqu'à moi t'élève et te soutiens,

CAP. XLIX. 1. CHR. Fili, quum tibi desiderium æternæ beatitudinis desuper infundi sentis, et de tabernaculo corporis exire concupiscis, ut claritatem meam sine vicissitudinis umbra contemplari possis; dilata cor tuum, et omni desiderio hanc sanctam inspirationem suscipe. Redde amplissimas supernæ bonitati gratias, quæ tecum sic dignanter agit, clementer visitat, ardenter excitat, potenter sublevat ne proprio pondere ad terrena labaris: neque enim hoc cogitatu tuo aut conatu

De peur que par ton poids ton âme ravalée
N'embrasse, au lieu de moi, la terre dont tu viens.

Ni tes efforts d'esprit, ni ceux de ta ferveur,
N'enfantent ce désir qu'il me plaît de produire;
Il est un pur effet de ma haute faveur,

De mon aspect divin qui sur toi daigne luire:
Sers-t'en pour t'avancer avec facilité

Au chemin des vertus et de l'humilité ;

Fais qu'aux plus grands combats sans peine il te prépare;
Fais que jusqu'en mon sein il te puisse ravir,
Qu'il t'y puisse attacher sans que rien t'en sépare,

Ni refroidisse en toi l'ardeur de me servir.

2. Le feu brûle aisément, mais il est malaisé
Que sa pointe aille haut sans un peu de fumée;
Ainsi de quelques-uns le zèle est embrasé
En qui l'impureté n'est pas bien consumée.
Un reste mal détruit de leurs engagements
Attiédit la chaleur des bons élancements
Sous les tentations que la chair leur suggère ;
Et ces vœux qu'à toute heure ils m'offrent en tribut
Ne sont pas tous conçus purement pour me plaire,
N'ont pas tous mon honneur pour leur unique but.

Les tiens même, les tiens, dont l'importunité
Avec tant de chaleur souvent me sollicite,

accipis, sed sola dignatione supernæ gratiæ et divini respectus ; quatenus in virtutibus et majori humilitate proficias, et ad futura certamina te præpares, mihique toto cordis affectu adhærere, ac ferventi voluntate studeas deservire.

2. Fili, sæpe ignis ardet, sed sine fumo flamma non ascendit: sic et aliquorum desideria ad cœlestia flagrant, et tamen a tentatione carnalis affectus liberi non sunt; idcirco nec omnino pure pro honore Dei

Et presse les effets de ma bénignité

Par le sincère aveu de ton peu de mérite;

Tes vœux, dis-je, souvent, sans s'en apercevoir,
Couvrant ton intérêt de cet humble devoir,
Cherchent ta propre joie, aussi-bien que ma gloire;
Et ce peu qui s'y joint de propre affection
Leur imprime aussitôt une tache assez noire
Pour les tenir bien loin de la perfection.

3. Demande donc, mon fils, demande fortement, Non ce qui t'est commode et te doit satisfaire,

Mais un succès

pour

moi,

mais un événement
Qui me soit glorieux et digne de me plaire.
Si d'un esprit bien sain tu sais régler tes vœux,
Tu sauras les soumettre à tout ce que je veux,
Sans rien considérer de ce que tu désires,
Et préférer si bien mon ordre à ton désir,
Que tu ne parles plus, ni penses, ni respires
Que pour suivre le choix de mon seul bon plaisir.

Je sais de ce désir quel est le digne objet,
A gémir si souvent je vois ce qui t'engage
Et comme tes soupirs ne vont pas sans sujet,
J'entends du haut du ciel leur plus secret langage:
Un dédain de la terre, une sainte fierté,

agunt, quod tam desideranter ab eo petunt. Tale est et tuum sæpe desiderium, quod insinuasti fore tam importunum; non enim est hoc purum et perfectum quod propria commoditate est infectum.

3. Pete, non quod tibi est delectabile et commodum, sed quod mihi est acceptabile atque honorificum; quia, si recte judicas, meam ordinationem tuo desiderio et omni desiderato præferre debes, ac sequi. Novi desiderium tuum, et frequentes gemitus audivi. Jam velles esse in libertate gloriæ filiorum Dei; jam te delectat domus æterna et cœ

Te voudroient déjà voir dans cette liberté
Qu'assure à mes élus le séjour de la gloire;
Il charme ton esprit ici-bas captivé,

Et sera quelque jour le prix de ta victoire ;
Mais le temps, ô mon fils! n'en est pas arrivé.

Avant ce temps heureux un autre est à

passer, Un temps tout de combats, et tout d'inquiétudes Un temps où les travaux ne doivent point cesser ; Un temps plein de malheurs, et d'épreuves bien rudes: Tu languis cependant, et tes ardents souhaits Pour le bien souverain, pour la céleste paix, Ont une impatience, ont une soif extrême : Tu ne peux pas si tôt atteindre où tu prétends; Prie, espère, attends-moi, je suis ce bien suprême, Mais mon royaume enfin ne viendra qu'en son temps.

4. Il faut encore en terre éprouver ta vertu; Il faut sous mille essais encor que tu soupires; Je saurai consoler ton esprit abattu,

Mais non pas à ton choix, ni tant que tu désires :
Montre un courage ferme à ce qui vient s'offrir,
Soit qu'il faille embrasser, soit qu'il faille souffrir
Des choses où tu sens la nature contraire;

Revêts un nouvel homme et dépouille le vieux,

lestis patria, gaudio plena : sed nondum venit hora ista; sed est adhuc aliud tempus, scilicet tempus belli, tempus laboris et probationis. Optas summo repleri bono, sed non potes hoc assequi modo. Ego sum; exspecta me, dicit Dominus, donec veniat regnum Dei.

4. Probandus es adhuc in terris, et in multis exercitandus. Consolatio tibi interdum dabitur, sed copiosa satietas non concedetur. Confortare igitur, et esto robustus (Josu. j, 6.) tam in agendo quam in patiendo naturæ contraria. Oportet te novum induere hominem, et in

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