Oldalképek
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Que faisait-il, ce roi? Plongé dans la mollesse,
Tandis que le malheur réclamait son appui,
L'ingrat, il oubliait, aux pieds d'une maîtresse,
La vierge qui mourait pour lui!

Ah! qu'une page si funeste

De ce règne victorieux,

Pour n'en pas obscurcir le reste,

S'efface sous les pleurs qui tombent de nos yeux !
Qu'un monument s'élève aux lieux de ta naissance,
O toi, qui des vainqueurs renversas les projets!
La France y portera son deuil et ses regrets,
Sa tardive reconnaissance;

Elle y viendra gémir sous de jeunes cyprès:
Puissent croître avec eux ta gloire et sa puissance!

Que sur l'airain funèbre on grave des combats,
Des étendards anglais fuyant devant tes pas,

Dieu vengeant par tes mains la plus juste des causes.
Venez, jeunes beautés; venez, braves soldats;
Semez sur son tombeau les lauriers et les roses!
Qu'un jour le voyageur, en parcourant ces bois,
Cueille un rameau sacré, l'y dépose et s'écrie:
<«< A celle qui sauva le trône et la patrie,

Et n'obtint qu'un tombeau pour prix de ses exploits ! »>
Notre armée au cercueil eut mon premier hommage1;
Mon luth chante aujourd'hui les vertus d'un autre âge;
Ai-je trop présumé de ses faibles accents?

Pour célébrer tant de vaillance,

Sans doute il n'a rendu que des sons impuissants;
Mais, poëte et Français, j'aime à vanter la France.
Qu'elle accepte en tribut de périssables fleurs.
Malheureux de ses maux, et fier de ses victoires,
Je dépose à ses pieds ma joie ou mes douleurs ;
J'ai des chants pour toutes ses gloires,

Des larmes pour tous ses malheurs.

CASIMIR DELAVIGNE.

1) Allusion à l'élégie sur la bataille de Waterloo, par le même auteur.

LOUIS XI.

HEUREUX Villageois, dansons:
Sautez, fillettes

Et garçons!

Unissez vos joyeux sons,
Musettes

Et chansons!1

Notre vieux roi, caché dans ces tourelles,
Louis, dont nous parlons tout bas,
Veut essayer, au temps des fleurs nouvelles,
S'il peut sourire à nos ébats.

Quand sur nos bords on rit, on chante, on aime,
Louis se retient prisonnier.

Il craint les grands, et le peuple, et Dieu même ;
Surtout il craint son héritier.

Voyez d'ici briller cent hallebardes,

Aux feux d'un soleil pur et doux.
N'entend-on pas le Qui vive des gardes,
Qui se mêle au bruit des verroux?

Il vient! il vient! Ah! du plus humble chaume
Ce roi peut envier la paix :

Le voyez-vous, comme un pâle fantôme,
A travers ces barreaux épais ?

Dans nos hameaux, quelle image brillante
Nous nous faisions d'un souverain !
Quoi! pour le sceptre une main défaillante!
Pour la couronne un front chagrin !

Malgré nos chants, il se trouble, il frissonne :
L'horloge a causé son effroi :

Ainsi toujours il prend l'heure qui sonne
Pour un signal de son beffroi.

4) Ces vers se répètent après chaque strophe. Ce sont des paysans qu'on oblige

de danser et de feindre l'allégresse à la vue du vieux tyran.

Mais notre joie, hélas! le désespère ;

Il fuit avec son favori.

Craignons sa haine, et disons qu'en bon père
A ses enfants il a souri.

Heureux villageois, dansons:
Sautez, fillettes
Et garçons!

Unissez vos joyeux sons,

Musettes

Et chansons!

BÉRANGER.

LA SAINTE ALLIANCE DES PEUPLES1.

J'AI vu la Paix descendre sur la terre,
Semant de l'or, des fleurs et des épis.
L'air était calme, et du dieu de la guerre
Elle étouffait les foudres assoupis.

« Ah! disait-elle, égaux par la vaillance,
<«< Français, Anglais, Belge, Russe ou Germain,
<< Peuples, formez une sainte alliance,
«Et donnez-vous la main.

<< Pauvres mortels, tant de haine vous lasse;
« Vous ne goûtez qu'un pénible sommeil.
<«< D'un globe étroit divisez mieux l'espace;
<«<< Chacun de vous aura place au soleil.
« Tous attelés au char de la puissance,
<«< Du vrai bonheur vous quittez le chemin.
« Peuples, formez une sainte alliance,
« Et donnez-vous la main.

<«< Chez vos voisins vous portez l'incendie;
<«< L'aquilon souffle, et vos toits sont brûlés;
« Et quand la terre est enfin refroidie,
<«<Le soc languit sous des bras mutilés.

4) Composé lorsque l'occupation de la France par les alliés cessa, en 1818.

<«< Près de la borne où chaque État commence,
<< Aucun épi n'est pur de sang humain.
<<< Peuples, formez une sainte alliance,
« Et donnez-vous la main.

<<< Des potentats dans vos cités en flammes,
« Osent du bout de leur sceptre insolent
<< Marquer, compter et recompter les âmes
«Que leur adjuge un triomphe sanglant.
<«<< Faibles troupeaux, vous passez sans défense
<< D'un joug pesant sous un joug inhumain.
<< Peuples, formez une sainte alliance,

<< Et donnez-vous la main.

<«< Que Mars en vain n'arrête point sa course;
<<< Fondez des lois dans vos pays souffrants.
<< De votre sang ne livrez plus la source
<«< Aux rois ingrats, aux vastes conquérants.
<< Des astres faux conjurez l'influence;
«< Effroi d'un jour, ils pâliront demain.
<< Peuples, formez une sainte alliance,
« Et donnez-vous la main.

« Oui, libre enfin, que le monde respire;
« Sur le passé jetez un voile épais;

<«< Semez vos champs aux accords de la lyre;
« L'encens des arts doit brûler pour la paix.
<< L'espoir riant, au sein de l'abondance,
« Accueillera les doux fruits de l'hymen.
<<< Peuples, formez une sainte alliance,
« Et donnez-vous la main. »

Ainsi parlait cette vierge adorée,
Et plus d'un roi répétait ses discours.
Comme au printemps la terre était parée;
L'automme en fleurs rappelait les amours.
Pour l'étranger, coulez, bons vins de France;
De sa frontière il reprend le chemin.
Peuples, formons une sainte alliance,
Et donnons-nous la main.

LE MÊME,

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Que la bulle d'azur que mon souffle agrandit

A leur souffle indiscret s'écroule?

Qui vous dit que leurs voix, leurs pas, leurs jeux, leurs cris, Effarouchent la muse et chassent la péris?

Venez, enfants, venez en foule!

Venez autour de moi; riez, chantez, courez !
Votre œil me jettera quelques rayons dorés,
Votre voix charmera mes heures.

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C'est la seule en ce monde, où rien ne nous sourit,
Qui vienne du dehors sans troubler dans l'esprit
Le chœur des voix intérieures!

Fâcheux qui les vouliez écarter!

Croyez-vous

Que notre cœur n'est pas plus serein et plus doux
Au sortir de leurs jeunes rondes?

Croyez-vous que j'ai peur, quand je vois, au milieu
De mes rêves rougis ou de sang ou de feu,
Passer toutes ces têtes blondes?

La vie est-elle donc si charmante à vos yeux,
Qu'il faille préférer à tout ce bruit joyeux
Une maison vide et muette?

N'ôtez pas, la pitié même vous le défend,
Un rayon de soleil, un sourire d'enfant

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Au ciel sombre, au cœur du poëte!

« Mais ils s'effaceront à leurs bruyants ébats, « Ces mots sacrés que dit une muse tout bas, Ces chants purs où l'âme se noie? >> Et que m'importe à moi, muse, chants, vanités, Votre gloire perdue et l'immortalité,

Si j'y gagne une heure de joie.

La belle ambition et le rare destin!

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Chanter! toujours chanter pour un écho lointain !
Pour un vain bruit qui passe et tombe!

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