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Qu'il faut beaucoup de grâce à porter la nature
Jusqu'à ce haut degré de la perfection.

3. Je te le dis encore, il est parmi le monde
Des genres d'esprits bien divers :

Il en est qui dans eux ont une paix profonde,
Et sauroient la garder avec tout l'univers;

Il en est d'opposés, dont l'humeur inquiète
L'exile à jamais de chez eux,

Et ne peut consentir qu'un autre se promette
Un bonheur si contraire au chagrin de leurs vœux.

Ceux-là partout à charge, et les vivants supplices
De qui se condamne à les voir,

Mais plus à charge encore à leurs propres caprices,
Se donnent plus de mal qu'ils n'en font recevoir.

D'autres aiment la paix, et n'ont d'inquiétude
Que pour s'y pouvoir maintenir,

Et d'autres sans relâche appliquent leur étude
A réduire quelque autre aux soins d'y parvenir.

Notre paix cependant n'est pas ce que l'on pense;
Et tant qu'il nous faut respirer

Elle consiste plus dans une humble souffrance,
Qu'à ne rien ressentir qu'il fàche d'endurer.

3. Sunt qui se ipsos in pace tenent, et cum aliis etiam pacem habent: et sunt qui nec pacem habent, nec alios in pace dimittunt; aliis sunt graves, sed sibi semper graviores: et sunt qui se ipsos in pace retinent, et ad pacem alios reducere student. Est tamen tota pax nostra, in hac misera vita, potius in humili sufferentia ponenda, quam in non sentiendo contraria. Qui melius scit pati majorem tenebit pacem iste est victor sui et dominus mundi, amicus CHRISTI et heres cœli.

Qui sait le mieux souffrir, c'est chez lui qu'elle abonde,
C'est lui qui la garde le mieux;

Il triomphe ici-bas de soi-même et du monde;
Et comme enfant de Dieu, son partage est aux cieux.

CHAPITRE IV.

DE LA PURETÉ DU COEUR, ET DE LA SIMPLICITÉ DE L'INTENTION.

1. POUR t'élever de terre, homme, il te faut deux ailes, La pureté du cœur et la simplicité;

Elles te porteront avec facilité

Jusqu'à l'abîme heureux des clartés éternelles ;
Celle-ci doit régner sur tes intentions,

Celle-là présider à tes affections,

Si tu veux de tes sens domter la tyrannie:
L'humble simplicité vole droit jusqu'à Dieu,
La pureté l'embrasse, et l'une à l'autre unie
S'attache à ses bontés, et les goûte en tout lieu.

Nulle bonne action ne te feroit de peine
Si tu te dégageois de tous déréglements;
Le désordre insolent des propres sentiments
Forme tout l'embarras de la foiblesse humaine.
Ne cherche ici qu'à plaire à ce grand Souverain,

CAP. IV. 1. Duabus alis homo sublevatur a terrenis, simplicitate scilicet et puritate. Simplicitas debet esse in intentione; puritas, in affectione simplicitas intendit Deum, puritas apprehendit et gustat. Nulla bona actio te impediet, si liber intus ab inordinato affectu fueris. Si nihil aliud quam Dei beneplacitum, et proximi utilitatem intendis et

N'y cherche qu'à servir après lui ton prochain,
Et tu te verras libre au-dedans de ton âme;
Tu seras au-dessus de ta fragilité

Et n'auras plus de part à l'esclavage infâme
Où par tous autres soins l'homme est précipité.

Si ton cœur étoit droit, toutes les créatures
Te seroient des miroirs et des livres ouverts,
Où tu verrois sans cesse en mille lieux divers
Des modèles de vie et des doctrines pures;
Toutes comme à l'envi te montrent leur Auteur:
Il a dans la plus basse imprimé sa hauteur,
Et dans la plus petite il est plus admirable;
De sa pleine bonté rien ne parle à demi,
Et du vaste éléphant la masse épouvantable
Ne l'étale pas mieux que la moindre fourmi.

2. Purge l'intérieur, rends-le bon et sans tache, Tu verras tout sans trouble et sans empêchement, Et tu sauras comprendre, et tôt et fortement,

Ce

que des passions le voile épais te cache.
Au cœur bien net et pur l'âme prête des yeux
Qui pénètrent l'enfer, et percent jusqu'aux cieux;
Il voit tout comme il est, et jamais ne s'abuse:
Mais le cœur mal purgé n'a que les yeux du corps;

quæris, interna libertate perfrueris. Si rectum cor tuum esset, tunc omnis creatura speculum vitæ, et liber sanctæ doctrinæ esset. Non est creatura tam parva et vilis, quæ Dei bonitatem non repræsentet.

2. Si tu esses intus bonus et purus, tunc omnia sine impedimento videres, et bene caperes. Cor purum penetrat cœlum et infernum. Qualis unusquisque intus est, taliter judicat exterius. Si est gaudium in mundo, hoc utique possidet puri cordis homo: et si est alicubi tribu

Toute sa connoissance ainsi qu'eux est confuse;
Et tel qu'il est dedans, tel il juge au dehors.

Certes, s'il est ici quelque solide joie,
C'est ce cœur épuré qui seul la peut goûter;

Et s'il est quelque angoisse au monde à redouter,
C'est dans un cœur impur qu'elle entre et se déploie.
Dépouille donc le tien de ce qui l'a souillé,

Et vois comme le fer par le feu dérouillé

Prend une couleur vive au milieu de la flamme:
D'un plein retour vers Dieu c'est là le vrai tableau ;
Son feu sait dissiper les pesanteurs de l'âme,

Et faire du vieil homme un homme tout nouveau.

3. Quand ce feu s'alentit, soudain l'homme appréhende Jusqu'au moindre travail, jusqu'aux moindres efforts, Et souffre avec plaisir les douceurs du dehors, Quelques piéges secrets que ce plaisir lui tende; Mais alors qu'il commence à triompher de soi, Qu'il choisit Dieu pour maître et pour unique roi Que dans sa sainte voie il marche avec courage, Le travail le plus grand ne l'en peut épuiser, Plus il se violente, et plus il se soulage,

Et ce qui l'accabloit cesse de lui peser.

latio et angustia, hoc melius novit mala conscientia. Sicut ferrum missum in ignem amittit rubiginem, et totum candens efficitur, sic homo integre ad Deum se convertens a torpore exuitur, et in novum hominem transmutatur.

3. Quando homo incipit tepescere, tunc parvum metuit laborem, et libenter externam accipit consolationem. Sed quando perfecte incipit se vincere, et viriliter in via Dei ambulare, tunc minus ea reputat quæ sibi prius gravia esse sentiebat.

I.

CHAPITRE V.

DE LA CONSIDÉRATION DE SOI-MÊME.

NE nous croyons pas trop ; souvent nos connoissances

Ne sont enfin qu'illusions,

Souvent la grâce y manque, et toutes nos puissances
N'ont que de fausses visions.

Nous avons peu de jour à discerner la feinte
D'avec la pure vérité,

Et sa foible lumière est aussitôt éteinte
Par notre indigne lâcheté.

L'homme aveugle au dedans rarement se défie
De cet aveuglement fatal,

Et quelque mal qu'il fasse, il ne s'en justifie
Qu'en s'excusant encor plus mal.

Souvent, tout ébloui d'une vaine étincelle
Qui brille en sa dévotion,

Il impute à l'ardeur d'un véritable zèle
Les chaleurs de sa passion.

Comme partout ailleurs il porte une lumière
Qui chez lui n'éclaire pas bien,

CAP. V. 1. Non possumus nobis ipsis nimis credere, quia sæpe gratia nobis deest et sensus. Modicum lumen est in nobis, et hoc cito per negligentiam amittimus. Sæpe etiam non advertimus quod tam cæci intus sumus. Sæpe male agimus, et pejus excusamus. Passione interdum movemur, et zelum putamus. Parva in aliis reprehendimus, et nostra

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