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Tu sens une révolte en ton cœur mutiné
Contre la patience où tu l'as condamné.
Lâche, qu'oses-tu dire? ainsi le purgatoire,

Ainsi ses feux cuisants sont hors de ta mémoire !
Auras-tu plus de force? ou les présumes-tu

Plus aisés à souffrir à ce cœur abattu?

Apprends que de deux maux il faut choisir le moindre,
Que tes soins en ce but se doivent tous rejoindre,
Et que pour éviter les tourments éternels

Tu dois traiter tes sens d'infàmes criminels,
Braver leurs appétits, leur imposer des gênes,
Préparer ta constance aux misères humaines,
Les souffrir sans murmure, et recevoir les croix
Ainsi que des faveurs qui viennent de mon choix.
Crois-tu les gens du monde exempts d'inquiétude?
Ne vois-tu rien pour eux ni d'amer ni de rude?
Va chez ces délicats qui n'ont soin que d'unir
Le choix des voluptés aux moyens d'y fournir;
Si tu crois y trouver des roses sans épines,
Tu n'y trouveras point ce que tu t'imagines.

3. Mais ils suivent, dis-tu, leurs inclinations; Leur seule volonté règle leurs actions,

Et l'excès des plaisirs en un moment consume
Ce peu qui par hasard s'y coule d'amertume.

multis contrarietatibus probatus. Si dixeris te non posse multa pati, quomodo tunc sustinebis ignem Purgatorii? De duobus malis minus est semper eligendum: ut ergo æterna futura supplicia possis evadere, mala præsentia studeas pro Deo æquanimiter tolerare. An putas quod homines seculi hujus nihil vel parum patiantur? nec hoc invenies, etiamsi delicatissimos quæsieris.

3. Sed habent, inquis, multas delectationes, et proprias sequuntur voluntates, ideoque parum ponderant suas tribulationes.

4. Et bien soit, je le veux, ils ont tout à souhait ; Mais combien doit durer un bonheur si parfait?

Ces riches, que du siècle adore l'imprudence,
Passent comme fumée avec leur abondance,
Et de leurs voluptés le plus doux souvenir,
S'il ne passe avec eux, ne sert qu'à les punir.
Celles que leur permet une si triste vie

Sont dignes de pitié beaucoup plus que d'envie;
Elles vont rarement sans mélange d'ennuis;

Leurs jours les plus brillants ont les plus sombres nuits;
Souvent mille chagrins empoisonnent leurs charmes,
Souvent mille terreurs y jettent mille alarmes,
Et souvent des objets d'où naissent leurs plaisirs
Ma justice en courroux fait naître leurs soupirs:
L'impétuosité qui les porte aux delices
Elle-même à leur joie enchaîne les supplices,
Et joint aux vains appas d'un peu d'illusion
Le repentir, le trouble et la confusion.

Toutes ces voluptés sont courtes et menteuses,
Toutes n'ont que désordre, et toutes sont honteuses:
Les hommes cependant n'en aperçoivent rien;
Enivrés qu'ils en sont, ils en font tout leur bien;
Ils suivent en tous lieux, comme bêtes stupides,

4. Esto, ita sit ut habeant quidquid voluerint; sed quamdiu, putas, durabit? Ecce, quemadmodum fumus deficient (Ps. xxxvj, 20.) abundantes in seculo, et nulla erit recordatio præteritorum gaudiorum: sed et, quum adhuc vivunt, non sine amaritudine, et tædio, ac timore in eis quiescunt. Ex eadem namque re unde sibi delectationem concipiunt, inde doloris pœnam frequenter recipiunt. Juste illis fit ut, quia inordinate delectationes quærunt et sequuntur, non sine confusione et amaritudine eas expleant. O quam breves, quam falsæ, quam inordinatæ et turpes omnes sunt! Verumtamen præ ebrietate et cæcitate non intelligunt; sed velut muta animalia, propter modicum corruptibilis vitæ delectamentum, mortem animæ incurrunt. Tu ergo, Fili, post

Leurs sens pour souverains, leurs passions pour guides;
Et pour l'indigne attrait d'un faux chatouillement,
Pour un bien passager, un plaisir d'un moment,
Amoureux d'une vie ingrate et fugitive,

Ils acceptent pour l'âme une mort toujours vive,
Où, mourant à toute heure, et ne pouvant mourir,
Ils ne sont immortels que pour toujours souffrir.

Plus sage à leurs dépens, donne moins de puissance
Aux brutales fureurs de ta concupiscence,
Garde-toi de courir après les voluptés,

Captive tes désirs, brise tes volontés,

Mets en moi seul ta joie, et m'en fais une offrande,
Et je t'accorderai ce que ton cœur demande.

5. Oui, ce cœur ainsi libre, ainsi désabusé,
Ne peut, quoi qu'il demande, en être refusé;
Et si tu veux goûter des plaisirs veritables,
Des consolations et pleines et durables,

Tu n'as qu'à dédaigner par un noble mépris
Cet éclat dont le monde éblouit tant d'esprits;
Tu n'as qu'à t'arracher à ces voluptés basses
Qui repoussent des cœurs les effets de mes grâces;

concupiscentias tuas non eas, et a voluntate tua avertere. (Eccli. xviij, 30.) Delectare in Domino, et dabit tibi petitiones cordis tui. (Ps. хххѵј, 4.)

5. Etenim si veraciter vis delectari et abundantius a me consolari : ecce in contemptu omnium mundanorum et in abscissione omnium infimarum delectationum erit benedictio tua, et copiosa tibi reddetur consolatio; et quanto te plus ab omni creaturarum solatio subtraxeris, tanto in me suaviores et potentiores consolationes invenies. Sed primo non sine quadam tristitia et labore certaminis ad has pertinges: obsistet inolita consuetudo, sed meliori consuetudine devincetur : remurmurabit

Tu n'as qu'à te soustraire à leur malignité,

Et je te rendrai plus que tu n'auras quitté ;
Plus à leurs faux attraits tu fermeras de portes,
Plus mes faveurs seront et charmantes et fortes;
Et moins la créature aura chez toi d'accès,

Et plus du Créateur les dons auront d'excès.

Ne crois pas toutefois sans peine et sans tristesse
A ce détachement élever ta foiblesse ;

Une vieille habitude y voudra résister,
Mais par une meilleure il faudra la domter;
Ta chair murmurera, mais de tout son murmure
La ferveur de l'esprit convaincra l'imposture;
Enfin le vieux serpent tâchera de t'aigrir

Contre les moindres maux que tu voudras souffrir;
Il fera mille efforts pour brouiller ta conduite;
Mais avec l'oraison tu le mettras en fuite,
Et l'obstination d'un saint et digne emploi
Ne lui laissera plus aucun pouvoir sur toi.

caro,

sed fervore spiritus frenabitur : instigabit et exacerbabit te serpens antiquus, sed oratione fugabitur; insuper et labore utili aditus ei magnus obstruetur.

CHAPITRE XIII.

DE L'OBÉISSANCE DE L'HUMBLE SUJET, A L'EXEMPLE DE JÉSUS-CHRIST.

QUICONQUE se dérobe à l'humble obéissance

Bannit ma grace en même temps,

Et se livre lui-même à toute l'impuissance
De ses désirs vains et flottants:

Ces dévots indiscrets dont le zèle incommode,
Pour les rendre Saints à leur mode,

Leur forme une conduite et fait des lois à part,
Au lieu de s'avancer par un secret mérite,
Perdent ce qu'en commun dans la règle on profite
A force de vivre à l'écart.

Qui n'obéit qu'à peine, et dans l'âme s'attriste
Des ordres d'un supérieur,

Fait bien voir que sa chair à son tour lui résiste
Par un murmure intérieur;

Qu'il est mal obéi par cette vaine esclave,
Qui se révolte, qui le brave,

Et n'est jamais d'accord de ce qu'il lui prescrit :
Obéis donc toi-même et tôt et sans murmure,

CAP. XIII. 1. CHR. Fili, qui se subtrahere nititur ab obedientia, ipse se subtrahit a gratia ; et qui quærit habere privata, amittit communia: qui non libenter et sponte suo superiori se subdit, signum est quod caro sua necdum perfecte sibi obedit, sed sæpe recalcitrat et remurmurat. Disce ergo celeriter superiori tuo te submittere, si carnem propriam optas subjugare. Citius namque exterior vincitur inimicus,

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