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La vanité par là ne te doit point surprendre.

Le savoir t'est donné pour guide à moins faillir;
Il te donne lui-même un plus grand compte à rendre,
Et plus lieu de trembler que de t'enorgueillir.

Trouve à t'humilier même dans ta doctrine :
Quiconque en sait beaucoup en ignore encor plus,
Et qui sans se flatter en secret s'examine
Est de son ignorance heureusement confus.

Quand pour quelques clartés dont ton esprit abonde
Ton orgueil à quelque autre ose te préférer,
Vois qu'il en est encor de plus savants au monde,
Qu'il en est que le ciel daigne mieux éclairer.

Fuis la haute science, et cours après la bonne;
Apprends celle de vivre ici-bas sans éclat;
Cherche à n'être connu, s'il se peut, de personne,
Ou du moins aime à voir qu'aucun n'en fasse état.

4. Cette unique leçon, dont le parfait usage
Consiste à se bien voir et n'en rien présumer,
Est la plus digne étude où s'occupe le sage
Pour estimer tout autre, et se mésestimer.

Si tu vois donc un homme abîmé dans l'offense,
Ne te tiens pas plus juste ou moins pécheur que lui :

intelligis, scito tamen quia sunt multo plura quæ nescis. Noli altum sapere (Rom. xj, 20.): sed ignorantiam tuam magis fatere. Quid te vis alicui præferre, quum plures doctiores te inveniantur et magis in lege periti? Si vis utiliter aliquid scire et discere, ama nesciri et pro nihilo reputari.

4. Hæc est altissima et utilissima lectio, sui ipsius vera cognitio et despectio. De se ipso nihil tenere et de aliis semper bene et alte sentire, magna sapientia est et perfectio. Si videres alium aperte peccare vol

Tu peux en un moment perdre ton innocence,
Et n'être pas demain le même qu'aujourd'hui.

Souvent l'esprit est foible et les sens indociles,
L'amour-propre leur fait ou la guerre ou la loi ;
Mais bien qu'en général nous soyons tous fragiles,
Tu n'en dois croire aucun si fragile que toi.

I.

CHAPITRE III.

DE LA DOCTRINE DE LA VÉRITÉ.

QU'HEUREUX

U'HEUREUX est le mortel que la vérité même Conduit de sa main propre au chemin qui lui plaît, Et se montre à ses yeux dans sa beauté suprême, Sans voile et sans emblême,

Et telle enfin qu'elle est!

Nos sens sont des trompeurs dont les fausses images
A notre entendement n'offrent rien d'assuré,
Et ne lui font rien voir qu'à travers cent nuages
Qui jettent mille ombrages

Dans l'œil mal éclairé.

aliqua gravia perpetrare, non deberes te tamen meliorem æstimare, quia nescis quam diu possis in bono stare. Omnes fragiles sumus; sed tu neminem fragiliorem te ipso tenebis.

CAP. III. 1. Felix quem Veritas per se docet, non per figuras et voces transeuntes, sed sicuti se habet! Nostra opinio et noster sensus sæpe nos fallit, et modicum videt. Quid prodest magna cavillatio de occultis et obscuris rebus, de quibus nec arguemur in judicio quia ignoravimus? Grandis insipientia, quod, neglectis utilibus et necessariis, ultro intendimus curiosis et damnosis. Oculos habentes non videmus.

De quoi sert une longue et subtile dispute
Sur des obscurités où l'esprit est déçu?

De quoi sert qu'à l'envi chacun s'en persécute,
Si Dieu jamais n'impute

De n'en avoir rien su?

2. Grande

perte de temps et plus grande foiblesse
De s'aveugler soi-même et quitter le vrai bien
Pour consumer sa vie à pointiller sans cesse
Sur le genre et l'espèce,

Qui ne servent à rien..

Touche, Verbe éternel, ces âmes curieuses;
Celui que ta parole une fois a frappé,
De tant d'opinions vaines, ambitieuses,
Et souvent dangereuses,

Est bien développé.

Ce Verbe donne seul l'être à toutes les causes;
Il nous parle de tout, tout nous parle de lui;
Il tient de tout en soi les natures encloses;
Il est de toutes choses

Le principe et l'appui.

Aucun sans son secours ne sauroit se défendre
D'un million d'erreurs qui courent l'assiéger;

2. Et quid curæ nobis de generibus et speciebus? Cui æternum Verbum loquitur, a multis opinionibus expeditur. Ex uno Verbo omnia, et unum loquuntur omnia; et hoc est Principium quod et loquitur nobis. (Joan. viij, 25.) Nemo sine illo intelligit aut recte judicat. Cui omnia unum sunt, et omnia ad unum trahit, et omnia in uno videt, potest stabilis corde esse et in Deo pacificus permanere. O veritas Deus! fac me unum tecum in caritate perpetua! Tædet me sæpe multa legere et audire; in te est totum quod volo et desidero. Taceant omnes doctores, sileant universæ creaturæ in conspectu tuo; tu mibi loquere solus.

Et depuis qu'un esprit refuse de l'entendre,
Quoi qu'il pense comprendre,
Il n'en peut bien juger.

Mais qui rapporte tout à ce Verbe immuable,
Qui voit tout en lui seul, en lui seul aime tout,
A la plus rude attaque il est inébranlable,
Et son cœur ferme et stable

En vient soudain à bout.

O Dieu de vérité, pour qui seul je soupire,
Unis-moi donc à toi par de forts et doux nœuds:
Je me lasse d'ouïr, je me lasse de lire,

Mais non pas de te dire,

C'est toi seul que je veux.

Parle seul à mon âme, et qu'aucune prudence,
Qu'aucun autre docteur ne m'explique tes lois;
Que toute créature à ta sainte présence

S'impose le silence

Et laisse agir ta voix.

3. Plus l'esprit se fait simple et plus il se ramène Dans un intérieur dégagé des objets,

Plus lors sa connoissance est diffuse et certaine,
Et s'élève sans peine

Jusqu'aux plus hauts sujets.

3. Quanto aliquis magis sibi unitus et interius simplificatus fuerit, tanto plura et altiora sine labore intelligit, quia desuper lumen intelligentiæ accipit. Purus, simplex, et stabilis spiritus in multis operibus non dissipatur ; quia omnia ad Dei honorem operatur, et in se otiosus ab omni propria exquisitione esse nititur. Quis te magis impedit et molestat quam tua immortificata affectio cordis ? Bonus et devotus homo opera

Oui, Dieu prodigue alors ses grâces plus entières,
Et portant notre idée au-dessus de nos sens,

Il nous donne d'en haut d'autant plus de lumières,
Qui percent les matières

Par des traits plus puissants.

Cet esprit simple, uni, stable, pur, pacifique,
En mille soins divers n'est jamais dissipé,

Et l'honneur de son Dieu, dans tout ce qu'il pratique,
Est le projet unique

Qui le tient occupé.

Il est toujours en soi détaché de soi-même;
Il ne sait point agir quand il se faut chercher;
Et, fût-il dans l'éclat de la grandeur suprême,
Son propre diadème

Ne l'y peut attacher.

Il ne croit trouble égal à celui que se cause
Un cœur qui s'abandonne à ses propres transports;
Et, maître de soi-même, en soi-même il dispose
Tout ce qu'il se propose

De produire au dehors.

Bien loin d'être emporté par le courant rapide
Des flots impétueux de ses bouillants désirs,
Il les domte, il les rompt, il les tourne, il les guide;
Et donne ainsi pour bride

La raison aux plaisirs.

sua prius intus disponit quæ foris agere debet: nec illa trahunt eum ad desideria vitiosæ inclinationis, sed ipse inflectit ea ad arbitrium recta rationis. Quis habet fortius certamen, quam qui nititur vincere se ipsum? Et hoc deberet esse negotium nostrum; vincere videlicet se ipsum, et quotidie se ipso fortiorem fieri, atque in melius aliquid proficere.

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