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rie, et par conséquent que M. l'évêque de Bangor a eu tort de représenter les chevaux comme un secours de la dernière importance en guerre. Mais on lui répond 1o, que personne n'ignore de quelle utilité est aujourd'hui la cavalerie, soit pour aller en parti, soit pour de promptes expéditions, soit pour renverser et poursuivre l'ennemi dans les combats généraux. Tous les princes en ont à leur service, et s'ils n'en entretiennent pas autant que d'infanterie, ce n'est pas parce qu'ils la jugent moins nécessaire, mais parce qu'elle coûte beaucoup plus, et qu'on ne peut pas s'en servir partout. 2o Il n'est pas question de savoir ce qui se pratique de nos jours, mais ce qui se faisait il y a environ trois mille ans. Or, comme l'a très-bien remarqué M. l'évêque de Bangor, dont on cite ici les paroles, l'on sait assez que c'était en cela (c'est-à-dire dans la cavalerie et les chariots de guerre) que consistant principalement la force des armées dans ces temps reculés, comme il parait par l'histoire ancienne, tant sainte que profane. Telle était la force des Égyptiens, des Assyriens et des autres peuples d'Orient. Et c'est une chose digne de remarque que quand Dieu est introduit dans le livre de Job (qui très-probablement vivait du temps des patriarches) (1) étalant les grandes œuvres de la création, il décrit le cheval comme s'il avait été fait exprès pour le jour de la bataille (2).On joint à cela l'exemple de plusieurs princes voisins de la Judée, dont l'Histoire sainte fait mention, et qui avaient dans leurs armées un très-grand nombre de chevaux et de chariots de guerre, comme Pharaon qui poursuivait les Israélites au travers de la mer Rouge, les rois de Chanaan que Josué défit, Sisera dont Barac mit en déroute la formidable armée; les Philistins au commencement du règne de Saül, le roi de Tsoba que David rendit tributaire, et Sesac qu'on croit généralement être le fameux Sésostris, lorsqu'il prit Jérusalem du temps de Roboam. Les plus anciens auteurs profanes, te's qu'Homère, Virgile, Diodore de Sicile, etc., nous fournissent une infinité d'exemples de cette nature dans les guerres qu'ils décrivent (3), comme le savent tous ceux qui les ont lus. L'auteur de la Dissertation remarque enfin que le dessein de M. l'évêque de Bangor n'a point été, comme son antagoniste l'insinue, d'élever l'utilité de la cavalerie au-dessus de celle de l'infanterie, et qu'il n'a pas même dit un seul mot qui tendît à cela. Il n'a eu en vue que d'établir sa thèse générale, savoir, que Dieu avait défendu aux Israélites l'usage des chevaux et des chariots en guerre, parce qu'il avait hautement pris leur défense, et qu'il voulait les dé'ivrer par son pouvoir immédiat, et non par ces moyens humains dans lesquels les autres nations mettaient toute leur confiance, sans en exclure l'infanterie ni aucun autre secours militaire.

Mais pour faire voir que l'usage qu'on faisait an(1) Voy. la 2 Dissertation de ce prélat dans son livre de l'Usage et des fins de la prophétie dans les divers âges du monde, traduit par M. Le Moine (supra). (2) Job. 39, 22, etc.

(3) Scheffer. de Re vebiculari.

ciennement des chevaux en guerre n'était pas aussi considérable que M. l'évêque de Bangor l'a supposé, l'auteur des Remarques, etc., dit que l'on ignorait l'art de les ferrer, de sorte qu'on ne pouvait pas en tirer grand parti. L'auteur de la Dissertation, etc., convient du fait, et il le confirme même en montrant que si Homère appelle de certains chevaux yaλxómcSas (1), ce n'est que pour marquer la dureté de leur corne. Mais il ajoute que les anciens avaient le secret de durcir la corne des chevaux, comme il paraît par les recettes que Théomneste donne pour cela (2), ce qui revenait exactement à nos fers; car si on ferre aujourd'hui les chevaux, ce n'est pas tant pour les * rendre plus fermes que pour conserver leur corne, qui sans cela s'userait insensiblement. Et puis, de ce qu'on ne ferrait pas autrefois les chevaux, s'ensuitil à considérer la chose en elle-même qu'on ne s'en servît que très-peu en guerre? C'est comme si quelqu'un disait, on ne ferre pas les bœufs, donc ils ne sont pas de grand usage pour charrier ou pour labourer? Cependant il est certain qu'on s'en sert com munément pour cela en plusieurs pays sans les ferrer. Après tout, qu'on lise la guerre de Troie, le plus ancien morceau d'histoire que nous ayons après les livres de Moïse, et l'on verra si on ne s'y servait pas avec avantage des chevaux quoique non ferrés.

Une autre remarque générale que le critique de M. l'évêque de Bangor. fait contre son hypothèse, c'est que la Judée étant un pays montagneux, la cavalerie et les chariots de guerre n'y convenaient point, de sorte que Dieu avait eu raison d'en défendre l'usage aux Israélites. Mais on fui répond 1o que s'il y avait des montagnes dans la Judée, il y avait aussi de grandes vallées et des plaines d'une vaste étendue, où la cavalerie et les chariots de guerre pouvaient servir. 2o Les Chananéens que Josué vainquit et déposséda n'avaient-ils pas dans leurs armées un grand nombre de chevaux et de chariots? Plusieurs rois, après David, et surtout Salomon, n'en ont-ils pas en on quantité? Tite, quand il vint assiéger Jérusalem, n'amena-t-il pas avec lui un corps considérable de cavalerie qui lui fut d'un très-grand usage? Enfin, pour ne pas alléguer un plus grand nombre d'exemples, Sennacherib se moquait-il ou voulait-il se faire moquer de lui, quand il envoya dire à Ezéchias : Avec la multitude de mes chariots, je suis monté au haut des montagnes, aux côtés du Liban (3). 3° Quoique nous ne sachions pas bien comment on se servait des chariots de guerre, il est facile de comprendre que de pareilles machines armées de faux comme elles l'étaient généralement, et se mouvant avec une trèsgrande rapidité dans le penchant des montagnes ou des collines, devaient renverser comme un torrent tout ce qui se rencontrait dans leur chemin, et faire un terrible carnage parmi les ennemis. C'est ce que

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l'auteur de la Dissertation, illustre par un passage remarquable des Commentaires de César, où il est fait mention des chariots de guerre des anciens Bretons et de leur manière de s'en servir (1). Bien qu'il ne prétende pas que ces chariots fussent précisément comme ceux des Orientaux, cependant comme il paraît par ce passage qu'on s'en servait dans des lieux montagneux et dans de rudes descentes, il s'ensuit qu'on pouvait faire usage de chariots de guerre dans la Judée, malgré les montagnes et les collines qui la coupaient.

L'auteur des Remarques, etc., soutient encore que le commerce des Israélites étant fort peu considérable, ils se seraient insensiblement ruinés, s'ils s'étaient mis sur le pied de faire amas de chevaux d'Egypte, et que c'est pour cela que Dieu le leur avait défendu. Mais cette remarque, dit l'auteur de la Dissertation, etc., n'est fondée que sur deux suppositions qui sont également fausses; la première, que les Juifs ne pouvaient avoir de chevaux que de l'Egypte, et qu'ils leur coûtaient beaucoup à nourrir, la Judée n'étant pas propre à cela, toutes choses dont on a déjà démontré le contraire; la seconde, que leur commerce était très-peu étendu, au lieu qu'il est certain que, sous leurs rois, à qui la défense de faire des amas de chevaux s'adressait particulièrement, il était si considérable, que le pays de Chanaan et le pays de commerce étaient des expressions synonimes (2). N'avaientils pas le commerce de la Méditerranée, par le moyen duquel David et Salomon amassèrent des richesses immenses? Ne trafiquaient-ils pas avec les Egyptiens, les Phéniciens, les Syriens les Philistins, etc., outre tous les peuples qui étaient tributaires de la Judée, auxquels ils vendaient leurs denrées, et desquels ils recevaient en échange de l'or, de l'argent et des pierres précieuses? Voyez les vastes trésors que Da

(1) Lib. 4 de Bello Gallico.

Voir Ezéch. 17, 4. Osée 12, 7. Soph. 1. 2, etc.

vid, et plusieurs de ses successears acquirent par cette voie, et jugez si le commerce des Israélites était si peu considérable (1). Il est donc incontestable qu'ils pouvaient faire amas de chevaux, même de chevaux d'Egypte, sans se ruiner. Salomon n'eut-il pas un très-grand nombre de ces derniers? et cependant les Juifs furent-ils jamais plus opulents que sous son règne.

Le critique de M. l'évêque de Bangor finit ses remarques en appliquant à ce prélat ces paroles du fameux Tillotson, les interprétations de l'Ecriture qui demandent beaucoup d'esprit et de recherches critiques, m'ont toujours été les plus suspectes, et en insinuant qu'il s'agit ici d'un précepte moral, dont le sens devrait être par conséquent clair et intelligible. Mais son antagoniste lui fait voir en deux mots, que sa censure porte à faux, puisqu'il est uniquement question de l'explication d'une loi politique, qui n'a été en force qu'aussi longtemps que la théocratie a subsisté parmi les Juifs, c'est-à-dire, tout au plus jusqu'à la captivité de Babylone. Ce n'est que par la distance des temps et des lieux, par l'ignorance de certaines coutumes anciennes, ou le défaut de monuments nécessaires, que cette loi est devenue difficile à entendre. Et de ce qu'il faut aujourd'hui beaucoup de pénétration et de critique pour l'expliquer, s'ensuit-il qu'elle ne fût pas intelligible pour ceux qu'elle regardait? Combien n'y a-t-il pas de passages dans l'Ecriture-Sainte surtout par rapport à l'histoire, aux coutumes, et aux lois politiques et cérémonielles de l'ancien peuple Juif, qui sont accompagnés de difficultés qu'un petit nombre de savants sont à peine capables de résoudre? Faut-il pour cela seul rejeter les solutions qu'ils en donnent? il est facile d'appliquer cette réflexion à l'hypothèse de M. l'évêque de Bangor.

(1) Voir 1 Chron. 29, 2 Chron. 1, l'histoire des Juifs de M. Prideaux, tom. 1, liv. 1, et les Antiq. Jud. de Josèphe.

FORERII VITA.

FORERIUS, Vel FOREIRO (Franciscus), Ulyssiponensis, ex ordine S. Dominici, defunctus anno 1581, duobus theologis associari meruit, quibuscum Catechismum concilii Tridentini elaboraret, postquàm in synodo ob suam rerum sacrarum peritiam ac eloquentiæ laudem in omnium admirationem devenisset. Ille auctor, quamvis in Galliâ minùs fortassè notus, his tamen scriptoribus loco maximè laudabili accenseri debet, qui libros sacros præstantiùs ac uberiùs unquàm interpretati sint. Ipsius in Isaiam Commentarium, quod in Collectione magnorum criticorum insertum reperire est, omnibus quantùmcumque celebratis de eodem propheta lucubrationibus æquiparari potest, eòque magis lectorum aures et animum delectabit, quò mi

S. S. XVIII.

nùs familiare sonabit auctoris extranci nomen. Sensum hebraico cortice reconditum Forerius potissimùm investigat, altâque scientià simul et nervosâ verborum concisione rimatur. Nec propterea quod ad historiam aut ad sublimiorem divinamque litteræ intelligentiam attinet, prætermittit eruditus ac pius interpres, sed luculentâ plerùmque necnon exquisitâ oratione prosequitur. Ne tamen à servatâ hucusque agendi ratione recedere videremur, nobis animo destinatum erat auctorem eximium, pro more quoad cæteros adhibito, notis plurimùm illustrare; cùm verò in decursu laboris nihil aut pauca admodùm in hoc verè regio de prophetarum rege commentario desiderari deprehendissemus, susceptum opus inter

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misimus, ac obiter tantùm et quasi per transennam optimorum Isaia interpretum succum ac medullam expressimus; unde futurum arbitramur, ut nihil ultra indagandum supersit circa vatum principem, cu

jus laudes, post S. Hieronymum, prævio statim ag verè prophetali argumento disertus noster Cornelius à Lapide ordietur.

S. HIERONYMI IN VERSIONEM ISAIÆ,

AD SANCTAS MULIERES PAULAM ET EUSTOCHIUM,

Præfatio.

Nemo cùm prophetas versibus viderit esse descriptos, metro eos existimet apud Hebræos ligari, et aliquid simile habere de Psalmis vel operibus Salomonis : sed quod in Demosthene et Tullio solet fieri, ut per cola scribantur et commata, qui utique proså et non versibus conscripserunt. Nos quoque utilitati legentium providentes, interpretationem novam novo scribendi genere distinximus.

Ac primùm de Isaiâ sciendum quòd in sermone suo disertus sit quippe ut vir nobilis et urban eloquentiæ, nec habens quidpiam in eloquio rusticitatis adinixtum. Unde accidit ut, præ cæteris, florem sermonis ejus translatio non potuerit conservare. Deinde etiam hoc adjiciendum, quòd non tam propheta quàm evangelista dicendus sit. Ita enim universa Christi Ecclesiæque mysteria ad liquidum prosecutus est, ut non eum putes de futuro vaticinari, sed de præteritis historiam texere. Unde conjicio noluisse tunc temporis septuaginta Interpretes fidei suæ sacramenta perspicuè ethnicis prodere, ne sanctum canibus et margaritas porcis darent: quæ, cùm hanc editionem legeritis, ab illis animadvertetis abscondita. Nec ignoro quanti laboris sit prophetas intelligere; nec facilè quempiam posse judicare de interpretatione, nisi intellexerit ante quæ legerit: nos quoque patere morsibus pluri

morum, qui stimultante invidiâ, quod consequi non valent, despiciunt. Sciens ergo et prudens in flammain mitto manum, et nihilominùs hoc à fastidiosis lectoribus precor, ut quo modo Græci post Septuaginta translatores, Aquilam et Symmachum et Theodotionem legunt, vel ob studium doctrinæ suæ, vel ut Septuaginta magis ex collatione corum intelligant, sic et isti saltem unum post priores habere dignentur interpretem. Legant priùs, et postea despiciant, ne videantur, non ex judicio, sed ex odii præsumptione ignorata damnare.

Prophetavit autem Isaias in Jerusalem et in Judæâ, necdum decem tribubus in captivitatem ductis; ac de utroque regno, nunc commixtim, nunc separatim texit oraculum. Et cùm interdùm ad præsentem respiciat historiam, et post Babyloniam captivitatem reditum populi significet in Judæam, tamen omnis ei cura de vocatione gentium et adventu Christi est. Quem quantò plus amatis, ô Paula et Eustochiuni, tantò magis ab eo petite, ut pro obtrectatione præsenti quâ me indesinenter æmuli laniant, ipse mihi mercedem restituat in futuro. Qui scit me ob hoc in peregrinæ linguæ eruditione sudasse, ne Judæi de falsitate Scripturarum Ecclesiis ejus diutiùs insultarent.

Præambula

IN ISAIAM.

Argumentum,

Quæres 1o quis fuit Isaias? — Resp. Fuit filius Amos, ut patet c. 1, 1; non Amos minoris prophetæ, uti putavit S. Epiphan. in vitâ Amos, et Clemens Alexandr. lib. 1 Strom., et Cedrenus in Compend. nistor. ille enim scribitur per ain initio, et per samech in fine, fuitque armentarius et rusticus, vellens sycomoros; sed alterius Amos, qui initio per aleph, et in fine per tsade scribitur, atque hebr. significat fir

mamentum, virtutem, fortitudinem. Radix enim y amats significat firmare, roborare.

Porrò hic Amos Isaiæ pater fuit è regio sanguine, unde in stylo Isaiæ tanta est urbanitas, nitor, decor et gratia, ut vel ex eo solo eum in aulâ regiis moribus educatum fuisse colligere liceat. Creditur ab Hebræis Amos hic fuisse frater Amasiæ regis Juda, qui fuit pater Azariæ vel Oziæ regis, sub quo cœpit prophetare Isaias. Nec desunt qui addant isaiam fuisse etiam

socerum (id est, prosocerum sive patrem soceri; nam Isaias erat tune 126 annorum, ut mox ostendam) Manassis, ut testatur S. Hieron. lib. 3 Comment. in Isaia c. 20, quod etiam sentit Isidorus lib. de Vitå et Morte sanct., c. 28; imò S. Hieron., Quæst. in 2 Paral. c. 33, refert Hebræos tradere, Manassem fuisse filium filiæ Isaiæ; ergo Manassis avum fuisse Isaiam. Hinc patet Isaiam cœpisse prophetare ferè eodem tempore quo Osce et Joel, anno 17 Oziæ, inquit Eusebius; Ozias autem regnare cœpit anno mundi 3137, quod fuit ante initium Olympiadum; hæ enim numerari cœperunt sub annum 40 Oziæ, ideòque ante conditam Romam : hæc enim condita est circiter anno 11 Joatham. Olympiades enim Romam antecesserunt 23 annis. Quare Romulus juvenis erat cùm senesceret Isaias, adeòque Roma condita est sub annum vitæ Isaiæ 76. Favet Clemens Alexandr., lib. 1 Strom., dicens: Isaias à regno Salomonis, cujus tempore ostensum est Menelaum venisse in Phoeniciam, ducentesimo anno adhuc prophetâsse cernitur. Nam annus 200 à morte et regno Salomonis, incidit in annum 34 Oziæ, vel Azariæ, quo adhuc prophetabat Isaias, quia scilicet multis jam annis anteactis cœperat, putà anno 17 Oziæ et deinceps. Cœpit ergo prophetare Isaias ante Christum penè annis 800; nam à primo anno regni Oziæ usque ad Christum fluxerunt anni 813. Porrò Isaias fuit conjugatus, habuitque uxorem et filium nomine Jasub, ut patet c. 7, 3.

Quæres 2o quanta sit prophetæ Isaiæ dignitas, excellentia et obscuritas præ aliis prophetis?— Resp.: Pulchrè ea hic describit S. Hieron., eaque patent ex multis primò, quia, sicut S. Paulus raptus fuit in tertium cœlum, ibique doctor et apostolus creatus missus est ad gentes, ita Isaias vidit Deum, ab eoque creatus est propheta, ut dicetur c. 6; unde Eccles. 48, 45, Isaias vocatur propheta magnus, sanctus et fidelis, quia quæ Deus illi revelârat, alacriter, liberè, constanter et fideliter nuntiavit; alacritatis testimonium est c. 6, 8, ubi Deo quasi hærenti quem mitteret ad duros Judæos, fidens ipse et lætus se offert. Secundò, quia à Seraphim accensus calculo ignito consecratus est propheta, factusque quasi seraphinus et ordinis seraphici, c. 6, 6: destinabatur enim à Deo ad hoc ut frigida et gelida hominum corda ardenti suâ concione, vitâ et charitate, Dei cognitione et amore inflammaret. Tertiò, quia in Hebræo est eloquentissimus, teste S. Hieron.; unde et S. Thomas (vel quisquis est auctor) prologo in Isaiam: Isaias, inquit, tripliciter excellit alios prophetas, scilicet pulchris similitudinibus, expressione sententiæ, venustate verborum, quia nobilis erat et eloquens : solet enim Spiritus sanctus organis suis se attemperare, ut in urbanis urbanus, In rusticis rusticanus, in eloquentibus videatur eloquens, perinde ac tibicen in tibiis subtilibus subtiliter modulatur, in crassioribus crassiùs, inquit noster Antonius Fernandius prologo in visiones Isaiæ. Quartò, quia amplissimum, sublimissimum et clarissimum habuit lumen propheticum. Nihil enim ferè est quod ad Hebræorum aliarumque gentium statum pertineat,

atque ab aliis prophetis prædictum sit, quod non multò luculentiùs et graviùs in Isaiâ reperias. Isaias, ait Nazianz. orat. 3, in principio, vocis sublimitate prophetas omnes antecellens; unde alibi cum vocat grandiloquum. Quintò, quia de Christo et Christianis ita prophetat, ut non videatur de futuris vaticinari, sed de præteritis historiam texere, ait S. Hieron.; ut qui Isaiam legerit, versari se putet in Evangelio. Quare in Evangeliis totoque novo Testamento unus Isaias sæpiùs citatur et auditur, quàm omnes reliqui prophetæ simul juncti. Isaiæ enim testimoniis quasi stellis ita interpunctum et irradiatum est Evangelium, ut qui illud exponere voluerit, simul Isaiam, et qui hunc, simul Evangelium interpretari debeat. Hic enim Virginem parientem, Christum conceptum, natum, quæsitum et adoratum à Magis, fugientem in Ægyptum, docentem, concionantem, miracula patrantem, patientem, morientem, resurgentem, venientem ad judicium, judicantem et triumphantem, non tam in Scripturâ descriptum legimus, quàm in vivâ imagine expressum intuemur, ut meritò hæc prophetia præ reliquis vocetur et inscribatur Visio. Certè parvulum Emmanuelem nobis natum, ejusque dolores, cruciatus et tormenta tam graphicè et patheticè depingit Isaias, ut tam passio Jesu Christi secundùm Isaiam, quàm secundùm Matthæum aut Marcum legi et indigitari possit. Quapropter Isaias plenus cst spiritu, non tantùm prophetico, sed et christiano atque apostolico, ejusque prophetia non tantùm prophetia est, sed et Evangelium. Sextò, quia non tantùm prævidit et prædixit ca quæ paulò post, nec tantùm ea quæ ultimis seculis Christi, sed etiam quæ tempore Antichristi in fine mundi eventura sunt: hoc est enim quod ait Eccles. c. 48, 27: Spiritu magno vidit ultima, et consolatus est lugentes in Sion usque in sempiternum. Septimò, quia fuit thaumaturgus, et sua oracula miraculis confirmavit: nam per suas preces evocavit angelum, qui cecidit in exercitu Sennacherib unâ nocte 185 millia Assyriorum. Rursùm reduxit solem, ejusque umbram in horologio Achaz, eoque signo Ezechiæ regi sanitatem restituit, et quindecim annos vitæ addidit, Isaiæ 36 et seq. Octavò, quia plurimis annis prophetavit, videlicet sub Oziâ, qui 52 annis regnavit, sub Joatham, qui 16, sub Achaz, qui 16, sub Ezechià, qui 29, pervenitque ad regnum Manassis filii Ezechiæ. Jam pone illum cœpisse prophetare anno 17 Oziæ, uti tradit Euseb. in Chronico, restabunt ex regno Oziæ anni 36; his adde 16 Joatham, 16 Achaz, et 29 Ezechiæ, colliges annos 96, quibus prophetavit Isaias. Quare, si dicamus eum instar Christi et Joannis Baptistæ, ex more Hebræorum non cœpisse prophetare ante annum ætatis trigesimum, hinc sequetur eum ad decrepitam ætatem vixisse, usque ad annum ætatis 126 et ulteriùs; occidit enim eam Manasses, idque non statim initio regni (cœpit enim ipse regnare puer anno 12 ætatis); sed cùm jam grandior et nequior esset effectus. Nonò, quia Isaias non tantùm propheta fuit et evangelista, sed et apostolus, inquit Cyrill., et Chrysost. homil. de S. Joanne Baptistâ, tom. 3; nam mitti petens missus

est à Deo ad Judæos, c. 6, 8. Meritò ergo Isaias in Synagoga Judæorum præ cæteris prophetis maximi semper est habitus. Decimò, quia insignis fuit vitæ sanctitate et sui contemptu; totus enim nudus plenå luce in ipsâ suâ patriâ et Judææ metropoli, putà Hierosolymis, vir nobilissimus, et famâ ac auctoritate clarissimus, per triduum Dei jussu ambulavit, uti patebit c. 20. Rursùm illustris fuit ejus pietas et misericordia: nam maximam operam posuit in consolando populo et Ecclesiâ; consolatus est enim lugentes in Sion, inquit Ecclesiast., adeò ut ipse omnem respueret consolationem, quia intimo sensu tangebatur et sentiebat afflictionem sui populi, cap. 22, 4. Denique enituit Isaiæ fortitudo, constantia et libertas dicendi ac carpendi vitia regum et principum, iisque comminandi et prædicendi pœnas à Deo infligendas, ut patet c. 1, 10, et c. 39, 3, et alibi. Illustrior fuit hæc libertas in Isaiâ, ex eo quòd ipse haberet uxorem et familiam ac filium; quos omnes intrepidè odiis regum et principum pro Deo et veritate objecit. Atque hâc de causâ Isaias martyrio coronari meruit. Unde S. Paulus, Rom. 10, 20, ait: Isaias autem audet et dicit; ubi Origenes Audet, inquit, et liberè prædicat, cùm sciret sibi ex eo imminere mortem. Unde

Quæres 3o an Isaias sit martyr.—Resp. esse; nam communis Hebræorum et Patrum, ut Origenis hic homil. 1, Dorothei, Isidori, Epiphanii in vitâ Isaiæ, Chrysost. epist. ad Cyriac., Justini contra Tryphon., August. 18 Civit. 24, et aliorum traditio est, Isaiam sub Manasse rege scrrâ dissectum esse. Quam traditionem S. Hieron., lib. 15, in Isaiam, in fine, certissimam vocat, ubi et illud Hebr. 11, secti sunt, vel, ut ipse legit, serrati sunt, intelligit de Isaiâ. Audi Tertull. in Scorpiaco, c. 8: David, inquit, exagitatur, Elias fugatur, Jeremias lapidatur, Isaias secatur, Zacharias inter ædem et altare trucidatur, perennes cruoris < sui maculas silicibus assignans. » Unde Romanum Martyrologium 6 julii de Isaià sic habet : « In Judæâ sancti Isaiæ prophetæ, qui sub Manasse rege sectus in duas partes occubuit. › Et Chronicum Alexandrinum, sive Fasti Siculi sic habent: «Isaias vates à Ma<nasse serrâ divisus occubuit; vaticinatus est annis nonaginta; tumulatus subter quercum Rogel. Et S. Ambros. in c. 20 Lucæ: Quis ille, inquit, in capite vulneratus? Nimirùm Isaias, cujus faciliùs compagem corporis serra divisit, quàm fidem inclinavit, « constantiamque detrivit, aut vigorem mentis exse«cuit. Audi et S. Zenonem episcopum Veronens. et martyrem, serm. de Isaiæ martyrio mira, sed obscurè dicentem: «Isaias, ait, cùm Christum prædiceret, vel cùm futuræ damnationis elogium Israelitico populo (nuntiâsset, atroci feritate blasphemantium commota barbaries, sectum a capite duabus eum violento sup<plicio quasi offulis Bifidavit; jussitque à capite per aures usque ad scapulas secari cervicem. Et inferiùs « Cùm in capite, hoc est, collectæ sensualitatis umbilico, serra viam faceret, et stridore reciproco (sulcos dentium duceret, labebatur credo lamina (serræ) dùm dentes infigit. Mox se ut ad cubile cordis

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<concinnamenti nisu sector sollicitus defixisset, fontis fluenta purpureis laxatis venarum lapsibus, ne venas vermiculatim pollice profanus intenderet, croceus se <affatim imber infundit. » Et mox : ‹ Patuerunt quippe <internorum viscerum castidici juvenis laqueata commercia, sonus buccinæ ferientis, profunda vivacitas, (et sicca jejunia voluptatum. Sed Belial filius Ezechia (Manasses) vir cruentus et prodigus genealogiæ, pythonicorum antistes, intra loricam sacri pectoris fidel comitium, prædicationis politicæ litterarum curiam <requirebat. Quare temerè hanc traditionem negat Abulensis in 4 Reg. 21, quæst 17. Argumentum Abulensis est hoc Isaias in prooemio non nominavit Manassem, sed tantùm Oziam, Joatham, Achaz et Ezechiam; ergo sub Manasse non prophetavit; ergo sub eo non est passus. Sed hoc argumentum infirmuna est: utraque enim consequentia negari potest; nam cur non nominårit Manassem, causæ variæ esse potuerunt, ut, quòd Manasses jam tum esset puer, quòdque non diù sub eo prophetârit, imò fortè non prophetârit, sed tantùm eum docere et redarguere voluerit, ideòque ab eo sit occisus: nam ab eo occisum esse affirmant communiter Patres. Audi et auctorem operis Imperfecti in Matth., hom. 46, in illa verba: Jerusalem, quæ occidis prophetas, et lapidas eos, inquit: «Misi ad te Isaiam, et scrrâsti eum; misi ad te «Jeremiam, et lapidâsti cum; misi Ezechielem, et tractum super lapides excerebrâsti eum. › Vide hic quæ sit merces prophetarum, doctorum et concionatorum, scilicet persecutio, passio et martyrium. Hanc lauream sectati et adepti sunt prophetæ, Christus, Apostoli omnes, S. Joannes Baptista, S. Stephanus, S. Chrysostomus et alii. Idem hodiè expectent boni pastores et prædicatores, putentque hanc suæ libertatis, constantiæ et laborum mercedem esse magnam nimis. Imò Justinus supra, et Tertull., lib. 3 carm. contra Marcion., docent serram hanc ligneam fuisse; loquens enim Tertull. de Isaià sic canit:

Quem populus sectum ligno, sine labe repertum, Immeritum demens crudeli morte peremit. Quod sanè atrox fuit tormentum, præsertim in homine sene 126 annorum. Unde patet Isaiam morte suâ per lignum præfigurâsse mortem Christi in ligno crucis, perinde ut vitâ suâ vitam Christi, imò nomine suo nomen Jesu præfiguravit. Isaias enim hebr. idem est quod salus, vel Salvator Domini, aut Jesus Deus, ut vult Leo Castrius. Quod eniin nos dicimus Isaias, Hebræi dicunt Jesaias, quod exponi potest y Ieschua la, id est, Jesus Deus; totus enim Isaias id unum spectat, ut Jesum Christum Redemptorem et doctorem nostrum aut annuntiet verbis, aut moribus exprimat. Meritò ergo ait hic S. Hieron.: Ignoratio Scripturarum (præsertim Isaia) ignoratio Christi est.

Porrò mortis et martyrii Isaiæ causa fuit duplex; prior vera, quòd videlicet tam liberè Manassem regem, principes et populum increpâsset, ut dixi, ac præsertim quòd c. 1, 10, eos vocâsset principes Sodomorum et populum Gomorrhæ. Rursùm quòd dixisset Deum Judæos excæcaturum et reprobatu

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