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Quand viendra ce printemps par qui tant d'exilés
Dans les champs paternels se verront rappelés.

A nos yeux attentifs que le spectacle change;
Retournons sur la terre, où jusque dans la fange
L'insecte nous appelle, et, certain de son prix,
Ose nous demander raison de nos mépris.
De secrètes beautés quel amas innombrable!
Plus l'Auteur s'est caché, plus il est admirable.
Quoiqu'un fier éléphant, malgré l'énorme tour
Qui de son vaste dos me cache le contour,
S'avance, sans ployer sous ce poids qu'il méprise,
Je ne t'admire pas avec moins de surprise,
Toi qui vis dans la boue et traines ta prison;
Toi que souvent ma haine écrase avec raison;
Toi-même, insecte impur, quand tu me développes
Les étonnants ressorts de tes longs télescopes,
Oui, toi, lorsqu'à mes yeux tu présentes les tiens,
Qu'élèvent par degrés leurs mobiles soutiens.
C'est dans un faible objet, imperceptible ouvrage,
Que l'art de l'ouvrier me frappe davantage.

Dans un champ de blés mûrs, tout un peuple prudent
Rassemble pour l'état un trésor abondant.
Fatigués du butin qu'ils traînent avec peine,
De faibles voyageurs arrivent sans haleine

A leurs greniers publics, immenses souterrains,
Où par eux en monceaux sont élevés ces grains,
Dont le père commun de tous, tant que nous sommes,
Nourrit également les fourmis et les hommes.

Et tous, nourris par lui, nous passons sans retour,
Tandis qu'une chenille est rappelée au jour.

De l'empire de l'air cet habitant volage,

Qui porte à tant de fleurs son inconstant hommage,
Et leur ravit un suc qui n'était pas pour lui,
Chez ses frères rampants qu'il m'éprise aujourd'hui,
Sur la terre autrefois traînant sa vie obscure,
Semblait vouloir cacher sa honteuse figure;

Mais les temps sont changés, sa mort fut un sommeil :
On le voit plein de gloire, à son brillant réveil,
Laissant dans le tombeau sa dépouille grossière,
Par un sublime essor voler vers la lumière.

O ver, à qui je dois mes nobles vêtements,

De tes travaux si courts que les fruits sont charmants'!
N'est-ce donc que pour moi que tu reçois la vie?
Ton ouvrage achevé, ta carrière est finie;

Tu laisses de ton art des héritiers nombreux
Qui ne verront jamais leur père malheureux.
Je te plains, et j'ai dû parler de tes merveilles :
Mais ce n'est qu'à Virgile à chanter les abeilles.
RACINE FILS. La Religion.

LA PRIÈRE.

Le roi brillant du jour, se couchant dans sa gloire,
Descend avec lenteur de son char de victoire.
Le nuage éclatant qui le cache à nos yeux
Conserve en sillons d'or sa trace dans les cieux,
Et d'un reflet de pourpre inonde l'étendue.
Comme une lampe d'or, dans l'azur suspendue,
La lune se balance aux bords de l'horizon;
Ses rayons affaiblis dorment sur le gazon,
Et le voile des nuits sur les monts se déplie:
C'est l'heure où la nature, un moment recueillie,
Entre la nuit qui tombe et le jour qui s'enfuit,
S'élève au Créateur du jour et de la nuit,
Et semble offrir à Dieu, dans son brillant langage,
De la création le magnifique hommage.

Voilà le sacrifice immense, universel!

L'univers est le temple, et la terre est l'autel ;

Les cieux en sont le dôme; et ces astres sans nombre,
Ces feux demi-voilés, pâle ornement de l'ombre,

Dans la voûte d'azur avec ordre semés,

Sont les sacrés flambeaux pour ce temple allumés.
Brillant seul au milieu du sombre sanctuaire,
L'astre des nuits, versant son éclat sur la terre,
Balancé devant Dieu comme un vaste encensoir,
Fait monter jusqu'à lui les saints parfums du soir.
1) Voyez Le Brun, Ode à Buffon (Chrest. III., p. 439).

Et ces nuages purs qu'un jour mourant colore,
Et qu'un souffle léger, du couchant à l'aurore,
Dans les plaines de l'air repliant mollement,
Roule en flocons de pourpre aux bords du firmament,
Sont les flots de l'encens qui monte et s'évapore
Jusqu'au trône du Dieu que la nature adore.

Mais ce temple est sans voix. Où sont les saints concerts?

D'où s'élèvera l'hymne au roi de l'univers?

Tout se tait mon cœur seul parle dans ce silence.

La voix de l'univers, c'est mon intelligence.

Sur les rayons du soir, sur les ailes du vent,
Elle s'élève à Dieu comme un parfum vivant;
Et, donnant un langage à toute créature,
Prête pour l'adorer mon âme à la nature.
Seul, invoquant ici son regard paternel,
Je remplis le désert du nom de l'Éternel:
Et celui qui, du sein de sa gloire infinie,
Des sphères qu'il ordonne écoute l'harmonie,
Écoute aussi la voix de mon humble raison,
Qui contemple sa gloire et murmure son nom.

Salut, principe et fin de toi-même et du monde,
Toi qui rends d'un regard l'immensité féconde;
Ame de l'univers, Dieu, père, créateur,

Sous tous ces noms divers je crois en toi, Seigneur,
Et, sans avoir besoin d'entendre ta parole1,
Je lis au front des cieux mon glorieux symbole.
L'étendue à mes yeux révèle ta grandeur,

La terre ta bonté, les astres ta splendeur.
Tu t'es produit toi-même en ton brillant ouvrage;
L'univers tout entier réfléchit ton image,

Et mon âme à son tour réfléchit l'univers.
Ma pensée, embrassant tes attributs divers,
Partout autour de soi te découvre et t'adore,
Se contemple soi-même et t'y découvre encore:
Ainsi l'astre du jour éclate dans les cieux,

Se réfléchit dans l'onde et se peint à mes yeux.

4) Nous avons grand besoin d'entendre cette parole, qui est l'Évangile de Jésus-Christ, et nous ne pouvons lire au front des cieux notre symbole tout entier. - *) Manifestė.

C'est peu de croire en toi, bonté, beauté suprême ;
Je te cherche partout, j'aspire à toi, je t'aime ;
Mon âme est un rayon de lumière et d'amour
Qui, du foyer divin détaché pour un jour,
De désirs dévorants loin de toi consumée1,
Brûle de remonter à sa source enflammée.
Je respire, je sens, je pense, j'aime en toi.
Ce monde qui te cache est transparent pour moi;
C'est toi que je découvre au fond de la nature.
C'est toi que je bénis dans toute créature.
Pour m'approcher de toi j'ai fui dans ces déserts;
Là, quand l'aube, agitant son voile dans les airs,
Entr'ouvre l'horizon qu'un jour naissant colore,
Et sème sur les monts les perles de l'aurore,
Pour moi c'est ton regard qui, du divin séjour,
S'entr'ouvre sur le monde et lui répand le jour.
Quand l'astre à son midi, suspendant sa carrière,
M'inonde de chaleur, de vie, et de lumière,
Dans ses puissants rayons, qui raniment mes sens,
Seigneur, c'est ta vertu, ton souffle que je sens;
Et quand la nuit, guidant son cortège d'étoiles,
Sur le monde endormi jette ses sombres voiles,
Seul, au sein du désert et de l'obscurité,
Méditant de la nuit la douce majesté,

Enveloppé de calme, et d'ombre, et de silence,
Mon âme de plus près adore ta présence:
D'un jour intérieur je me sens éclairer,
Et j'entends une voix qui me dit d'espérer.

Oui, j'espère, Seigneur, en ta magnificence:
Partout, à pleines mains, prodiguant l'existence,
Tu n'auras pas borné le nombre de mes jours
A ces jours d'ici-bas, si troublés et si courts.
Je te vois en tous lieux conserver et produire ;
Celui qui peut créer dédaigne de détruire.
Témoin de ta puissance, et sûr de ta bonté,
J'attends le jour sans fin de l'immortalité.

La mort m'entoure en vain de ses ombres funèbres;
Ma raison voit le jour à travers ces ténèbres;
C'est le dernier degré qui m'approche de toi,
4) Syllepse, pour consumé.

C'est le voile qui tombe entre ta face et moi.
Hâte pour moi, Seigneur, ce moment que j'implore;
Ou, si dans tes secrets tu le retiens encore,
Entends du baut du ciel le cri de mes besoins;
L'atome et l'univers sont l'objet de tes soins.
Des dons de ta bonté soutiens mon indigence;
Nourris mon corps de pain, mon àme d'espérance;
Réchauffe d'un regard de tes yeux tout-puissants
Mon esprit éclipsé par l'ombre de mes sens;
Et, comme le soleil aspire la rosée,
Dans ton sein à jamais absorbe ma pensée.

M. DE LAMARTINE.

ESSAI SUR L'ASTRONOMIE1.

Sous un règne propice à la gloire des arts,
Près du calme des champs, non loin de nos remparts,
S'élevait cette tour paisible et révérée,

A l'étude des cieux par Louis consacrée 2.

Je vins sur sa hauteur méditer quelquefois :

L'auguste poésie anime encor sa voix,

En contemplant les cieux dont elle est descendue :
Son audace a besoin de leur vaste étendue.
Je connus, j'entendis les sages de ces lieux;
Et quand j'ose chanter leur art audacieux,
Puissent-ils applaudir à celui du poëte!

Déjà, de leurs travaux confidente secrète,
La nuit descend; la nuit fait dans sa profondeur
De ses mille flambeaux rayonner la splendeur.
Cet empire des cieux qu'aujourd'hui développe
A l'œil observateur le savant télescope,

Cacha longtemps ses lois aux mortels curieux,

4) «M. de Fontanes n'a rien écrit de plus élevé que l'Essai sur l'Astronomie. «Il est égal par maint détail, et par l'ensemble il est supérieur aux Discours en << vers de Voltaire; il atteint en français, et comme original à son tour, la perfection « de Pope en ces matières, concision, énergie. Cette grave et stricte poésie s'anime << heureusement, par places, d'un sentiment humain qui repose de l'aspect de tant <«<de justes orbites et répand une piété toute virgilienne à travers les sphères. Le «<style, dans le détail, arrive parfois à un parfait éclat de vraie peinture, à une <«<expression entière et qui emporte avec elle l'objet.» Sainte-Beuve.

2) L'observatoire.

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