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ibérienne. Sous leurs selles ornées d'ivoire s'étendait une housse de pourpre, et leurs mains, couvertes de gantelets, tenaient les rênes de soie qui leur servaient à guider de hautes cavales plus noires que la nuit.

Les archers crétois, les vélites romains et les différents corps des Gaulois étaient répandus sur le front de l'armée. L'instinct de la guerre est si naturel chez ces derniers, que souvent, dans la mêlée, les soldats deviennent des généraux, rallient leurs compagnons dispersés, ouvrent un avis salutaire, indiquent le poste qu'il faut prendre. Rien n'égale l'impétuosité de leurs attaques tandis que le Germain délibère, ils ont franchi les torrents et les monts; vous les croyez au pied de la citadelle, et ils sont au haut du retranchement emporté. En vain les cavaliers les plus légers voudraient les devancer à la charge, les Gaulois rient de leurs efforts, voltigent à la tête de leurs chevaux, et semblent leur dire « Vous saisiriez plutôt les vents sur la plaine, ou les oiseaux dans les airs. >>

Tous ces Barbares avaient la tête élevée, les couleurs vives, les yeux bleus, le regard farouche et menaçant; ils portaient de larges braies, et leur tunique était chamarrée de morceaux de pourpre ; un ceinturon de cuir pressait à leur côté leur fidèle épée. L'épée du Gaulois ne le quitte jamais mariée, pour ainsi dire, à son maître, elle l'accompagne pendant la vie, elle le suit sur le bûcher funèbre, et descend avec lui au tombeau. Tel était le sort qu'avaient jadis les épouses dans les Gaules, tel est celui qu'elles ont encore aux rivages de l'Indus.

Enfin, arrêtée comme un nuage menaçant sur le penchant d'une colline, une légion chrétienne, surnommée la Pudique, formait derrière l'armée le corps de réserve et la garde de César. Elle remplaçait auprès de Constance la légion thébaine égorgée par Maximien. Victor, illustre guerrier de Marseille, conduisait au combat les milices de cette religion qui porte aussi noblement le casque du vétéran que le cilice de l'anachorète.

Cependant l'œil était frappé d'un mouvement universel: on voyait les signaux du porte-étendard qui plantait le jalon des lignes, la course impétueuse du cavalier, les ondulations des soldats qui se nivelaient sous le cep du centurion. On entendait de toutes parts les grêles hennissements des coursiers, le cliquetis des chaînes, les sourds roulements des balistes et des catapultes, les pas réguliers de l'infanterie, la voix des chefs qui

répétaient l'ordre, le bruit des piques, qui s'élevaient et s'abaissaient au commandement des tribuns. Les Romains se formaient en bataille aux éclats de la trompette, de la corne et du lituus ; et nous, Crétois, fidèles à la Grèce au milieu de ces peuples barbares, nous prenions nos rangs au son de la lyre.

La

Parés de la dépouille des ours, des veaux marins, des urochs et des sangliers, les Francs se montraient de loin comme un troupeau de bêtes féroces. Une tunique courte et serrée laissait voir toute la hauteur de leur taille et ne leur cachait pas le genou. Les yeux de ces Barbares ont la couleur d'une mer orageuse; leur chevelure blonde retombant en avant sur leur poitrine, et teinte d'une liqueur rouge, est semblable à du sang et à du feu. plupart ne laissent croître leur barbe qu'au-dessus de la bouche, afin de donner à leurs lèvres plus de ressemblance avec le mufle des dogues et des loups. Les uns chargent leur main droite d'une longue framée, et leur main gauche d'un bouclier qu'ils tournent comme une roue rapide; d'autres, au lieu de ce bouclier, tiennent une espèce de javelot, nommé angon, où s'enfoncent deux fers recourbés; mais tous ont à la ceinture la redoutable francisque, espèce de hache à deux tranchants, dont le manche est recouvert d'un dur acier; arme funeste que le Franc jette en poussant un cri de mort, et qui manque rarement de frapper le but qu'un œil intrépide a marqué.

Ces Barbares, fidèles aux usages des anciens Germains, s'étaient formés en coin, leur ordre accoutumé de bataille. Le formidable triangle, où l'on ne distinguait qu'une forêt de framées, des peaux de bêtes et des corps demi-nus, s'avançait avec impétuosité, mais d'un mouvement égal, pour percer la ligne romaine. A la pointe de ce triangle étaient placés des braves qui conservaient une barbe longue et hérissée, et qui portaient au bras un anneau de fer. Ils avaient juré de ne quitter ces marques de servitude qu'après avoir sacrifié un Romain. Chaque chef, dans ce vaste corps, était environné des guerriers de sa famille, afin que, plus ferme dans le choc, il remportât la victoire ou mourût avec ses amis. Chaque tribu se ralliait sous un symbole. La plus noble d'entr'elles se distinguait par des abeilles ou trois fers de lance. Le vieux roi des Sicambres, Pharamond, conduisait l'armée entière, et laissait une partie du commandement à son petit-fils Mérovée. Les cavaliers francs, en face de la cavalerie romaine, couvraient les deux côtés de leur infanterie à leurs

:

casques en forme de gueules ouvertes ombragées de deux ailes de vautour, à leurs corselets de fer, à leurs boucliers blancs, on les eût pris pour des fantômes, ou pour ces figures bizarres que l'on aperçoit au milieu des nuages pendant la tempête. Clodion, fils de Pharamond et père de Mérovée, brillait à la tête de ces cavaliers menaçants.

Sur une grève, derrière cet essaim d'ennemis, on apercevait leur camp, semblable à un marché de laboureurs et de pêcheurs ; il était rempli de femmes et d'enfants, et retranché avec des bateaux de cuir et des chariots attelés de grands bœufs. Non loin de ce camp champêtre, trois sorcières en lambeaux faisaient sortir de jeunes poulains d'un bois sacré, afin de découvrir par leur course à quel parti Tuiston promettait la victoire. La mer d'un côté, des forêts de l'autre, formaient le cadre de ce grand tableau.

Le soleil du matin, s'échappant des replis d'un nuage d'or, verse tout à coup sa lumière sur les bois, l'Océan et les armées. La terre paraît embrasée du feu des casques et des lances; les instruments guerriers sonnent l'air antique de JulesCésar partant pour les Gaules. La rage s'empare de tous les cœurs; les yeux roulent du sang, la main frémit sur l'épée. Les chevaux se cabrent, creusent l'arène, secouent leur crinière, frappent de leur bouche écumante leur poitrine enflam-mée, ou lèvent vers le ciel leurs naseaux brûlants, pour respirer les sons belliqueux. Les Romains commencent le chant de Probus :

«Quand nous aurons vaincu mille guerriers francs, combien ne vaincrons-nous pas de millions de Perses! >>

Les Grecs répètent en cœur le Pœan, et les Gaulois l'hymne des druides. Les Francs répondent à ces cantiques de mort : ils serrent leurs boucliers contre leur bouche, et font entendre un mugissement semblable au bruit de la mer que le vent brise contre le rocher; puis tout à coup poussant un cri aigu, ils entonnent le bardit à la louange de leurs héros :

<< Pharamond! Pharamond! nous avons combattu avec l'épée. <« Nous avons lancé la francisque à deux tranchants; la sueur tombait du front des guerriers et ruisselait le long de leurs bras. Les aigles et les oiseaux aux pieds jaunes poussaient des cris de joie; le corbeau nageait dans le sang des morts, tout l'Océan n'était qu'une plaie les vierges ont pleuré longtemps! >>

<< Pharamond! Pharamond! nous avons combattu avec l'épée. «Nos pères sont morts dans les batailles, tous les vautours en ont gémi nos pères les rassasiaient de carnage! Choisissons des épouses dont le lait soit du sang, et qui remplissent de valeur le cœur de nos fils. Pharamond, le bardit est achevé, les heures de la vie s'écoulent: nous sourirons quand il faudra mourir. >>

Ainsi chantaient quarante mille Barbares. Leurs cavaliers haussaient et baissaient leurs boucliers blancs en cadence; et à chaque refrain ils frappaient du fer d'un javelot leur poitrine couverte de fer.1

M. DE CHATEAUBRIAND.

4) L'historien de la Conquête de l'Angleterre, M. Augustin Thierry, a pris plaisir à nous apprendre, dans la préface des Récits mérovingiens, que c'est la lecture de ce morceau qui lui a donné le sentiment de sa vocation. On peut aisément le croire. Pour écrire noblement l'histoire, il n'est pas inutile d'y avoir vu, d'y voir sans cesse l'épopée. L'œil de l'historien armé d'un regard épique, voit plus loin, voit mieux; le poëte a quelque chose à apprendre à l'historien, et même à l'historien philosophe. Le poëte n'est si grand que parce qu'il sait quelque chose de plus que le reste des hommes.

II.

BIOGRAPHIE S.

CHRYSOSTOME,

PAR M. VILLEMAIN.

M. VILLEMAIN, célèbre par ses connaissances littéraires et par la rare élégance de son style, s'est mis au rang de nos écrivains classiques par ses Mélanges littéraires (2 vol. in-8°), son Lascaris, son Essai sur l'histoire de la Grèce, et son Histoire de Cromwell (2 vol.). Nous tirons du premier de ces ouvrages la plus grande partie d'un essai sur la vie de Chrysostome.

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CHRYSOSTOME était né vers l'an 544 dans la ville d'Antioche. Il fut élevé dans la loi chrétienne par sa mère; il n'en suivit pas moins les leçons oratoires de Libanius, qui avait été l'ami de Julien, et qui lui survivait pour célébrer sa mémoire. Chrysostome a raconté que Libanius, apprenant de lui que sa mère était veuve depuis l'âge de vingt ans, et n'avait jamais voulu prendre un autre époux, s'écria, en se tournant vers son auditoire idolâtre : «O dieux de la Grèce, quelles femmes se trouvent parmi ces chrétiens! >>

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Le sophiste païen prit bientôt la plus vive admiration pour son jeune élève; il vit avec inquiétude, mais sans jalousie, s'élever près de lui ce dangereux adversaire de son culte ; peut-être espérait-il encore le séduire au paganisme par la vertu de ces fables d'Homère qu'il interprétait éloquemment à ses disciples.

4) La force, l'efficacité. <«< Si tu sais découvrir leur vertu salutaire (de certaines plantes). » Racine fils. « Le but ne sanctifie pas tous les moyens. Si on lui attribue «cette vertu, on se charge de tous les crimes commis au nom de la religion comme «de la liberté. » Royer-Collard.

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