Retournez au village: adieu. Si de ma vie Je vous rappelle, et qu'il m'en prenne envie, Puissé-je chez les morts avoir, pour mes péchés, Deux femmes comme vous sans cesse à mes côtés! FABLE III. Le Rat qui s'est retiré du monde. LES Lévantins en leur légende Disent qu'un certain rat, las des soins d'ici-bas, Dans un fromage de Hollande Se retira loin du tracas. La solitude étoit profonde, S'étendant par-tout à la ronde. Notre hermite nouveau subsistoit là-dedans. Qu'en peu de jours il eut au fond de l'hermitage S'en vinrent demander quelque aumône légère: Ils alloient en terre étrangère Chercher quelque secours contre le peuple chat; On les avoit contraints de partir sans argent, De la république attaquée. Ils demandoient fort peu, certains que le Seroit prêt dans quatre ou cinq jours. Mes amis, dit le solitaire, Les choses d'ici-bas ne me regardent plus: En quoi peut un pauvre reclus Vous assister? que peut-il faire secours Que de prier le ciel qu'il vous aide en ceci? Le nouveau saint ferma sa porte. Qui désigné-je, à votre avis, Un moine? Non, mais un dervis : Je suppose qu'un moine est toujours charitable. FABLE IV. Le Héron. Un jour, L'onde étoit transparente ainsi qu'aux plus beaux jours; Le héron en eût fait aisément son profit: Tous approchoient du bord; l'oiseau n'avoit qu'à prendr Qu'il eût un peu plus d'appétit : Des tanches qui sortoient du fond de ces demeures. Comme le rat du bon Horace: Moi, des tanches! dit-il; moi, héron, que je fasse Du goujon! c'est bien là le dîner d'un héron! La faim le prit : il fut tout heureux et tout aise Ne soyons pas si difficiles: Les plus accommodants, ce sont les plus habiles; Sur-tout quand vous avez à peu près votre compte. FABLE V. La Fille. CERTAINE fille, un peu trop fière, Prétendoit trouver un mari Jeune, bien fait et beau, d'agréable manière, Point froid et point jaloux : notez ces deux points-ci. Cette fille vouloit aussi Qu'il eût du bien, de la naissance, De l'esprit, enfin tout. Mais qui peut tout avoir? La belle les trouva trop chétifs de moitié: Quoi, moi! quoi, ces gens-là! l'on radote, je pense. L'un n'avoit en l'esprit nulle délicatesse; C'étoit tout, car les précieuses Font dessus tout les dédaigneuses. Elle de se moquer. Ah! vraiment je suis bonne Grace à Dieu, je passe les nuits Sans chagrin, quoiqu'en solitude. La belle se sut gré de tous ces sentiments. Puis cent sortes de fards. Ses soins ne purent faire |