Oldalképek
PDF
ePub

Semblait, en foudroyant des dogmes criminels,
Du haut de Sinaï tonner sur les mortels;
L'autre, de traits plus fiers ornant la tragédie,
Portait Jérusalem sur la scène agrandie.
Rousseau saisit encor la harpe de Sion;
Et son rhythme pompeux, sa noble expression,
S'éleva quelquefois jusqu'au chant des prophètes.
Imitez cet exemple, orateurs et poëtes:
L'enthousiasme habite aux rives du Jourdain,
Au sommet du Liban, sous les berceaux d'Eden.
Là, du monde naissant vous suivez les vestiges,
Et vous errez sans cesse au milieu des prodiges.
Dieu parle, l'homme naît; après un court sommeil,
Sa modeste compagne enchante son réveil.
Déjà fuit son bonheur avec son innocence:

Le premier juste expire, ô terreur! ô vengeance!
Un déluge engloutit le monde criminel.

Seule, et se confiant à l'œil de l'Éternel,

L'arche domine en paix les flots du gouffre immense, Et d'un monde nouveau conserve l'espérance.

Patriarches fameux, chefs du peuple chéri, Abraham et Jacob, mon regard attendri Se plaît à s'égarer sous vos paisibles tentes : L'Orient montre encor vos traces éclatantes, Et garde de vos mœurs la simple majesté. Au tombeau de Rachel je m'arrête, attristé, Et tout à coup son fils vers l'Égypte m'appelle. Toi qu'en vain poursuivit la haine fraternelle, O Joseph! que de fois se couvrit de nos pleurs La page attendrissante où vivent tes malheurs ! Tu n'es plus. O revers! près du Nil amenées Les fidèles tribus gémissent enchaînées. Jéhovah les protége, il finira leurs maux. Quel est ce jeune enfant qui flotte sur les eaux? C'est lui qui des Hébreux finira l'esclavage. Fille des Pharaons, courez sur le rivage; Préparez un abri, loin d'un père cruel, A ce berceau chargé des destins d'Israël. La mer s'ouvre: Israël chante sa délivrance. C'est sur ce haut sommet qu'en un jour d'alliance

Descendit avec pompe, en des torrents de feu,
Le nuage tonnant qui renfermait un Dieu.
Dirai-je la colonne et lumineuse et sombre,
Et le désert témoin de merveilles sans nombre?
Aux murs de Gabaon le soleil arrêté?

Ruth, Samson, Débora, la fille de Jephté,

Qui s'apprête à la mort, et parmi ses compagnes,
Vierge encor, va deux fois pleurer sur les montagnes?
Mais les Juifs aveuglés veulent changer leurs lois :
Le ciel, pour les punir, leur accorde des rois ;
Saül règne; il n'est plus; un berger le remplace:
L'espoir des nations doit sortir de sa race:

Le plus vaillant des rois du plus sage est suivi :
Accourez, accourez, descendants de Lévi,
Et du temple éternel venez marquer l'enceinte.
Cependant dix tribus ont fui la cité sainte.

Je renverse, en passant, les autels des faux dieux;
Je suis le char d'Élie emporté dans les cieux ;
Tobie et Raguël m'invitent à leur table:

J'entends ces hommes saints dont la voix redoutable
Ainsi que le passé racontait l'avenir.

Je vois au jour marqué les empires finir.

Sidon, reine des eaux, tu n'es donc plus que cendre!
Vers l'Euphrate étonné quels cris se font entendre ?
Toi qui pleurais, assis près d'un fleuve étranger,
Console-toi, Juda; tes destins vont changer.
Regarde cette main vengeresse du crime,
Qui désigne à la mort le tyran qui t'opprime;
Bientôt Jérusalem reverra ses enfants;
Esdras et Machabée, et ses fils triomphants,
Raniment de Sion la lumière obscurcie.

Ma course enfin s'arrête au berceau du Messie.

FONTANES.

DIEU RÉVÉLÉ PAR LA NATURE.

LOUIS Racine, (1692-1763), fils du grand tragique, ne fut pas seulement un versificateur harmonieux, il eut, dans son poëme de la Religion, de

belles inspirations. Cet ouvrage est d'ailleurs trop didactique; c'est moins un poëme qu'un traité en vers; mais ces vers sont souvent fort beaux'.

Oui, c'est un Dieu caché que le Dieu qu'il faut croire;
Mais, tout caché qu'il est, pour révéler sa gloire
Quels témoins éclatants devant moi rassemblés !
Répondez, cieux et mers; et vous, terre, parlez.
Quel bras peut vous suspendre, innombrables étoiles?
Nuit brillante, dis-nous qui t'a donné tes voiles !
O cieux, que de grandeur et quelle majesté !
J'y reconnais un maître à qui rien n'a coûté,
Et qui dans vos déserts a semé la lumière,
Ainsi que dans nos champs il sème la poussière.
Toi qu'annonce l'aurore, admirable flambeau,
Astre toujours le même, astre toujours nouveau,
Par quel ordre, ô soleil, viens-tu du sein de l'onde
Nous rendre les rayons de ta clarté féconde?
Tous les jours je t'attends, tu reviens tous les jours:
Est-ce moi qui t'appelle et qui règle ton cours?

Et toi, dont le courroux veut engloutir la terre,
Mer terrible, en ton lit quelle main te resserre ?
Pour forcer ta prison tu fais de vains efforts;
La rage de tes flots expire sur tes bords.

En tout

1) On ne lit plus guère le poëme de la Grâce. La prédestination peut-elle faire le sujet d'un poëme? Ce n'est pas, je pense, une question à poser. cas l'ouvrage de L. Racine ne l'a pas résolue affirmativement. Mais il y a place, dans un tel sujet, pour de beaux vers. Citons les suivants:

«L'Église enfin triomphe, et, brillante de gloire,

Fait retentir le ciel des chants de sa victoire.

Elle chante, tandis qu'esclaves désolés,

Nous gémissons encor sur la terre exilés.

Près de l'Euphrate assis, nous pleurons sur ses rives;

Une juste douleur tient nos langues captives.

Eh! comment pourrions-nous au milieu des méchants,

O céleste Sion, faire entendre tes chants?

Hélas! nous nous taisons. Nos lyres détendues
Languissent en silence aux saules suspendues.
Que mon exil est long! O tranquille cité !
Sainte Jérusalem, ô chère éternité !

Quand pourrai-je, au torrent de ta volupté pure,
Boire l'heureux oubli des peines que j'endure?

Quand irai-je goûter ton adorable paix ?
Quand verrai-je ce jour qui ne finit jamais?

Fais sentir ta vengeance à ceux dont l'avarice
Sur ton perfide sein va chercher son supplice'.
Hélas! prêts à périr, t'adressent-ils leurs vœux?
Ils regardent le ciel, secours des malheureux.
La nature, qui parle en ce péril extrême,
Leur fait lever les mains vers l'asile suprême :
Hommage que toujours rend un cœur effrayé
Au Dieu que jusqu'alors il avait oublié.

La voix de l'univers à ce Dieu me rappelle;
La terre le publie: Est-ce moi, me dit-elle,
Est-ce moi qui produis mes riches ornements?
C'est celui dont la main posa mes fondements.
Si je sers tes besoins, c'est lui qui me l'ordonne:
Les présents qu'il me fait, c'est à toi qu'il les donne.
Je me pare des fleurs qui tombent de sa main :
Il ne fait que l'ouvrir, et m'en remplit le sein.
Pour consoler l'espoir du laboureur avide,

C'est lui qui dans l'Égypte, où je suis trop aride,
Veut qu'au moment prescrit, le Nil, loin de ses bords,
Répandu sur ma plaine, y porte mes trésors.
A de moindres objets tu peux le reconnaître :
Contemple seulement l'arbre que je fais croître.
Mon suc, dans la racine à peine répandu,
Du tronc qui le reçoit à la branche est rendu;
La feuille le demande, et la branche fidèle
Prodigue de son bien, le partage avec elle.
De l'éclat de ses fruits justement enchanté,
Ne méprise jamais ces plantes sans beauté,
Troupe obscure et timide, humble et faible vulgaire ;
Si tu sais découvrir leur vertu salutaire,
Elles pourront servir à prolonger tes jours.
Et ne t'afflige pas si les leurs sont si courts:
Toute plante en naissant déjà renferme en elle
D'enfants qui la suivront une race immortelle ;
Chacun de ces enfants, dans ma fécondité,
Trouve un gage nouveau de sa postérité.

Ainsi parle la terre; et, charmé de l'entendre,
Quand je vois, par des nœuds que je ne puis comprendre,

1) Sont-ce des pirates? its ne sont pas assez clairement désignés. Sont-ce des mar chands? l'imprécation est bien injuste.

Tant d'êtres différents l'un à l'autre enchaînés,
Vers une même fin constamment entraînés,
A l'ordre général conspirer tous ensemble,
Je reconnais partout la main qui les rassemble;
Et d'un dessein si grand j'adınire l'unité,
Non moins que la sagesse et la simplicité.

Mais, pour toi que jamais ces miracles n'étonnent,
Stupide spectateur des biens qui t'environnent;
O toi qui follement fais ton Dieu du hasard,
Viens me développer ce nid qu'avec tant d'art,
Au même ordre toujours architecte fidèle,
A l'aide de son bec maçonne l'hirondelle.
Comment, pour élever ce hardi bâtiment,
A-t-elle, en le broyant, arrondi son ciment?
Et pourquoi ces oiseaux, si remplis de prudence,
Ont-ils de leurs enfants su prévoir la naissance?
Que de berceaux pour eux aux arbres suspendus!
Sur le plus doux coton que de lits étendus!
Le père vole au loin, cherchant dans la campagne
Des vivres qu'il rapporte à sa tendre compagne ;
Et la tranquille mère, attendant son secours,
Échauffe dans son sein le fruit de leurs amours.
Des ennemis souvent ils repoussent la rage,

Et dans de faibles corps s'allume un grand courage.
Si chèrement aimés, leurs nourrissons un jour
Aux fils qui naîtront d'eux rendront le même amour.
Quand des nouveaux zéphyrs l'haleine fortunée
Allumera pour eux le flambeau d'hyménée,
Fidèlement unis par leurs tendres liens,
Ils rempliront les airs de nouveaux citoyens:
Innombrable famille, où bientôt tant de frères
Ne reconnaîtront plus leurs aïeux ni leurs pères.
Ceux qui, de nos hivers redoutant le courroux,
Vont se réfugier dans des climats plus doux,
Ne laisseront jamais la saison rigoureuse
Surprendre parmi nous leur troupe paresseuse.
Dans un sage conseil, par les chefs assemblé,
Du départ général le grand jour est réglé;
Il arrive, tout part: le plus jeune, peut-être,
Demande, en regardant les lieux qui l'ont vu naître,

« ElőzőTovább »